Monographie

La dame du cubisme

Par Maureen Marozeau · Le Journal des Arts

Le 11 juin 2004 - 563 mots

La galerie Antoine Laurentin consacre une exposition à Marie Laurencin à travers une cinquantaine d’œuvres.

 PARIS - À l’occasion du Carré Rive Gauche, Antoine Laurentin a inauguré son nouvel espace quai Voltaire en rendant hommage à l’œuvre sur papier de Marie Laurencin (1883-1956). Par un heureux concours de circonstances, le galeriste a choisi « la dame du cubisme » pour poursuivre sa série d’expositions monographiques, qui a successivement mis à l’honneur Paul Huet, Paul Ranson et Albert Marquet. Une cinquantaine de dessins, lithographies, aquarelles et gravures permettent d’observer le parcours de l’artiste de 1904 à 1927. Fait rare, le galeriste a pu réunir une dizaine de plaques en cuivre et en acier, utilisées pour les diverses gravures et eaux-fortes.
Les prix démarrent à 2 500 euros avec le petit dessin La Crinoline pour atteindre 30 000 euros avec une aquarelle classique, La Danse. Acheteurs fervents dans les années 1989-1990 – il existe même un Musée Marie-Laurencin à Nagano –, les Japonais n’ont pas été particulièrement sollicités car, selon le galeriste, la clientèle s’est, depuis, largement internationalisée. Si le style de Marie Laurencin – silhouettes éthérées, visages fantomatiques aux yeux en amande, couleurs pastel – est reconnaissable entre tous, il ne fait pourtant pas l’unanimité. Ses œuvres de jeunesse restent pourtant les plus intéressantes.
En 1902, la rencontre avec Georges Braque à l’Académie Humbert détourne définitivement la jeune artiste de la peinture sur porcelaine. Sa fréquentation assidue du Bateau-Lavoir, véritable vivier de l’avant-garde artistique parisienne, lui permet d’entretenir des liens avec Pablo Picasso, André Derain, Max Jacob et Gertrude Stein. La jeune peintre se frotte alors aux divers courants esthétiques avant d’adopter le cubisme, ce jusqu’en 1913.
L’exposition comprend Les Joueuses de flûte (planche en cuivre, 1904) et 1830 (planche en acier, 1906) qui témoignent encore de son style inspiré de l’Art nouveau. Le cubisme fait son apparition très nette dans la gravure sur bois Grande tête de femme (1910), l’encre et lavis La Femme au compotier (1908) ou l’attachant Autoportrait (1906), dessin à l’encre aux dimensions réduites.

Le divertissement
À partir de 1913, année de la fin de sa relation avec le poète Guillaume Apollinaire, Marie Laurencin développe un style personnel qui demeurera sa signature.
Sa prédilection pour l’univers féminin se traduit par la représentation quasi exclusive de femmes discutant, dansant ou arborant des instruments de musique telles Les Huit filles dans un pré (1926) ou Les Jeunes filles au violoncelle (1923). La thématique du divertissement l’inspirera particulièrement – Pantomime (1922) et L’Arlequine (1927) –, l’artiste contribuera d’ailleurs à plusieurs spectacles des Ballets russes, dont Les Biches (1924).
La majorité des pièces ici présentées proviennent de la collection de Jean-Émile Laboureur, qui avait enseigné l’art de la gravure à la jeune Marie. Celui-ci serait l’auteur d’une série de photographies de 1912 immortalisant une Marie Laurencin espiègle, qui pose seule ou en compagnie de l’épouse du peintre Jean Crotti sur le pont d’un paquebot. D’autres pièces proviennent de la collection d’Henri-Pierre Roché, ami de l’artiste et auteur du célèbre roman Jules et Jim, qui a largement commenté son travail. À noter, une rare nature morte, la seule de l’exposition, un Bouquet de 1908 de facture délicate tant par le trait que par la couleur.

MARIE LAURENCIN, ŒUVRES SUR PAPIER

Jusqu’au 26 juin, galerie Antoine Laurentin, 23, quai Voltaire, 75007 Paris, tél. 01 42 97 43 42, tlj sauf dimanche 10h30-13h et 14h-19h, 14h-18 le samedi, www.galerie-laurentin.com.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°195 du 11 juin 2004, avec le titre suivant : La dame du cubisme

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