Histoire de l’art et histoire sociale

Le Journal des Arts

Le 15 décembre 2000 - 437 mots

La définition des rapports sociaux telle qu’on la trouve chez Marx et Engels a exercé une influence considérable sur l’histoire de l’art dans les années trente.

Que les réalités économiques puissent influer sur l’activité de l’esprit n’est pas discutable, mais certainement pas d’une façon mécanique. Une sorte de déterminisme commande trop souvent les études qui se donnent pour objectif la mise en évidence de ce type d’aliénation. Le Hongrois Frederick Antal (1887-1954) commence son livre sur La Peinture florentine et son arrière-plan social au XIVe et au début du XVe siècle (1948) par une présentation du contexte socio-économique et culturel et traite ensuite les œuvres d’art comme des mises en forme de ces facteurs.

Pour Max Raphaël (1889-1952), l’élève de Bergson et de Wölfflin qui fait la connaissance de Picasso, de Matisse et de Rodin en 1911, le processus de la création est fondé à la fois socialement et historiquement. Raphaël s’intéresse à ce qui, dans l’art, concerne l’homme dans sa totalité : mais la singularité de sa position matérialiste réside dans l’importance qu’il accorde aux formes et au fait esthétique. Dans sa Théorie des arts en Italie entre 1450 et 1600 (1940), Anthony Blunt veut montrer que l’amélioration de la condition sociale des artistes, qui est un de leurs objectifs implicites, instrumentalise leur discours théorique.

La grande Histoire sociale de l’art et de la littérature du Hongrois Arnold Hauser, parue en 1953, est trop ambitieuse et se perd dans trop de généralités, même si beaucoup d’intuitions méritent l’attention. Dans le domaine de la sociologie de l’art, c’est Pierre Francastel (1900-1970), dont l’influence a été considérable dans les années soixante-dix et quatre-vingt, qui a poussé le plus loin la tentative d’expliquer les œuvres d’art comme autant de données non-discursives, susceptibles de nous faire comprendre les faits sociaux – son livre Peinture et société paraît en 1953.

Un Meyer Shapiro a dominé par son acuité exceptionnelle l’école américaine d’histoire de l’art. Étudiant avec la même sagacité et la même volonté d’ouvrir de nouvelles brèches dans notre savoir, aussi bien les œuvres du haut Moyen Âge que celles du XXe siècle, Meyer Shapiro a non seulement formé de nombreux historiens de l’art mais quelques grands artistes ont suivi son enseignement. Son article fondamental sur “Courbet et l’imagerie populaire” (1940-41) a été suivi par d’autres études sur la révolution de 1848 et l’activité artistique contemporaine comme celles de T.J. Clark (Une image du peuple, 1973 ; Le Bourgeois absolu, 1973).

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°117 du 15 décembre 2000, avec le titre suivant : Histoire de l’art et histoire sociale

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