Louis XIV à Vaux-le-Vicomte

La statue du roi, dérobée en 1998, a repris place au château

Le Journal des Arts

Le 30 mars 2001 - 789 mots

C’était le 23 juin 1998. Une dizaine de cambrioleurs, entrés par effraction dans le château de Vaux-le-Vicomte, repartaient les bras chargés de la statue équestre de Louis XIV par Girardon et de deux bronzes du XVIIe siècle d’après Jean de Bologne. Après trois ans d’enquête, l’Office central de lutte contre le trafic des biens culturels a retrouvé ces œuvres en Belgique. Restituées à la mi-mars au comte Patrice de Vogüé, propriétaire du château, ces pièces sont la partie immergée d’un formidable butin assemblé, entre 1996 et 1998, par un important réseau de malfaiteurs belges et français.

MAINCY - Le 12 mars à 13 heures, les portes du château de Vaux-le-Vicomte étaient grandes ouvertes pour accueillir la volumineuse sculpture équestre de Louis XIV, volée en 1998. Pièce incontournable du salon d’Hercule, cette sculpture de 1,10 mètre de haut, réalisée par Girardon en 1699, est un modèle réduit de la statue qui ornait la place Louis-le-Grand (actuelle place Vendôme). Elle fut détruite pendant la Révolution française. Ont été également restitués les deux bronzes du XVIIe siècle d’après Jean de Bologne, Hercule terrassant le taureau Archeloüs et Hercule terrassant le centaure Nessus. L’enquête, coordonnée par l’Office central de lutte contre le trafic des biens culturels de la direction de la police judiciaire, a permis, avec le soutien des gendarmes belges,  de démanteler un réseau international de receleurs. Les soupçons portés sur le Hollandais Cornelius Martens se sont confirmés. Connu depuis quinze ans des services de police pour s’être livré à des actes de recel, l’homme, déjà écroué pendant quatre ans, s’est révélé être l’instigateur d’une série de pillages intervenus dans le courant de l’année 1996 dans les musées de Fontainebleau, Compiègne, Sceaux, ainsi qu’au château de Saint-Hilarion, dans les Yvelines. Une deuxième série de cambriolages s’est produite en 1998, à l’abbaye de Chaalis – où est conservée une partie de la collection Jacquemart-André –, au château de Maisons-Laffitte, dans les Yvelines, au château de Ballancourt, dans l’Essonne et à Vaux-le-Vicomte, en Seine-et-Marne. Treize membres de ce réseau ont été appréhendés en novembre dernier. Ils ont avoué avoir participé à des vols – des petits objets du XVIIIe siècle, facilement transportables, tels que pendules ou statuettes – dans plus de 600 demeures. À la suite de ces arrestations, les gendarmes ont pu remonter la filière jusqu’au petit village de Lommel, en Belgique, à proximité d’Anvers. C’est là que résidait Willy Guls, l’un des principaux receleurs. Il fit l’acquisition, pour 60 000 francs, de la statue équestre de Louis XIV auprès de Cornelius Martens. La sculpture fut retrouvée chez lui, le 7 février, enfouie à plus d’un mètre sous le dallage de son garage. L’un des bronzes, Hercule terrassant le taureau d’Archeloüs, fut quant à lui dégagé des profondeurs d’un jardin public, à quelques mètres de la maison. La troisième œuvre fut rendue aux policiers français suite à un appel anonyme, signalant qu’elle avait été déposée au Bourget, en Seine-Saint-Denis.

Plus de 5 800 vols de biens culturels ont été commis l’an passé en France. Les deux tiers de ces pièces volées dans l’Hexagone transiteraient par la Hollande, la Belgique et la Suisse. Les personnes inculpées dans ce trafic sont passibles d’une peine allant de cinq à dix ans. Une peine peu sévère si on la compare aux dix-neuf années endurées par Fouquet dans les geôles du roi pour avoir osé “défier” Louis XIV.

Un cas de gestion privée du Patrimoine

Le château de Vaux-le-Vicomte fut édifié pour Nicolas Fouquet (1615-1680), surintendant des Finances de Louis XIV, de 1656 à 1661. Pour ce faire, Fouquet – dont la devise familiale était « Quo non ascendet » (jusqu’où ne monterait-il pas ?) – fit appel à trois hommes de sa génération : l’architecte Louis Le Vau, le peintre Charles Le Brun et le jardinier André Le Nôtre. Le comte Patrice de Vogüé est l’actuel propriétaire des lieux. Véritable PME, le château, entouré de 500 hectares de terres, fait aujourd’hui travailler toute l’année entre 20 et 100 personnes pour un budget total de 18 millions de francs. Les postes les plus coûteux sont évidemment ceux de l’entretien (22 % du budget total) mais aussi de la restauration et des travaux exceptionnels (25 %). Pour équilibrer ce budget, le propriétaire organise diverses manifestations – visites aux chandelles, promenades sur les canaux – , accueille de multiples tournages cinématographiques (Les Visiteurs 2, Vatel, Le Masque de fer, etc.), ainsi que des séminaires d’entreprises. Dernière initiative : un parterre de fleurs, situé à l’arrière du château, est sur le point d’être replanté d’après une gravure d’Israël Silvestre et un plan d’André Le Nôtre. À voir dès la réouverture, le 31 mars.
- Vaux-le-Vicomte, réouverture le 31 mars, tlj 10 h-18 h, 77950 Maincy, tél. : 01 64 14 41 90.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°124 du 30 mars 2001, avec le titre suivant : Louis XIV à Vaux-le-Vicomte

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