L’effet Tate

Un quartier dopé par le nouveau musée

Le Journal des Arts

Le 25 août 2000 - 547 mots

Très prisé des artistes pour ses loyers abordables, le quartier de Southwark a vu s’installer les galeries d’art contemporain depuis l’annonce, en 1994, de l’installation de la Tate Modern. L’inauguration du nouveau musée a accéléré le processus entraînant une flambée de l’immobilier et la fermeture des ateliers.

LONDRES (de notre correspondant) - Ouverte à l’automne dernier dans un ancien magasin d’une rue calme de Southwark, au sud de Londres, la Percy-Miller Gallery s’est déjà imposée comme un lieu important de l’art contemporain. La pionnière est en fait la Purdy Hicks Gallery, inaugurée en juin 1996, après avoir quitté un autre secteur de Southwark près du Design Museum. Avant l’ouverture de la Tate Modern, située au coin de la rue, la galerie était plutôt isolée avec peu ou pas du tout de clientèle de passants. Le quartier est maintenant plus accessible grâce à une nouvelle station de métro et au Millennium Bridge (lire encadré). D’autres pôles d’attraction se sont installés comme le Globe Theatre ou Vinopolis et un musée de la mode devrait ouvrir prochainement. L’emplacement central du quartier, sa proximité avec la Tamise et le potentiel immobilier ont transformé cette zone d’entrepôts abandonnés en une destination touristique très prisée. Cependant, de ce fait, le visage du monde de l’art change. Au fur et à mesure que s’installent les galeries et les restaurants, les artistes partent. L’un des plus importants complexes d’ateliers et de galeries gérés par des artistes, The Tannery, est en train de disparaître. La galerie a fermé il y a un an et les ateliers devront libérer la place dans un proche avenir. La petite galerie Arthur R. Rose qui, depuis deux ans, organisait, à l’initiative d’artistes, des expositions aussi extravagantes qu’impressionnantes fermera bientôt ses portes, les propriétaires jugeant qu’il est temps de passer à autre chose. Cependant, de l’autre côté de la rue, le Delfina Studio Trust connaît une situation plus stable et apparemment plus prospère. Créé en 1988 par Delfina Entrecanales, la “bonne fée des jeunes artistes”, il offre des ateliers aménagés à des artistes étrangers ou londoniens. Le bâtiment, propriété du Trust depuis 1994, abrite également un café et une galerie laquelle programme tant de grands noms, comme Susan Hiller et Mark Wallinger, que de jeunes artistes. La Jerwood Gallery ouverte en septembre 1998 dans un style relativement similaire, figure déjà parmi les lieux qui comptent. Elle ne met pas d’ateliers à disposition, mais des salles de répétition pour la danse et le théâtre. Ces espaces privés, apparemment bien implantés à Southwark et qui se sont établis lorsque l’immobilier était encore relativement abordable, font aujourd’hui, avec les galeries, le caractère du quartier. Selon Bridget Ashley-Miller, codirectrice de la galerie Percy-Miller, la Bermondsey Street sera bientôt envahie par les restaurants chic. Précédemment chez Delfina, elle a assisté à la transformation du quartier en cinq ans et reste très optimiste quant à son avenir. Elle espère voir un plus grand nombre de galeries s’y installer, mais elle est consciente que l’ouverture de la Tate Modern n’est qu’une semi-bénédiction car elle a contribué à l’envol des prix de l’immobilier. Les bâtiments disponibles se font toujours plus rares et contrairement à l’East End, Southwark est sur le point de devenir un pôle touristique, ce qui se fera certainement aux dépens des artistes, obligés de s’installer ailleurs.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°109 du 25 août 2000, avec le titre suivant : L’effet Tate

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