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Des DESS pour les futurs « pros » de la culture

Le Journal des Arts

Le 20 février 2004 - 1284 mots

Depuis quelques années, les universités proposent des 3es cycles ouverts aux étudiants qui se destinent aux métiers de la culture. Du multimédia à la direction de projets, l’éventail des formations est très large.

Encore marginaux voici une vingtaine d’années, les diplômes d’études supérieures spécialisées (DESS) dans le secteur de la culture font aujourd’hui partie du paysage universitaire. Ils sont même devenus incontournables. Dans ce domaine, de plus en plus de CV, compte tenu de la morosité du marché de l’emploi, arborent ce diplôme de troisième cycle à vocation professionnalisante. Contrairement au DEA (diplôme d’études approfondies), son pendant de niveau bac 5, le DESS n’invite pas à poursuivre les études sur la voie de la recherche. Son ambition est de former des professionnels capables d’assumer des postes à responsabilités dans des structures culturelles. Aussi, il offre un enseignement à la fois théorique et pratique (colloques, rencontres, séminaires, interventions de professionnels extérieurs) qui s’accompagne de stages en entreprises et de la mise en œuvre d’un projet (sous forme de mémoire) en lien avec le monde du travail. « Il s’agit de préparer les étudiants à une “nouvelle époque artistique”, annonce l’université de Rouen en préambule de son DESS « Responsabilité de projets culturels ». Le développement des politiques patrimoniales, aussi bien sous l’impulsion de l’État que sur l’initiative des collectivités territoriales, a considérablement transformé la configuration de l’espace culturel de ces vingt dernières années. Il convient donc de prendre en compte leur évolution, de radiographier le maillage qu’elles ont progressivement constitué, d’analyser les nouveaux métiers et la mutation des pratiques qu’elles ont engendrés. » Cet intitulé, qui offre certaines variantes en fonction des établissements (allant de « Direction de projets culturels » à « Gestion des institutions culturelles »), recouvre actuellement le plus grand nombre des formations proposées. Ainsi à Paris-I, Paris-III, Paris-VIII (Vincennes-Saint-Denis), Dauphine, Montpellier, Lyon-II, Grenoble, Dijon ou Lille-III (lire l’encadré).

La médiation culturelle en tête
Ces DESS ont en commun une certaine transversalité – leur objectif étant de former des généralistes de la culture – et un enseignement fondé sur la connaissance des institutions artistiques et culturelles, l’évaluation des politiques culturelles en France et en Europe, l’économie, la gestion et le droit du patrimoine, ainsi que la conception et le montage d’un projet culturel. Chacun a toutefois sa spécificité. Les DESS de Rouen et de Grenoble proposent une double orientation management/médiation culturelle ; celui de Lyon-II présente une inflexion sociologique et anthropologique marquée ; Lille-III et Paris-VIII se distinguent par leur ouverture sur l’Europe et l’international, Dauphine par la dominante économique et juridique de son enseignement et Paris-I par son contenu muséologique. Mais tous semblent lointainement ou étroitement inspirés du deuxième cycle en muséologie de l’École du Louvre, institution qui a été la première à organiser une formation professionnalisante dans l’immédiate après-guerre. Remanié au début des années 1990, afin d’adapter les cours (qui traitaient surtout de conservation et restauration du patrimoine) à l’émergence de nouveaux métiers au sein des institutions culturelles (médiateurs, régisseurs des œuvres d’art, conférenciers des musées nationaux, attachés de conservation…), ce programme est fondé sur l’étude historique, juridique et sociologique des musées et du patrimoine, l’apprentissage des outils de la recherche (langues vivantes, informatique et bureautique), l’initiation à l’examen des œuvres (analyse, conservation et restauration) et à la muséographie. Ce tronc commun est complété d’une dominante Objets ou Médiation, et d’une option en Droit du marché de l’art ou en Communication dans les musées. Pour Marie-Clarté O’Neill, responsable de ce deuxième cycle, ce cursus présente deux points forts : « Il ne s’adresse qu’à des personnes ayant une solide formation en patrimoine matériel, ce qui n’est pas le cas des DESS, lesquels accueillent généralement des étudiants venant d’horizons très divers (maîtrise en lettres, droit, histoire, histoire de l’art, sociologie…). Il offre en outre un niveau minimum de transversalité – on ne forme pas uniquement à la conservation ou à la médiation – et une possibilité d’approfondissement dans un domaine culturel particulier. »

Loin du caractère généraliste de ce diplôme, de nombreuses formations dispensent en effet un enseignement spécialisé, qui dans le multimédia (Paris-I, Rennes-II, Paris-VIII), qui dans la « Conception et réalisation d’expositions à caractère scientifique et technique » (Paris-XIII), qui dans la médiation culturelle (Nice, Metz) ou encore la conservation préventive (Paris-I). Ont également été créés un DESS « Communication scientifique et technique » (université Louis-Pasteur à Strasbourg) destiné à former des concepteurs/gestionnaires de projets culturels dans le domaine des sciences, et une formation en « Administration locale, développement local et culturel » (université de Reims), qui prépare aux concours des fonctions publiques d’État et territoriale. Sans oublier le 3e cycle professionnel consacré au marché de l’art que propose l’Institut d’études supérieures des arts (IESA). Reconnu par le ministère de la Culture, cet établissement privé s’attache à donner aux étudiants les bases nécessaires à l’expertise des œuvres et des objets d’art, ainsi que les grandes notions juridiques et fiscales de ce marché.

Mais, qu’elles soient transversales ou pointues, quelles sont les finalités réelles de ces formations ? Permettent-elles, objectif affiché du DESS de Rouen, de « former des professionnels de la culture capables de prendre en charge les projets culturels des collectivités territoriales, d’assurer la direction d’un équipement ou d’un service culturel, de participer à la production, la diffusion, la médiation d’un projet, d’un produit ou d’un événement artistique » ? De forger « des spécialistes des actions culturelles étrangères en France » (Lille-III) et « des experts dans le traitement et la communication de l’information scientifique » (Paris-XIII) ? Ou encore de préparer « aux métiers de chef de projet, d’administrateur de site, de concepteur, réalisateur, éditeur et auteur multimédia » (Paris-I) ? Les données chiffrées à notre disposition sont plutôt encourageantes. Ainsi, selon une étude menée en 1999 auprès des étudiants inscrits entre 1992 et 1998 au DESS « Direction de projets culturels » option Métiers de la culture (Institut d’études politiques de Grenoble), seuls 3 % étaient en recherche d’emploi, contre 74 % à être employés par des institutions culturelles, 9 % par les collectivités publiques, les 14 % restant étant regroupés dans la catégorie « indépendants et autres secteurs d’activité ». Menée auprès des élèves diplômés entre 1996 et 1999, la dernière enquête de l’École du Louvre (printemps 2000) a également mis en évidence l’importante professionnalisation des diplômés (69,18 %) et la prééminence du secteur culturel dans les emplois occupés (71,56 %). Le secteur médiation culturelle se place en tête avec 20,7 % des emplois, suivi de la « conservation et mise en valeur du patrimoine » (15 %) du marché de l’art (10,3 %), de l’enseignement (10,3 %) de l’administration (8 %) de l’édition et de la presse (7,5 %) et du multimédia (5,8 %).
La grande inconnue de ces enquêtes reste la durée (CDD ou CDI) et la nature des contrats obtenus, une donnée importante dans le contexte actuel de précarisation des emplois.

Les formations et leurs conditions d’accès

Promotions d’une vingtaine d’élèves, les DESS durent généralement une année universitaire (octobre/juin). Les candidats admis doivent posséder un niveau bac 4 (en histoire de l’art mais aussi en lettres, langues, sciences humaines…) et une expérience dans une institution ou entreprise liée à la culture, ou être des professionnels ayant exercé des métiers patrimoniaux ou artistiques (accès par validation des acquis professionnels). La maîtrise d’au moins une langue (voire deux) est souvent exigée. La sélection s’effectue généralement sur dossier (comprenant un CV et une lettre de motivation), puis sur entretien avec un jury de professionnels et d’enseignants. Le deuxième cycle de l’École du Louvre (Muséologie) est pour sa part accessible aux titulaires du diplôme de premier cycle de l’École (à certaines conditions cependant) ou d’une maîtrise d’histoire de l’art et d’archéologie, après examen de leur dossier.

Pour en savoir plus :

- « Muséologie » (deuxième cycle) à l’École du Louvre, tél. 01 55 35 18 00, www.ecoledulouvre.fr

- DESS « Histoire et gestion du patrimoine français et européen », Paris-I (Panthéon-Sorbonne), tél. 01 40 46 33 48, www.univ-paris.fr

- DESS « Gestion des institutions culturelles », Dauphine, tél. 01 44 05 47 69.

- DESS « Responsabilité de projets culturels. Enjeux artistiques. Politique des publics », université de Rouen, UFR de psychologie, sociologie, sciences de l’éducation, tél. 02 35 14 61 03, www.univ-rouen.fr

- DESS « Action artistique, politiques culturelles et muséologie », université de Bourgogne, UFR droit et sciences politiques, tél. 03 80 58 98 34/03 80 39 53 24, www.u-bourgogne.fr

- DESS « Développement culturel et direction de projets », université Lumière-Lyon-II, tél. 04 78 39 01 05, www.arsec.org

- DESS européen de développement culturel, université Charles-de-Gaulle/Lille-III, UFR langues étrangères appliquées, tél. 03 20 89 63 86, www.univ-lille3.fr

- DESS « Management culturel en Europe », université Paris-VIII/Vincennes-Saint-Denis, tél. 01 49 40 65 92/93, www.iee.univ-paris8.fr

- DESS « Direction de projets culturels », Paris-III (Censier), département de Médiation culturelle, tél. 01 45 87 42 73

- DESS « Direction de projets culturels » option Métiers de la culture, Institut d’études politiques de Grenoble, tél. 04 76 82 60 02, www-sciences-po.upmf-grenoble.fr

- DESS « Direction artistique de projets culturels », université de Montpellier-III, tél. 04 67 06 07 75.

- DESS « Multimédia », Paris-I, UFR arts et sciences de l’art, tél. 01 41 13 24 96.

- DESS « Hypermédia. Réalisation multimédia et édition électronique», Paris-VIII, tél. 01 49 40 67 58.

- DESS « Administration locale, développement local et culturel », université de Reims/Champagne-Ardenne, UFR droit et sciences politiques, tél. 03 26 91 38 38.

- DESS « Communication scientifique et technique », université Louis-Pasteur à Strasbourg, faculté de psychologie et des sciences de l’éducation, tél. 03 90 24 06 24, www.ulp.u-strasbg.fr

- DESS « Conservation préventive des biens culturels », Paris-I, tél. 01 45 83 33 57

- DESS « Créateur de produits multimédia, artistiques et culturels », université Rennes-II, tél. 02 99 14 15 03/10

- DESS « Médiation et ingénierie culturelle », université de Nice-Sophia-Antipolis, tél. 04 92 00 13 30, www.unice.fr

- DESS « Expertise et médiation culturelle », université de Metz, UFR sciences humaines et arts, tél. 03 87 31 59 72, www.sha.univ-metz.fr

- DESS « Conception et réalisation d’expositions à caractère scientifique et technique », Paris-XIII, tél. 01 49 40 37 64.

- DESS « Les métiers du développement culturel et du tourisme », université de Cergy-Pontoise, UFR lettres et sciences humaines, tél. 01 34 25 64 38, www.u-cergy.fr

- DESS « Tourisme, culture et développement local », tél. 04 90 16 26 73, et DESS « Stratégies du développement culturel », tél. 04 90 16 27 18, université d’Avignon.

- DESS « Tourisme et aménagement », université du Littoral à Boulogne-sur-Mer, tél. 03 21 99 41 28.

- DESS « Coopération artistique internationale », Paris-VIII, UFR arts, philosophie, esthétique, tél. 01 42 43 13 52.

- DESS « Luxe, gestion des industries du luxe et métiers de l’art », université de Marne-la-Vallée, tél. 01 49 32 90 20, www.univ-mlv.fr

- Troisième cycle professionnel « Marché de l’art », « Métiers de la culture et de l’événement » ou « Multimédia », Institut d’études supérieures des arts (IESA), tél. 01 42 86 57 01.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°187 du 20 février 2004, avec le titre suivant : Des DESS pour les futurs « pros » de la culture

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