ENTRETIEN

Hugh Edmeades, président de Christie’s South Kensington, responsable de la formation continue des « auctioneers » chez Christie’s, Londres

« L’“auctioneer”? doit avoir un jeu de scène »

Par Armelle Malvoisin · Le Journal des Arts

Le 27 février 2008 - 661 mots

Depuis combien de temps êtes-vous en charge de la formation des commissaires-priseurs chez Christie’s ?
Je préfère utiliser le terme anglais d’auctioneer, qui porte précisément sur la tenue du marteau plutôt que celui, très français, de « commissaire-priseur », qui couvre de plus larges fonctions.
Je suis auctioneer chez Christie’s depuis 1984. En 2006, j’ai été nommé tout premier directeur international des auctioneers de Christie’s, mais je supervisais déjà les performances de mes confrères en vente publique depuis 2002.

En quoi votre travail de formation d’auctioneers consiste-t-il ?
Il consiste à évaluer l’équipe internationale en place des auctioneers du groupe Christie’s, à apprécier leurs performances au marteau. J’organise des sessions de formation continue en petits groupes de personnes, sessions durant lesquelles nous discutons des problèmes et difficultés qui peuvent surgir de temps à autre pendant le déroulement des enchères. Chez Christie’s, les ventes sont filmées. Cela permet à chaque auctioneer de voir après coup ce qui a été réussi et ce qui l’a moins été.
L’autre aspect tout aussi important de ma mission est la mise en place de stages de formation annuels pour les futures « marteaux » de Christie’s. En formant sérieusement les générations d’auctioneers à venir, nous maintenons notre métier au plus haut niveau de compétence.

Utilisez-vous une méthode particulière pour former les futurs « marteaux » ?
L’un des derniers dispositifs que nous avons expérimentés durant les stages de formation est l’intervention d’un comédien ou d’un metteur en scène pour donner une sensibilité plus théâtrale à la fonction d’auctioneer. Après tout, les ventes aux enchères publiques ne sont-elles pas autre chose qu’une représentation théâtrale ?

Quelles sont les qualités techniques et humaines requises pour être un bon auctioneer ?
Un auctioneer doit d’abord se sentir parfaitement à l’aise avec les « incréments », soit la progression des paliers d’enchères. La réussite d’une vente dépend beaucoup de sa préparation. Il faut notamment se mettre au courant des prix de réserve et des ordres d’achat à exécuter au nom des enchérisseurs qui ne peuvent se déplacer pour la vente. Il est également d’une très grande importance que les enchérisseurs se sentent totalement en confiance et que l’auctioneer sache pour quel montant ils misent lorsqu’ils lèvent la main pour enchérir. Ensuite, un bon rythme d’enchères, ni trop rapide, ni trop lent, est nécessaire au succès d’une vente. Il est enfin appréciable que l’auctioneer fasse preuve d’humour (mais avec modération) et d’humilité, qu’il ne se montre pas distant ou arrogant. Car le public doit concentrer son attention sur les lots offerts et non sur l’auctioneer. L’auctioneer doit maîtriser la langue de sa prestation (l’anglais le plus souvent) et s’exprimer distinctement. Il n’y a rien de pire que d’écorcher le nom d’un artiste par exemple.
L’auctioneer a aussi le devoir de maintenir le contact visuel avec les enchérisseurs et de leur faire sentir qu’ils sont les bienvenus dans nos salles de vente. Il doit avoir l’air sympathique et sourire. Il doit être capable d’avoir un jeu de scène, en variant le ton de sa voix, en utilisant la gestuelle, et par son constant dynamisme, afin de divertir son public et de le maintenir concentré sur la vente, un peu comme un acteur sur les planches. Et par-dessus tout, l’auctioneer doit garder le contrôle des événements et être persuasif sans agressivité.

Une fois que l’on a intégré tout cela, quel profit peut-on en retirer ?
10 % à 20 % de plus sur le montant total de la vente par rapport à un auctioneer moyen.

Selon vous, qui est le meilleur auctioneer au monde ?
Christopher Burge est le meilleur de tous ! Mieux que nous tous, Christopher Burge montre qu’il dirige parfaitement les opérations. C’est vraiment un modèle pour tous les auctioneers, actuels ou futurs. J’ai passé vingt-quatre ans derrière la tribune chez Christie’s, j’ai dirigé plus de 1 500 ventes aux enchères et vendu environ 250 000 lots. Et pourtant, dès que je peux, je vais l’observer en salle pour apprendre et améliorer ma propre performance.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°276 du 29 février 2008, avec le titre suivant : Hugh Edmeades, président de Christie’s South Kensington, responsable de la formation continue des « auctioneers » chez Christie’s, Londres

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