La sculpture participative de West

L’artiste autrichien reçoit les honneurs du Palais Velasquez de Madrid

Le Journal des Arts

Le 13 avril 2001 - 472 mots

Franz West expose à Madrid un ensemble de ses travaux qui ont influencé de façon notoire un grand nombre de jeunes artistes parmi les plus reconnus actuellement. Né en 1947 à Vienne, l’Autrichien a participé aux éditions de 1992 et 1997 de la Documenta de Cassel, mais a aussi exposé à la Biennale de Venise ou au MoMA de New York.

MADRID (de nos correspondantes) - Alicia Chillida, la commissaire de l’exposition madrilène, a dû composer avec le Palais Velasquez de Madrid et les réalisations de Franz West. Pour comprendre le travail de l’Autrichien, il est nécessaire de considérer le contexte culturel dans lequel il s’inscrit. Dans la Vienne des années 1970 placée sous le signe de l’Actionnisme et de ses postulats radicaux, l’art est expérimentation, arme libératrice de la psyché humaine, instrument de catharsis collective. Chez Nitsch, Mühl ou Schwarzkogler, la sauvagerie et l’horreur font partie de l’imaginaire collectif. La génération qui a suivi n’a pu ni voulu atteindre de semblables sommets visuels et physiques de violence. Pourtant, elle a continué d’impliquer directement le visiteur. Les œuvres et les projets artistiques sont des champs d’expérience et nécessitent une participation directe. Parallèlement, l’art conceptuel et ses discours tautologiques sont devenus les courants les plus stimulants pour ces artistes. Comme l’écrit Rosalind Krauss, la sculpture se répand, et l’œuvre se dématérialise. Le piédestal est définitivement écarté et ne peut plus être utilisé de manière innocente. Chaque élément doit être lu comme faisant partie d’un ensemble porteur de sens.

À la différence de ses prédécesseurs, Franz West a introduit un élément ludique dans son travail. Ses séries de sculptures intitulées Paßstücke (Pièces d’identité) présentées pour la première fois en 1980, sont conçues pour être utilisées par les visiteurs. Posées à même le sol, elles sont entourées de miroirs, de manière à se contempler dans l’environnement même de l’œuvre. Le corps humain s’inscrit dans la pièce, objet rude, à l’état d’inachèvement, qui puise dans cette interaction ses qualités artistiques. Les Paßstücke s’offrent au public qui détermine lui-même les règles du jeu. Des photographies exposées à proximité montrent différentes possibilités d’appropriation de ces étranges objets.

L’artiste a transformé ses œuvres en éléments de socialisation, leur déniant ainsi toute “distanciation”. Ses mises en situation ont pu conduire à de multiples collaborations avec d’autres artistes. En ce sens, il a annoncé le travail d’artistes comme Rirkrit Tiravanija ou Jason Rhoades, pour lesquels les événements tirent leur sens des expériences collectives. Franz West inclut aussi des odeurs lors des inaugurations de ses expositions, ou y propose les œuvres de ses amis. Il parvient ainsi, à travers sa propre pratique, à estomper la figure de l’auteur.

- FRANZ WEST, du 19 avril au 24 juin, Museo Nacional Centro de Arte Reina Sofia, Palacio de Velázquez et Palacio de Cristal, Madrid, tél. 34 91 467 50 62, tlj sauf mardi 10h-21h.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°125 du 13 avril 2001, avec le titre suivant : La sculpture participative de West

Tous les articles dans Expositions

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque