Succès au Carré à Paris

La vente de la succession du galeriste a atteint des records

Le Journal des Arts

Le 10 janvier 2003 - 732 mots

Associées pour l’occasion, les maisons Piasa et Artcurial-Briest-Poulain-Le Fur ont procédé les 9 et 10 décembre à la dispersion de l’ancienne collection Louis Carré. Trois vacations durant lesquelles l’hôtel Dassault n’a pas désempli, et qui confirment la place de Paris en troisième position sur le marché de l’art moderne, derrière New York et Londres.

PARIS - La succession d’Olga Carré, troisième épouse du galeriste Louis Carré, restera sans doute dans les mémoires comme la plus importante vente d’art moderne en France de l’année 2002. Cinq salles de l’hôtel Dassault ont été nécessaires pour contenir la foule des acheteurs internationaux venus saluer la collection d’un des plus importants marchands français du XXe siècle. La plupart des 458 lots qui composaient la vente avaient été acquis auprès des artistes il y a plus de cinquante ans et n’avaient pas été exposés publiquement depuis les années 1960. Le succès est indéniable : cent pour cent des lots ont été vendus, totalisant un produit de 19 160 000 euros, qui dépasse le bilan estimatif compris entre 10,5 et 13,9 millions d’euros. Le qualificatif de vente “internationale” n’est d’ailleurs pas usurpé puisque les acheteurs de la première vacation étaient à 44 % français, à 31 % originaires de l’Union européenne et à 21 % de nationalités extra-européennes. Marchands et particuliers ont participé activement aux enchères. “Nous sommes bien entendu ravis, confie Violaine de la Brosse-Ferrand, spécialiste en art moderne du groupe Artcurial. Nous attendions de bons résultats, mais, dans ces proportions-là, il s’agit d’un franc succès ! Le marché a très bien répondu au nom de Louis Carré et a validé ses choix d’artistes. Les trois ventes ont connu un triomphe, sans aucun doute lié à l’homogénéité de la qualité des œuvres.”
Parmi les pièces les plus attendues de la succession figuraient trois importantes toiles de Fernand Léger : les enchères pour Le Disque rouge (1919) ont atteint 1,76 million d’euros, la Composition à l’escalier (1925) a été vendue 1,24 million d’euros au marteau, et la célèbre toile Marie l’acrobate, datée de 1933, qui avait été exposée aux Temps Forts de Drouot, a été adjugée 2,2 millions d’euros au téléphone, établissant ainsi un record français pour l’artiste. Raoul Dufy, représenté par plus de quatre-vingts œuvres, a été plébiscité. Le Concert orange a été adjugé 395 000 euros, au-delà de son estimation haute de 300 000 euros, L’Atelier au champ de blé a atteint 270 000 euros... Seul bémol, Le Moulin de la Galette d’après le tableau de Renoir n’a été vendu “que” 780 000 euros quand les estimations oscillaient entre 1 et 1,3 million d’euros. Très recherchées, les aquarelles de l’artiste ont établi de beaux prix, à l’image des 75 000 euros réalisés par Fenêtre ouverte à Cannes, pourtant estimé entre 23 000 et 30 000 euros.

Villon, Estève et Lanskoy glorifiés
Ce sont au total vingt enchères supérieures à 150 000 euros que l’on dénombre, qui sont peu surprenantes pour des artistes tels que Léger, Bonnard, Klee, Laurens, Dufy ou de Staël, mais plus inattendues dans le cas de Villon, Estève ou encore Lanskoy. Un nombre important d’œuvres d’André Lanskoy qui figuraient dans la vente ont largement dépassé leurs estimations hautes. Une grande huile sur toile sans titre, réalisée en 1961 pour décorer la salle à manger de la demeure de Louis Carré, s’est envolée à 160 000 euros, quatre fois la somme prévue, soit le deuxième meilleur prix pour une toile du peintre sur le marché international. “Les Lanskoy, les Estève, les Herbin et surtout les Villon ont été très bien reçus”, constate Violaine de la Brosse-Ferrand. De peur de ne pas voir le marché absorber la masse trop importante des œuvres de Jacques Villon que compte la succession Carré (l’inventaire après décès en dénombrait cent vingt), une vingtaine seulement ont été proposées à la vente, tandis que les autres seront disséminées dans des vacations ultérieures. Au nombre des plus beaux succès pour l’artiste, citons les résultats de Ailé (1922), adjugé 42 000 euros contre une estimation haute de 15 000 euros, celui des Haleurs nus (1929), vendu 65 000 euros au marteau, pulvérisant son estimation de 5 000-7 000 euros, et surtout celui du superbe autoportrait Homme dessinant (1935), adjugé 180 000 euros quand on en attendait 30 000 euros maximum et qui a été acheté par Patrick Bongers, petit-fils de Louis Carré et directeur de la galerie familiale avenue de Messine, à Paris.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°162 du 10 janvier 2003, avec le titre suivant : Succès au Carré à Paris

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