Géricault : plus un

Le Journal des Arts

Le 17 novembre 2000 - 534 mots

L’Étude de vieille femme n’aura pas fait le voyage pour rien. Partie à Flers sous le nom de Schnetz pour une exposition consacrée à ce peintre du XIXe siècle, elle retourne dans son musée d’origine, au Havre, fort d’une nouvelle attribution : Géricault.

FLERS - Cette découverte est le fruit tardif de l’exposition “Jean-Victor Schnetz (1787-1870), couleurs d’Italie”, qui vient de s’achever au Musée du château de Flers (Lire le JdA n° 108, 30 juin 2000). Auteur d’un texte justement consacré à Schnetz et Géricault dans le catalogue, Bruno Chenique, historien d’art et président de l’Association des amis de Géricault, également chargé de mission au Louvre, a reconnu dans cette toile la main de son peintre favori, notamment “sa touche et son cadrage serré”. Une attribution confirmée par Sylvain Laveissière, conservateur au département des peintures du Musée du Louvre. Léguée par le docteur La Caze au Louvre, qui lui doit tant (Chardin...), la toile avait été déposée au Havre en 1873. Après un long séjour en réserve, elle avait retrouvé les cimaises à la faveur de la rénovation du musée. “L’œuvre a longtemps été attribuée à Schnetz car il a peint cette vieille femme à plusieurs reprises”, explique Laurence Chesneau-Dupin, responsable du Musée de Flers. Elle figure ainsi dans La Diseuse de bonne aventure de Clermont-Ferrand, tandis que le musée du Séminaire à Québec conserve une version du tableau du Havre.

Mais on la retrouve aussi chez d’autres peintres de sa génération, fréquentés en Italie : Léon Cogniet, à qui a finalement été rendue la toile d’Orléans, présentée à Flers sous le nom de Schnetz ; Amélie Cogniet ; ou encore François-Joseph Navez dans une Scène de brigands de 1821. “Qui l’a peinte la première fois ? S’agit-il de copies d’après l’un d’eux ?” Autant de questions qui restent à éclaircir.

Le nom de Géricault, déjà prononcé pour une toile figurant la vieille femme, que certains ont proposé d’identifier comme la mère de Maria Grazia Boni, modèle et compagne de Schnetz, n’a rien d’inattendu dans ce contexte. Élève de David, Schnetz avait en effet fréquenté Géricault dans les ateliers parisiens, avant de le retrouver en Italie. D’ailleurs, l’auteur du Radeau de la Méduse ne fut jamais avare de louanges pour son compagnon. Dès 1817, Géricault quitte Rome pour Paris, où il est rejoint par Schnetz en 1820, date approximative, jusqu’à aujourd’hui, du tableau havrais. “Le problème de datation chez Géricault est assez complexe ; les archives et les témoignages directs sont très peu nombreux, rappelle Bruno Chenique. Cette toile pourrait être rattachée au séjour en Italie, mais, stylistiquement, aucune œuvre de ce voyage ne s’en rapproche. Cela n’a aucun sens de la dater de 1816-1817.” On ne peut guère compter sur des croquis rapportés d’Italie car “il n’existe aucun dessin préparatoire à ce tableau ni à la plupart de ses portraits”. Probablement peinte d’après le modèle vivant, l’Étude de vieille femme s’insère naturellement dans son œuvre aux côtés des Portraits de fous, dont la datation est également très discutée. Plusieurs historiens, dont Bruno Chenique, proposent de les situer vers la fin 1820, après la Méduse, plutôt qu’en 1822-1823. Le plus étonnant n’en demeure pas mois cette conjonction de plusieurs artistes autour de cette vieillarde...

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°115 du 17 novembre 2000, avec le titre suivant : Géricault : plus un

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