Artistes et collectionneurs

Quatre cents œuvres intimes dévoilées à Avignon

Par Philippe Régnier · Le Journal des Arts

Le 31 août 2001 - 451 mots

Que collectionnent les artistes ? La Collection Lambert, à Avignon, offre actuellement un début de réponse pour le moins foisonnant, un éclairage inédit à la fois sur la personnalité et sur le fondement du travail des créateurs sélectionnés. Près de quatre cents œuvres – tous styles et tendances confondus – appartenant à des artistes sont réunies à l’hôtel de Caumont.

AVIGNON - Quel lien unit des gravures des Colonnes trajannes de Piranèse (XVIIIe siècle), un Autoportrait de Cézanne (vers 1880), une sculpture Nok du Nigeria (Ve siècle avant J.-C. – Ve siècle après J.-C.) ou une photographie d’Anna Gaskel (Sunday Drive, 2000) ? Toutes ces œuvres sont la propriété d’artistes, et pas n’importe lesquels, puisqu’elles sont respectivement issues des collections de Miquel Barceló, Jasper Johns, Arman et Douglas Gordon. La Collection Lambert, à Avignon, a réuni ainsi environ quatre cents pièces appartenant à une quarantaine d’artistes qui font tous, de près ou de loin, partie de la galaxie de la galerie Yvon Lambert. Quand les créateurs ne sont pas directement représentés par le marchand parisien, les liens d’amitié et les proximités artistiques ont fait le reste. Au total, l’ensemble ici présenté saute allègrement les frontières des époques, des générations, des civilisations, voire des fonctions, puisque les combles de l’hôtel Caumont s’ouvrent, entre autres, à des reliquaires. Les commissaires de l’exposition ont d’ailleurs conçu cette dernière dans une tradition somme toute classique de la muséographie, en opérant des rapprochements stylistiques et un accrochage thématique. Les confrontations ne sont toutefois pas absentes, à l’instar de cette salle dans laquelle s’opposent des armures japonaises du XVIIe siècle appartenant à Arman et des œuvres de l’Art minimal. Nous sommes loin en tout cas de la reconstitution de chacune des collections comme avait pu l’opérer le Musée d’art moderne de la Ville de Paris pour “Passions privées”. Cet office est en revanche consigné dans l’épais catalogue de l’exposition qui offre des photographies des pièces en situation.

Les œuvres proposent souvent un éclairage instructif sur leur propriétaire, à l’image de la salle voulue par Jan Fabre et entièrement consacrée à des artistes belges. Andres Serrano dévoile des objets religieux habilement mis en scène dans les combles, tandis que Daniel Buren offre un bel ensemble de documents situationnistes. Comme beaucoup d’autres, ce dernier souligne dans le catalogue : “Je ne suis pas du tout collectionneur. J’ai cependant autour de moi des œuvres que j’aime particulièrement et qui pour la plupart proviennent d’échanges.” Des échanges que la Collection Lambert vient aujourd’hui réactiver avec bonheur.

- COLLECTIONS D’ARTISTES, jusqu’au 30 octobre, Collection Lambert, 5 rue Violette, 84000 Avignon, tél. 04 90 16 56 20, tlj sauf lundi 11h-19h ; catalogue, éd. Actes Sud, 2001, 468 p., 350 F, ISBN 2-7427-3296-9.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°131 du 31 août 2001, avec le titre suivant : Artistes et collectionneurs

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