Musée

Entretien

Marie-Hélène Potier : « Sensibiliser les jeunes aux métiers de l’écriture »

Directrice du Musée Champollion, à Figeac

Par Daphné Bétard · Le Journal des Arts

Le 12 novembre 2007 - 673 mots

FIGEAC

Marie-Hélène Potier, directrice du Musée Champollion, inauguré cet été à Figeac (Lot), explique le parti pris de la muséographie et présente les projets à venir.

Au cœur du quartier historique de Figeac (Lot), le Musée Champollion, dédié aux écritures, a ouvert ses portes cet été. Quel a été le parti pris des architectes Alain Moatti et Henri Rivière ?
Leur architecture permet au musée un dialogue constant avec la ville. L’élément le plus spectaculaire est sans nul doute la façade en pierres anciennes dont les baies ouvertes laissent apparaître un second mur de verre et feuilles de cuivre. Ce dernier est percé de signes qui laissent la lumière propager ces écritures au sol à l’intérieur du musée. De même, les visiteurs aperçoivent la ville à travers ces graphismes. C’est un jeu de regard constant. Dans les salles du musée [la scénographie est signée Pascal Payeur], les murs en pierre du bâtiment ancien ont été laissés bruts et tranchent avec de grands aplats de couleurs vives valorisant les vestiges. Chaque couleur correspond à une des thématiques du parcours, ce qui permet de facilement se repérer et met en valeur des collections essentiellement en pierre, papyrus, terre, papier, parchemin.

Comment s’articule ce parcours ?
Le musée est installé dans la maison natale du père de l’égyptologie moderne. Il est donc logique que ce soit lui qui accueille les visiteurs, dans une première salle évoquant le processus de déchiffrement des hiéroglyphes ainsi que son expédition en Égypte. L’ensemble facilite la compréhension de la démarche, d’une rigueur extraordinaire, de Champollion. Les objets ici réunis viennent en grande partie de nos collections, mais aussi de dépôts (Musées du Louvre, Quai Branly, fonds d’archéologie sous-marine à Marseille…) et de dons de collectionneurs privés suscités par l’ouverture du musée. Nous présentons aussi quelques moulages réalisés par des plasticiens pour des pièces uniques au monde, tel le Code d’Hammourabi du Louvre. À la manière d’un déchiffreur, le visiteur remonte le temps pour comprendre comment l’homme est parvenu à l’écriture. À commencer par les signes cunéiformes, les hiéroglyphes, le chinois et le maya, les quatre écritures fondées ex-nihilo, c’est-à-dire qui ont créé leur propre système sans tenir compte des autres (sauf, peut-être pour les hiéroglyphes puisque l’on suppose, sans en avoir la preuve que les gens de Sumer et de la Vallée du Nil se connaissaient). Viennent ensuite les alphabets, puis le monde du livre, de l’époque romaine au XXe siècle. Le Musée Champollion est un musée d’histoire des sociétés du monde en suivant ce fil conducteur qu’est l’écriture.

Musée Champollion – Les Écritures du Monde, La façade aux mille lettres, Pierre di Sciullo, Figeac, 2007 © Photo Luc Boegly / Agence Moatti et Rivière
Musée Champollion – Les Écritures du Monde, La façade aux mille lettres, Pierre di Sciullo, Figeac, 2007.
© Photo Luc Boegly / Agence Moatti et Rivière


Quelle est votre programmation à venir ?
Pour ce qui est des expositions temporaires, nous avons un projet autour du livre et des techniques d’impression pour 2008. Nous souhaitons ensuite collaborer avec l’Imprimerie nationale fermée, malheureusement, depuis deux ans et qui possède un fonds extraordinaire [lire le JdA n° 267, octobre 2007, p. 7]. Nous pourrions évoquer toutes les étapes de fabrication d’un livre, avec des démonstrations sur les machines, actuellement en réserves. Le Musée de l’imprimerie de Lyon a lui aussi un fonds très intéressant. Outre ces expositions, nous souhaitons initier des rencontres et des tables rondes pour essayer de sensibiliser les jeunes aux divers métiers de l’écriture, de la calligraphie à la reliure en passant par la gravure de poinçons.

Au-delà de sa vocation patrimoniale, le musée s’inscrit donc dans la vie professionnelle et économique de la ville ?
Oui, nous allons inviter les artisans à faire des démonstrations et rassembler des métiers liés les uns aux autres. Le musée peut servir de levier économique pour soutenir les artisans. Il s’agit d’encourager des professions de l’écrit qui souhaiteraient s’installer à Figeac. Le maire est très volontariste sur ce point. Avant même l’ouverture du musée, la ville a aidé des jeunes artisans, doreurs, maîtres verriers, restaurateurs (sur les monuments historiques de Figeac), à s’installer. La municipalité souhaite développer un pôle d’artisanat d’art et le musée a un rôle fort à jouer.

Les Ecritures du Monde

Jusqu’au 31 mars, Musée Champollion, place Champollion, 46100 Figeac, tél. 05 65 50 31 08, tlj sauf lundi 14h-17h30, puis 10h-12h et 14h-18h.

Thématiques

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°268 du 2 novembre 2007, avec le titre suivant : Marie-Hélène Potier, directrice du Musée Champollion, à Figeac

Tous les articles dans Patrimoine

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque