De Lartigue à Wols

Quatre ventes de photographies à Paris

Par Éric Tariant · Le Journal des Arts

Le 3 novembre 2000 - 1029 mots

Quatre ventes de photographies auront lieu à Paris pendant et après le Salon Paris Photo. En vedette, un ensemble de « vintages » de Lartigue provenant de la collection Renée Perle qui fut sa compagne entre 1930 et 1932 (étude Tajan, 21 décembre, hôtel Four Seasons George-V), et 125 tirages originaux d’époque de Wols (étude Baron-Ribeyre, 17 novembre, Drouot). On remarquera également 150 tirages (portraits de famille, vues de voyages...) provenant de la succession du comte de Paris (études Nicolay et Delorme et Fraisse, 14 novembre, Drouot) et un ensemble de photographies XIXe et XXe dont quelques Gustave Le Gray et Man Ray qui seront dispersées le 18 novembre par l’étude Tajan.

PARIS - “Renée est belle, elle est tendre, elle est tout ce que je désire. Je vis dans un rêve”, écrivait Jacques Henri Lartigue dans Instants de ma vie évoquant Renée Perle qu’il rencontra en 1930 alors qu’il venait de rompre avec Bibi Messager, sa première femme. Cette jeune femme de vingt-six ans d’origine roumaine, qui exerça la profession de mannequin, partagea sa vie de 1930 à 1932. Leur liaison passionnée eut pour cadre des villégiatures à la mode comme Cannes, Juan-les-Pins, Antibes, Annecy ou Interlaken.

“Des femmes que Jacques a photographiées, Renée est l’une des plus connues, autant que les élégantes du bois de Boulogne du début du siècle. Sa silhouette élancée, sa manière d’être non-conformiste, sa photogénie font que les portraits d’elle peuvent encore apparaître dans les magazines féminins comme s’ils dataient hier”, écrivait Florette Lartigue. Environ 90 lots seront mis en vente, le 21 décembre à l’hôtel Four Seasons George-V par l’étude Tajan. Ces tirages de petite taille – les plus grands ne dépassent pas le format 18 x 24 cm – provenant des héritiers de Renée Perle, décédée en 1977, sont tous des vintages. Conservés dans des albums de famille, ils seraient pour la plupart en assez bon état.

Les estimations débutent à 15-20 000 francs pour atteindre 80-150 000 francs pour les compositions proches du Surréalisme, aux mises en scènes très graphiques jouant sur les ombres et les reflets. Si l’on tient compte de la grande rareté des vintages de Lartigue et des prix élevés atteints par une partie de la collection Renée Perle qui s’était vendue à Londres, en mai 1997 chez Sotheby’s, ces estimations apparaissent très raisonnables. Plusieurs des tirages vendus outre-Manche avaient, alors, dépassé les 20 000 livres dont une image montrant Renée portant des lunettes de conduite partie à 27 600 livres sterling et une autre représentant Renée à Biarritz enlevée à 25 300 livres. Pour les amateurs qui n’auraient pas trouvé leur bonheur lors de cette vacation, une deuxième chance leur sera offerte dans les prochains mois avec la dispersion du reste du fonds Renée Perle composé de 150 autres tirages.

Des tirages de Paul-Émile Miot
Outre la vente Lartigue, l’étude Tajan, assistée des experts Paul Benarroche et Serge Kakou, organisera le 18 novembre son habituelle vacation d’automne composée de 370 lots et réunissant des tirages des XIXe et du XXe siècles. Parmi elles figurent 43 épreuves exécutées entre 1858 et 1870 par Paul-Émile Miot en Amérique du Sud, à Terre-Neuve et en Océanie, estimées entre 4 000 et 22 000 francs. Un tirage albuminé 18,8 x 25,6 cm montrant une vue de la Rue Joinville à Saint-Pierre (Terre-Neuve) est estimée 3-4 000 francs, un autre d’un iceberg toujours à Terre-Neuve est proposé à 20-22 000 francs. On remarquera aussi quelques tirages de Pascal Sebah exécutés en Égypte (2 500 à 25 000 francs), des Vues de Périgueux de Baldus (15-50 000 francs), des images de Charles Marville, Adolphe Terris et Paul Nadar (Portrait de Sarah Bernhardt, 60-80 000 francs) et plusieurs Gustave Le Gray dont un Portrait d’homme au cigare, vers 1860 (5-6 000 francs), une Vue du Pavillon Richelieu au Louvre, vers 1857 (40-60 000 francs) et un Portrait de Garibaldi, 1860, tirage albuminé d’après négatif verre au collodion (50-60 000 francs). Parmi les photographies du XXe siècle figurent des images de Brassaï, Man Ray (Portrait de madame Morgan, vers 1925, 10-12 000 francs), de Josef Breitenbach et un ensemble de tirages de Willy Ronis estimés de 3 000 à 30 000 francs, le plus cher étant un portfolio au nu provençal comprenant 12 photographies tirées en 1985 par Pierre Jean Amar à 55 exemplaires, chaque tirage étant signé par Ronis (25 –30 000 francs).

Le 14 novembre, les études Nicolay et Delorme et Fraisse disperseront à Drouot, avec le concours de l’expert Marc Pagneux, un ensemble de photographies historiques et familiales provenant de la succession du comte de Paris. Les vingt premières photographies ont été exécutées par le comte Joseph Vigier en 1852 à Claremont, demeure des environs de Londres prêtée par la reine Victoria au roi Louis-Philippe et à la reine Marie-Amélie pendant leur exil. Ainsi d’un contretype de daguerréotype de 1851 montrant Louis-Philippe (3-4 000 francs), d’un tirage papier salé d’après négatif verre du duc d’Aumale (4-5 000 francs) ou encore d’un album composé de 46 photographies de la famille d’Orléans (40-50 000 francs). À noter également un album historique de 293 photographies sur la guerre de Sécession, assemblées en l’honneur du comte de Paris et du duc de Chartres (80-120 000 francs). Ces images devraient attirer des amateurs de photographies XIXe mais aussi les collectionneurs de souvenirs historiques.

Trois jours plus tard, le 17 novembre, l’étude Baron-Ribeyre mettra en vente une collection inédite de photographies de Wols (Alfred Otto Wolfgang Schulze, 1913-1951) composée de 125 tirages originaux d’époque. “Il s’agit de la dernière opportunité d’acquérir des ‘vintages’ de cet artiste car ses œuvres originales sont très rares”, précise l’expert Viviane Esders. Il ne consacra que quelques années de création, entre 1931 et 1940, à la photographie s’appuyant sur quatre thèmes principaux : l’abstraction, le portrait, la photographie de mode et la nature morte. Ses derniers sujets montrant des animaux morts (poulets, lapins...) et des aliments se négocient entre 80 et 150 000 francs. Ses abstractions coloriées partent entre 100 et 150 000 francs, ses vues de Paris autour de 10 000 francs. Tous ces tirages de qualité inégale comportent le tampon de l’atelier de Wols, situé 5 rue de Varennes à Paris.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°114 du 3 novembre 2000, avec le titre suivant : De Lartigue à Wols

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