Art impressionniste et moderne

Brancusi prend son envol

Le Journal des Arts

Le 27 mai 2005 - 540 mots

Après la débâcle le 3 mai de la vente Sotheby’s, Christie’s a enregistré le lendemain de meilleurs résultats, notamment en convainquant ses vendeurs de baisser leurs prix de réserve.

 NEW YORK - La première semaine des ventes de mai aura eu des allures de montagnes russes. Alors que les maisons de ventes avaient fait porter l’essentiel de la publicité et des attentes sur les ventes d’art contemporain, bien approvisionnées et on ne peut plus à la mode (à lire dans notre prochaine édition), ce sont les ventes d’art moderne et impressionniste qui, de façon inattendue, ont créé l’événement.
Faute de collections alléchantes ou de successions de premier ordre, les lots proposés par les deux maisons de ventes, hormis quelques vedettes incontestables, paraissaient assez ordinaires.
Chez Sotheby’s, les estimations élevées ont contribué au désastre. « La saison fut rude pour monter une vente », a commenté le codirecteur du département Art moderne et impressionniste de Sotheby’s, David Norman, à l’issue de la vacation. « Nous avons eu à nous battre âprement, et [avons] appris que la modestie reste une vertu. » La vente Sotheby’s comptait certes quelques valeurs sûres, particulièrement d’impressionnistes à bon prix. Reste que, globalement, la semaine s’est ouverte lugubrement, ces brillantes réussites ayant été obscurcies par les 30 % de lots non vendus. La vente a récolté 91 millions de dollars (72 millions d’euros), bien en dessous des 127 à 183 millions prévus par les estimations.
Le soir suivant, chez Christie’s, abattement et consternation s’étaient dissipés, les enchérisseurs se trouvant guéris de leur paralysie aiguë de la veille. Dans une ambiance de ferveur, marchands et collectionneurs ont agité leur raquette, souriant et applaudissant, et un soulagement collectif marqua cette vacation, qui fut une véritable thérapie de groupe. La vente Christie’s a recueilli 143 millions de dollars, près de la barre supérieure des 111 à 150 millions des estimations. « En se pressant à cette vente, a estimé le président de Christie’s États-Unis, Christopher Burge, après la vacation, les gens étaient très désireux d’acquérir de bonnes œuvres d’art. »

SOTHEBY’S

La vente du 3 mai a pris un bon départ avec des œuvres de Monet et de Rodin qui ont suscité un vif intérêt. L’ambiance se détériora rapidement dès qu’une succession de dessins, dont un Juan Gris à la mine de plomb datant de 1916, estimé 200-300 000 dollars (158 000-237 000 euros), ne trouva pas preneur. Les acheteurs ont battu en retraite du côté des impressionnistes, valeurs plus sûres, et ont déserté les grandes cotes de l’art moderne. À son tour, un important Léger de 1914 a été ravalé, en même temps que Le Garçon en bleu de Chaïm Soutine, estimé 4-6 millions. À peine deux lots plus tard, quand le Kandinsky des environs de 1909-1910 – l’une des vedettes de cette vente – a reçu le même accueil glacial, il est devenu évident que la soirée allait être longue et pénible. Elle s’éclaira en quelques occasions, notamment avec la vente de l’autoportrait de Max Beckmann dont on attendait beaucoup. Le paysage tourbillonnant peint par Edvard Munch en 1902, Sommernatt, Åsgårdstrand, a rapporté 4,5 millions (estimé 4-6 millions), alors que la marine peinte par Claude Monet en 1885, La Manneporte, marée haute, a atteint 2,6 millions (estimé 900 000-1,2 million).

CHRISTIE’S

Le lendemain soir chez Christie’s, des lots de meilleure qualité, l’habileté à pêcher les enchères de l’auctioneer Christopher Burge et des estimations plus basses ont constitué la recette du succès. Objectivement, cette vacation n’avait rien d’extraordinaire, mais après la vente de la veille, elle prit figure de miracle. Au fur et à mesure des adjudications, la salle bondée s’animait de plus en plus, marchands et collectionneurs s’apercevant que le marché des ventes publiques avait encore quelques ressources et n’était pas tout à fait près de s’effondrer. Christie’s avait aussi l’avantage de présenter sa vente en dernier, et beaucoup d’œuvres qui auraient échoué la veille passèrent hardiment le cap, les vendeurs ayant manifestement accepté de revoir leurs prix de réserve à la baisse.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°216 du 27 mai 2005, avec le titre suivant : Brancusi prend son envol

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