Rencontre

Moreau-Huysmans

Par Maureen Marozeau · Le Journal des Arts

Le 19 novembre 2007 - 432 mots

Le Musée Gustave-Moreau rend hommage à l’écrivain.

PARIS - La fascination qu’éprouvait Des Esseintes, l’antihéros d’À Rebours, pour la Salomé ou L’Apparition de Gustave Moreau (1826-1898) est rentrée dans les annales de la littérature. Si le culte que vouait Joris-Karl Huysmans (1848-1907) au peintre symboliste a également fait l’objet de nombreuses publications, aucune exposition n’avait encore exploré les liens esthétiques entre le peintre et l’écrivain. « Huysmans-Moreau. Féériques visions », présentée au Musée Gustave-Moreau, à Paris, vient célébrer le centième anniversaire de la mort de l’écrivain, dont le souvenir est entretenu avec soin par la Société J.-K. Huysmans. Fruit d’une collaboration entre historiens de l’art, littérateurs et conservateurs, ce portrait croisé propose une vision de l’œuvre de l’artiste à travers le regard de l’homme de lettres.
Marie-Cécile Forest, directrice du musée, innove ici en organisant pour la première fois une exposition temporaire dans les espaces habituellement dévolus à l’accrochage permanent. Conçue par Hubert Le Gall, habitué des salles des Galeries nationales du Grand Palais, la scénographie s’inscrit en toute harmonie dans l’ancien atelier du peintre, et les espaces temporaires se démarquent grâce à des cimaises de couleur (rose, brun, violet). En marge des chefs-d’œuvre (Galatée, Le Poète et la Sirène…) sont accrochées des études préparatoires et des gravures issues du fonds du musée. La présentation du manuscrit raturé d’À Rebours, prêté par la Bibliothèque nationale de France, est l’occasion d’établir un intéressant parallèle entre le perfectionnisme des deux hommes, tous deux adeptes « du trop plutôt que du trop peu », comme l’explique Marie-Cécile Forest dans le catalogue de l’exposition.
La comparaison s’arrête cependant là, car la présentation se contente d’aligner les œuvres commentées en leur temps par Huysmans. Limitée par l’exiguïté des lieux et l’absence relative de moyens, l’exposition relève davantage de la commémoration (aussi bienvenue soit-elle) que du défrichement de terres inconnues. L’absence de relations entre le peintre et l’écrivain, ainsi que la difficulté de réaliser une exposition autour d’une thématique littéraire, explique sans doute le sentiment de superficialité ressenti lors de la visite.
Huysmans était fasciné par le mode de vie de Moreau, retiré en ermite dans son hôtel particulier du 9e arrondissement de Paris. La rencontre entre les deux hommes, organisée en 1885 par l’intermédiaire de Jean Lorrain, resta sans suite. Selon André Guyaux, professeur de littérature française à la Sorbonne, « il n’est pas exclu que le contact n’ait pas été bon ». Parfois l’idéal et la réalité ne font pas bon ménage.

HUYSMANS-MOREAU

- Commissaires : Marie-Cécile Forest, conservateur en chef du patrimoine, directrice du Musée Gustave-Moreau ; André Guyaux, professeur de littérature française, Paris-Sorbonne ; Philippe Barascud, secrétaire général de la Société J.-K. Huysmans

HUYSMANS-MOREAU, FÉÉRIQUES VISIONS

Jusqu’au 14 janvier 2008, Musée Gustave-Moreau, 14, rue de La Rochefoucauld, 75009 Paris, tél. 01 48 74 38 50, tlj sauf mardi 10h-12h45 et 14h-17h15, www.musee-moreau.fr. Catalogue, Éditions du Regard, 120 p., 20 euros, ISBN 978-2-901425-50-2.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°269 du 16 novembre 2007, avec le titre suivant : Moreau-Huysmans

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