Provenances prestigieuses

Sotheby’s disperse une collection d’arts premiers

Le Journal des Arts

Le 27 septembre 2002 - 588 mots

Cent six lots d’art africain, océanien, d’Amérique centrale et du Sud sont mis en vente par Sotheby’s le 30 septembre à la galerie Charpentier. Réunies par un amateur européen, les pièces proviennent essentiellement de trois collections prestigieuses.

PARIS - Jacob Epstein, James Hooper et Carlo Monzino sont des collectionneurs mythiques. Ces trois noms devraient attirer les amateurs d’arts primitifs chez Sotheby’s le 30 septembre à l’occasion d’une première vente parisienne. La maison de ventes reste discrète sur l’identité du vendeur, le collectionneur européen qui a réuni ces pièces dont le pedigree suffit pour susciter l’intérêt. L’histoire de la constitution de cette collection reflète celle de l’engouement de l’Occident pour les arts primitifs. L’ensemble est honorablement estimé entre 1,8 et 2,7 millions d’euros. Pour mémoire, la vente d’arts primitifs de la collection René Gaffé, organisée par Christie’s le 8 décembre 2001, a rapporté l’équivalent de 3,9 millions d’euros hors frais. Une autre vacation parisienne d’art tribal a fait date le 30 juin 2001 : celle de la collection Hubert Goldet dispersée par l’étude de Ricqlès. Les 644 lots ont réalisé près de 12 millions d’euros hors frais de produit vendu, soit le double des estimations.
Sotheby’s ne cache pas ses ambitions pour les arts primitifs à Paris. Jean Fritts, responsable du département d’art tribal, déclare vouloir développer cette spécialité dans la capitale. Déjà en avril 2000, un an et demi avant de pouvoir vendre sur le marché français, au moment où le Musée du Louvre inaugurait de nouvelles salles consacrées aux arts premiers, l’auctioneer avait organisé dans sa salle parisienne une exposition des plus importantes œuvres tribales de ses ventes new-yorkaises.

Des collections  mythiques
Cette vente inaugurale ne manque pas de panache. La majeure partie des lots provient de l’ancienne collection du sculpteur anglais Jacob Epstein. L’artiste, mort en 1959, est un des premiers collectionneurs européens à s’intéresser à l’art primitif. Il s’est beaucoup inspiré de l’esthétique Fang du Gabon dans son œuvre. Comme Picasso ou Matisse, il a été client du marchand français Joseph Brummer, dès 1912, avant la vogue de l’art tribal. Il lui a acheté sa première pièce : un élément architectural des îles Marquises, représentant deux femmes dos à dos, estimé 50 000 à 80 000 euros. Par la suite, il a réuni une des plus belles collections de figures Fang, six têtes et douze statues, dont une partie est conservée au Musée Dapper à Paris. La vente propose un gardien de reliquaire estimé entre 30 000 et 50 000 euros.

Puis, Epstein a fait partie de la clientèle des marchands Louis Carré et Charles Ratton. Il s’offrait aussi certaines pièces auprès d’un autre collectionneur d’envergure : James Hooper, un passionné d’art océanien. Hooper ne collectionnait pas pour l’esthétique. Comme bien des amateurs de l’époque, sa quête était ethnographique. Ce qui ne l’empêchait pas d’acquérir des pièces magnifiques, comme une figure féminine de l’île de Pâques, un des fleurons de la vente. Cette rare statuette Moai pa’a-pa’a, hiératique et stylisée, sculptée avec précision, est estimée entre 250 000 et 350 000 euros. Hooper l’acheta en 1930. Après sa mort, elle a été vendue aux enchères au grand collectionneur italien Carlo Monzino. C’est justement cet esthète, amateur d’art asiatique et contemporain, qui acheta la collection Epstein en 1963.

Par absorptions successives, la grande majorité des lots de la vente provient de la collection de l’Italien. C’est un beau début pour Sotheby’s France.

- Vente le 30 septembre à 17 heures. Sotheby’s France, galerie Charpentier, 76 rue du faubourg Saint-Honoré, 75008 Paris, tél. 01 53 05 53 05.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°155 du 27 septembre 2002, avec le titre suivant : Provenances prestigieuses

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