Rétrospective

Gargallo, sculpteur multiple

Le Journal des Arts

Le 10 septembre 2004 - 477 mots

L’Espace Bellevue, à Biarritz, rend hommage à une figure de la sculpture moderne à redécouvrir.

 BIARRITZ - De fer, de pierre, de cuivre, de plomb ou de bronze, l’œuvre de Pablo Gargallo (1881-1934) est presque exclusivement voué à la figure humaine. Une centaine de sculptures, dix bijoux, une soixantaine de dessins et cartons révèlent une création multiple, inclassable, entre académisme et modernité. Peut-être est-ce d’ailleurs pour cette raison – et à cause de la brièveté de sa carrière –, que le sculpteur, né la même année que Picasso, n’occupe pas aujourd’hui une place de premier plan dans l’histoire des avant-gardes. Cette rétrospective, la plus complète depuis l’exposition organisée au Musée d’art moderne de la Ville de Paris en 1981 à l’occasion du centenaire de la naissance de l’artiste, offre l’occasion de le reconsidérer. Construit en six sections reprenant les différents « âges » du fer, du bronze, du cuivre… qui jalonnent l’œuvre, le parcours de l’exposition se déroule dans un ordre chronologique inversé, depuis les œuvres les plus abouties jusqu’aux années de formation révélant un dessinateur aux bases solides (Autoportrait, 1896).
Ami de Picasso dont il sculpte le portrait en 1913 – décliné en plusieurs versions dans l’exposition –, Pablo Gargallo travaille alternativement à Paris, où il séjourne à plusieurs reprises, et à Barcelone. Il partage avec son illustre camarade le désir incessant d’innover, de chercher des solutions formelles nouvelles. Si certaines de ses têtes sculptées peuvent évoquer l’influence de Picasso (ainsi Jeune femme espagnole, 1921), Gargallo ne déforme jamais ses personnages au point de les rendre monstrueux, ceux-ci conservent toujours un caractère très humain. Dès 1907 s’affirme le style particulier de l’artiste, avec un usage inédit du cuivre, qu’il découpe en lamelles pour figurer les mèches de cheveux de ses portraits-masques (Jeune homme aux cheveux frisés, 1911). Son œuvre oscille entre des sculptures très classiques (Volupté, 1908, en marbre blanc ; Académie, 1933-1934), lisses, apaisées, et des créations complexes jouant sur le plein et le vide (Kiki de Montparnasse, en bronze doré ; Portrait du peintre Vicente do Rego Monteiro, 1928, et son visage partiellement évidé), aux matières lourdes rendues légères par une technique de sculpture proche du découpage. Parfois d’une fascinante simplicité, comme l’Autoportrait inachevé de 1927, réduit au minimum et pourtant d’une grande force expressive, ces œuvres se distinguent de manière évidente de l’ensemble.
Le parcours privilégie les rapprochements entre les dessins préparatoires, les cartons découpés et les sculptures définitives, dans une mise en espace digne d’un musée. Riche de nombreux prêts de la famille de l’artiste et notamment de sa fille Pierrette Gargallo, cette exposition présentée au printemps dernier à l’Institut d’art moderne de Valence, en Espagne, permet de réévaluer la place du sculpteur dans l’art du XXe siècle.

PABLO GARGALLO

Jusqu’au 3 octobre, Le Bellevue, place Bellevue, 64200 Biarritz, tél. 05 59 22 37 00, tlj 10h-20h. Catalogue 386 p., 60 euros, ISBN 84-482-369-63.

Pablo Gargallo en dates

1881 Naissance à Maella, Aragon, Espagne. 1907 Série de petits masques où se manifestent ses premières audaces formelles, dans le travail du cuivre et du fer. 1925 Installation définitive à Paris. 1934 Meurt à Reus, Catalogne. 1981 Exposition à Madrid et grande rétrospective parisienne à l’occasion du centenaire de sa naissance. 1985 Ouverture à Saragosse d’un musée consacré à son œuvre. 1989 La galerie Marwan Hoss, à Paris, présente un ensemble important de découpages et de sculptures de l’artiste.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°198 du 10 septembre 2004, avec le titre suivant : Gargallo, sculpteur multiple

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