Derain sculpteur

Trente bronzes du peintre à Paris

Le Journal des Arts

Le 27 septembre 2002 - 530 mots

La Galerie de la présidence présente une trentaine de bronzes d’André Derain issus des œuvres en terre modelées par l’artiste. L’exposition rassemble des éditions de la moitié des modèles en terre cuite du peintre, dont les bronzes sont particulièrement rares sur le marché.

PARIS - Depuis de nombreuses années, Françoise Chibret-Plaussu, directrice de la Galerie de la présidence, rassemblait patiemment des sculptures d’André Derain dans l’espoir d’en faire la présentation. L’ensemble est aujourd’hui important puisqu’elle a réuni trente œuvres en bronze, une belle performance eu égard à la rareté de ces pièces sur le marché de l’art.

Trois grandes phases peuvent être distinguées dans l’œuvre sculpté de Derain. Dans un premier temps, vers 1906-1907, l’artiste travaille le bois et la pierre en taille directe ; à la fin de la Première Guerre mondiale, il se tourne vers le métal, qu’il utilise sous forme de plaques de tôle découpées et martelées. Enfin, à partir de 1938, André Derain modèle la terre. Selon l’anecdote rapportée par son épouse, c’est à la suite d’un violent orage, durant l’automne 1938, que l’artiste a découvert dans son jardin sous un arbre déraciné un gisement d’argile. Il s’empresse alors d’exploiter cette nouvelle ressource qu’il travaille et cuit dans son atelier. L’histoire des œuvres en terre de Derain rappelle celle des sculptures de Degas, qui n’étaient, de même, pas destinées à être exposées ni vendues. Les œuvres de Derain sont restées plusieurs années dans l’atelier après son décès en 1954, jusqu’à ce que l’éditeur genevois Pierre Cailler les retrouve et réalise avec le consentement de la veuve de l’artiste vingt exemplaires en bronze de chacune des soixante-quatorze terres cuites encore en état d’être moulées. Mme Derain a ensuite donné à différentes institutions françaises et suisses les œuvres originales.

Ces bronzes aux patines très diverses, allant du jaune clair au vert-brun, sont empreints d’influences archaïques. On retrouve dans les plaquettes, masques et figurines les marques des civilisations antiques méditerranéennes, mais également celles des cultures africaines. Derain était fasciné par l’archaïsme et le primitivisme, et sa connaissance des œuvres anciennes, leurs apports formels et leur assimilation sont manifestes dans les pièces modelées.

La cote des œuvres en bronze de Derain est encore basse pour un artiste de son importance dans l’histoire de l’art du XXe siècle. Les petites plaquettes inspirées de l’Orient ancien, comme Le Jongleur, sont vendues à la Galerie de la présidence aux alentours de 8 000 euros, et les pièces les plus importantes, comme La Femme à la coiffe, ne dépassent pas 38 000 euros. Les bronzes sont accompagnés dans leur présentation de plusieurs dessins et toiles, parmi lesquels des grands nus au fusain, des petits personnages à la gouache proches de son illustration de Pantagruel ou encore des portraits de femme.

L’exposition de la Galerie de la présidence est l’une des premières présentations du travail modelé de l’artiste chez un marchand. Derain sera par ailleurs mis à l’honneur cette année à l’Hermitage de Lausanne et au Centre Julio Gonzalès de Valence.

- ANDRÉ DERAIN, SCULPTURES ET ŒUVRES SUR PAPIER, jusqu’au 2 novembre, Galerie de la présidence, 90 rue du Faubourg-Saint-Honoré, 75008 Paris, tél. 01 42 65 49 60, tlj sauf dimanche 10h-13h, 14h-19h, samedi 14h30-19h.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°155 du 27 septembre 2002, avec le titre suivant : Derain sculpteur

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