Anticipation

Un portrait de robot

Par Christian Simenc · Le Journal des Arts

Le 5 décembre 2003 - 654 mots

Malgré son titre ambitieux, l’exposition « Hommes et robots, de l’utopie à la réalité », à la Maison de la culture du Japon, déçoit parce que trop avare en œuvres.

 PARIS - Qu’ils soient industriels ou voués au loisir, on sait l’omniprésence des robots au pays du Soleil-Levant. D’après la Japan Robot Association, sur les quelque 740 000 robots en service dans le monde en 1999, 400 000 l’étaient au Japon, contre 90 000 aux États-Unis, deuxièmes au palmarès. Mieux : « Au Japon, dans vingt ans, un foyer sur vingt sera équipé d’un robot domestique, et en 2025, le marché de la robotique, non loin derrière celui de l’automobile, représentera 800 milliards d’euros », a indiqué Hisanori Isomura, président de la Maison de la culture du Japon, à Paris, citant lors d’un colloque sur le sujet, le 30 octobre, une étude du mensuel japonais Bungei Shunju. On s’attendait donc, pour cette exposition intitulée « Hommes et robots, de l’utopie à la réalité », à affronter une escouade d’engins promus fers de lance de l’intelligence artificielle nipponne. Or la présentation est plutôt maigrichonne. D’abord, sous forme de pages tirées du catalogue et simplement agrandies, s’étale un historique des robots au Japon, depuis l’époque d’Edo (1603-1868) et ses premiers karakuri-ningyô ou « poupées mécaniques », autrement dit les automates, jusqu’aux androïdes récents, tel le trio Qrio (Sony), Pino (ZMP) et Asimo (Honda). La chronologie est évidemment captivante. En parallèle, un film montre plusieurs exemples de l’intégration de ces robots dans la vie quotidienne des Japonais : du faux poisson pour aquarium d’intérieur, dont la queue est mue par un muscle artificiel, à un système de navigation pour automobile, d’une bouilloire commandée par Internet à HRP-2, un humanoïde « employé » dans un atelier pour déplacer des planches. Mais le film est trop court et exagérément superficiel.
La seconde partie de l’exposition, elle, met en scène des travaux d’artistes usant de la robotique contemporaine, de manière littérale ou plus métaphorique. Certains d’entre eux peuvent paraître anecdotiques, comme Thanks Tail de Kazuhiro Hachiya, un élément articulé qui, placé sur le toit d’une voiture, à l’arrière, remue comme la queue d’un chien. Ou Cochineal de Noboru Tsubaki, un programme de haute voltige informatique qui permet au visiteur, installé dans un siège futuriste, de visualiser les virus qui rôdent dans le cyberespace – symbolisés à l’écran par des asticots géants –, de les traquer et de les détruire, voire, s’il les rate, de « ressentir » leurs méfaits grâce à la multitude de senseurs qui recouvrent l’assise. D’autres œuvres ne manquent pourtant pas d’attirer l’attention, telle cette serre envahie d’orchidées, Orchisoid 03, de Masaki Fujihata, artiste multimédia, et Yûji Dôgane, océanographe et horticulteur. « Une installation qui démontre que les plantes ‘‘communiquent’’ entre elles », précise Yûji Dôgane. Fixés sur une orchidée, des capteurs indiquent, lorsque la plante est arrosée, que les pots alentour « perçoivent » l’humidité de leur « pair ». Reste une collection de pièces désopilantes, celles inventées par les frères Tosa, dits aussi « Maywa Denki », des objets alliant musique, technologie et art. Ainsi, la série « Naki », avec « 26 instruments de musique et autres appareils absurdes », sur le thème du poisson, instruments dont joue Nobumichi Tosa dans des concerts burlesques. Il y a Na-Tate-Goto, une harpe électrique dont les cordes sont frappées par des nageoires, Glass-Carp, un instrument constitué de 8 verres à eau et ayant la silhouette d’une carpe, ou encore la remarquable Na-Cord, une rallonge électrique en forme d’arête de poisson. Au total donc, sept œuvres seulement… Pas de quoi s’étrangler !

HOMMES ET ROBOTS, DE L’UTOPIE À LA RÉALITÉ

Jusqu’au 31 janvier 2004, Maison de la culture du Japon, 101 bis quai Branly, 75015 Paris, du mardi au samedi 12h-19h. Démonstrations de robots et colloques les 13 décembre et 15 janvier, rens. 01 44 37 95 00. Cat. éd. Maison de la culture du Japon, 108 p., 19 euros.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°182 du 5 décembre 2003, avec le titre suivant : Un portrait de robot

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