Art contemporain

Une collection chouchoutée

Par Armelle Malvoisin · Le Journal des Arts

Le 29 avril 2005 - 598 mots

Le travail de promotion de Christie’s sur les petites collections porte ses fruits.

 PARIS - Christie’s soigne sa clientèle. Selon la maison de ventes, il n’y a pas de collections, aussi petites soient-elles, qui ne méritent d’être choyées. Preuve en est, celle d’un couple d’amateurs européens composée de 46 peintures d’après-guerre et d’art contemporain pour laquelle a été déroulé le tapis rouge. Estimée 1,5 million d’euros et bien cataloguée, la vente organisée le soir du 14 avril mettait à l’honneur l’esprit de collection. La recette a été bénéfique puisque 1,85 million d’euros a été comptabilisé.
« Je pense que les œuvres se seraient mal vendues hors contexte de collection. Certains aspects de la peinture présentés dans cette vente, à l’exemple des pièces Cobra, ne sont pas toujours faciles à soumettre au marché », reconnaît avec soulagement Caroline Smulders, la spécialiste en charge de la vente. Pourtant tout n’était pas joué, et, trois jours avant le premier coup de marteau, l’expert montrait quelques signes d’inquiétude au cocktail de présentation de la collection auquel ne s’est rendue guère plus d’une soixantaine de personnes. En proie à un doute énorme sur le lot principal de la vacation, un paysage abstrait de Dubuffet daté de 1952 avec une estimation soutenue de 200 000-300 000 euros, elle a finalement préféré le retirer de la vente plutôt que de tenter un forcing. Elle s’explique : « À ce prix, on ne l’aurait peut-être pas vendu. Et je ne voulais pas décevoir mes collectionneurs qui l’avaient payé cher. Cette période abstraite de Dubuffet, qui est encore sous-cotée, sera certainement révisée, mais aujourd’hui c’est trop tôt pour proposer ce tableau à ce niveau de prix. » Finalement débarrassée de cette œuvre, la vente s’est bien déroulée, avec le zeste de compétition nécessaire pour créer l’émulation souhaitée. L’un des premiers lots, le Vase de fleurs de Fautrier, nouvellement nettoyé de ses glacis ternes et estimé 40 000 euros, a été au cœur d’une bataille d’enchères entre deux téléphones français et américain au terme de laquelle le collectionneur américain l’a emporté pour 162 000 euros. « Pour La Secrétaire renvoyée, une œuvre historique d’Arman de 1963 de la série des “Colères” et estimée 50 000 euros, on avait parié sur 100 000 euros. On l’a vendue 168 000 euros à un collectionneur européen ! » se félicite Caroline Smulders. La partie a été moins facile pour le groupe de peintures Cobra vendues ric-rac à l’estimation basse, sauf pour le tableau d’Asger Jorn qui a été cédé à 213 600 euros, soit son estimation haute. Une paire de bronzes de Lynn Chadwick, estimée prudemment 20 000 euros, qui aurait pu se vendre aisément à Londres, a réussi son test sur le marché parisien avec une adjudication de 48 000 euros. « Je n’ai été déçue que pour des petites choses », conclut l’expert, qui aurait bien aimé par exemple que l’aquarelle de Bissier décolle au-delà de son adjudication de 12 600 euros. Seules trois pièces sont restées invendues : deux œuvres sur papier de Mark Tobey et Henri Michaux, ainsi qu’une composition d’Atlan estimée chèrement 50 000 euros et ravalée à 36 000 euros.
Les deux derniers lots de la vente représentant le mouvement de la Figuration narrative ont particulièrement bien tiré leur épingle du jeu : Il posto, peint en 1968-1969 par Adami, a été acquis pour 73 200 euros, au double de son estimation haute, et La Pause, une toile très pop art datant de 1967 signée Gérard Schlosser et estimée autour de 20 000 euros, a réalisé un record avec une enchère de 49 200 euros.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°214 du 29 avril 2005, avec le titre suivant : Une collection chouchoutée

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