Dessins anciens

Toujours plus haut

Par Armelle Malvoisin · Le Journal des Arts

Le 18 février 2005 - 559 mots

À New York, les plus belles feuilles se sont arrachées jusqu’à quatre fois leur prix.

 NEW YORK - Les ventes de dessins anciens qui se sont déroulées à New York chez Christie’s et Sotheby’s les 25 et 26 janvier placent définitivement ce marché comme secteur à haute valeur ajoutée. Malgré un taux de change très profitable aux achats européens, les collectionneurs et marchands anglo-saxons ainsi que quelques musées internationaux ont fait l’essentiel du jeu des enchères. Ouvrant les festivités le 25 janvier, Christie’s a cédé 71 % des lots de son épais catalogue pour 4,2 millions de dollars (3,2 millions d’euros), soit 81 % de sa valeur estimée.
La vedette de la vacation revient à La Naissance et le triomphe de Vénus, une belle gouache de François Boucher estimée 80 000 à 120 000 dollars. Redécouverte après avoir été perdue pendant près de deux siècles, elle est partie au Getty Museum à Los Angeles pour 520 000 dollars. Pour Les Funérailles de Mausole, roi d’Halicarnasse de Niccolo Dell’Abate, « un beau dessin raffiné en bon état par un artiste très rare » que l’expert Nicolas Schwed avait estimé 40 000 à 60 000 dollars en pensant qu’il ferait autour de 150 000 dollars, les enchères sont montées à 307 200 dollars – un record pour l’artiste – au profit d’un marchand installé à Londres. Deux autres records notables ont été enregistrés : La Tentation d’Adam, un séduisant dessin de Bartholomeus Spranger qui n’était pas dans un excellent état, a été adjugé 251 200 dollars, plus de deux fois son estimation basse. Et le Christ dans la maison de Simon le Pharisien de Domenico Campagnola, acheté à la vente Chatsworth chez Christie’s en 1984 pour environ 40 000 euros, s’est envolé à 144 000 dollars. Un projet de tabernacle pour la chapelle de la cathédrale de Toulon par Pierre Puget a par ailleurs été emporté par un marchand français contre le Musée de Marseille pour 90 000 dollars. Le lendemain, la vente chez Sotheby’s a rapporté 4,5 millions de dollars (avec 66,5 % de lots vendus et 85 % en valeur). Elle a démarré par deux gros prix qui ont récompensé deux chefs-d’œuvre : le manuscrit Florilegium par Jacques Le Moyne de Morgues illustré de 80 dessins de fleurs à la gouache et aquarelle, acquis par le libraire américain W. Graham Arader III pour 1 136 000 dollars, et un rarissime Portrait d’un jeune homme du cercle de Giovanni Bellini exécuté à la fin du XVe siècle, parti vraisemblablement dans une collection privée pour 800 000 dollars. Entre autres surprises, un dessin italien anonyme du XVI siècle représentant L’Adoration des mages a été adjugé 114 000 dollars à un musée italien qui aura sans doute identifié l’artiste. Enfin, même si le cercle des amateurs de dessins anciens est réputé « intellectuel », il n’hésite pas à se détourner de feuilles historiques ne répondant pas à des critères purement esthétiques. Ainsi, les enchérisseurs ont freiné leurs ardeurs pour Suzanne et les vieillards, un dessin à l’encre du rare Jacopo Ligozzi, adjugé seulement 24 000 dollars chez Christie’s parce que la jeune fille présentait quelques raideurs. Et, sans doute arrêtés par le profil d’un bras disgracieux, les acheteurs ont boudé une Vierge à l’Enfant  d’un autre artiste rare, Federico Barocci, présentée chez Sotheby’s et estimée un peu trop largement 80 000 euros.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°209 du 18 février 2005, avec le titre suivant : Toujours plus haut

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