Feux d’artifice d’expositions à Bâle

Le Journal des Arts

Le 11 juin 2004 - 444 mots

Alors que la Fondation Beyeler fait dialoguer les œuvres de Miró et de Calder, les institutions bâloises proposent un riche parcours, de Toutankhamon à l’art le plus contemporain en passant par Schwitters. Revigorant.

De « Millet-Van Gogh» à « Matisse-Picasso », les expositions nous ont habitués aux face-à-face (parfois poussifs mais toujours rentables), entre deux grands artistes. Mais rarement confrontation n’aura été aussi justifiée et efficace qu’avec « Calder-Miró », titre de la dernière exposition organisée par la Fondation Beyeler à Riehen (Bâle). Conçue en collaboration avec la Phillips Collection de Washington, celle-ci raconte au fil d’une soixantaine de toiles de Miró et de soixante-dix mobiles ou stabiles de Calder l’histoire d’une amitié indéfectible et d’une profonde entente artistique. Les deux hommes, qui fréquentent le milieu surréaliste, se rencontrent à Paris. En 1928, l’Américain découvre l’atelier du peintre espagnol, et ce dernier assiste un an plus tard à une présentation du Cirque Calder, étrange parade de figurines de fil de fer, tissu et carton orchestrée par le sculpteur. D’abord timides, les échanges (d’œuvres et de lettres) comme les rencontres et invitations mutuelles ne cessent dès lors de se multiplier. Seule la mort de Calder, en 1976, y mettra un terme. L’exposition bâloise s’arrête trente ans plus tôt – en 1947, date du premier voyage de Miró en Amérique –, mais les vingt ans qu’elle se propose d’explorer suffisent amplement à sa démonstration. Les œuvres d’ailleurs parlent d’elles-mêmes. Et nouent des liens avant même la rencontre des deux artistes. Les Jouets (1924) ou Cheval, pipe et fleurs rouges (1920) de Miró, et L’Acrobate ou La Vache en velours bleue (1927), « actions toys » animées par Calder, témoignent ainsi d’une fascination partagée pour le monde du jeu et de l’enfance, tandis que la ligne ondulante des premières sculptures en fil de fer de l’Américain trouve un écho troublant dans les traits aériens qui composent les toiles de l’Espagnol dans les années 1925-1927. L’accrochage fait la part belle à ces affinités thématiques et formelles, visibles dans des œuvres parfois conçues à des années de distance. Le Point rouge de Miró (1925), qui représente une forme organique criblée de longues épines, se prolonge ainsi quelque vingt ans plus tard dans La Bouteille de bois avec cheveux de Calder. Au fil du parcours, une impression s’impose : les silhouettes, sphères et constellations colorées chères à Miró semblent avoir migré dans les mobiles et stabiles de son ami. À moins que ce ne soit l’inverse ?

CALDER-MIRÓ

Jusqu’au 5 septembre, Fondation Beyeler, Baselstrasse 101, Riehen/Bâle, tél. 41 61 645 97 19, tlj 10h-18h, mercredi 10h-20h, www.beyeler.com. Catalogue en anglais et en allemand, éd. Philip Wilson Publishers, 312 p., 58 francs suisses.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°195 du 11 juin 2004, avec le titre suivant : Feux d’artifice d’expositions à Bâle

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