Peinture

Éblouis par le soleil

Par Maureen Marozeau · Le Journal des Arts

Le 27 mai 2005 - 564 mots

Le Centre de la Vieille Charité à Marseille propose un parcours pictural dans la lumière de la Provence.

 MARSEILLE - Ne cherchez pas Anna Karina, l’ardente chanson de Serge Gainsbourg a juste donné son titre à la nouvelle exposition du Centre de la Vieille Charité à Marseille. « Sous le soleil exactement » suit la course de l’astre céleste dans l’art pictural français de 1750 à 1920, ou comment la lumière de la Provence fit succomber les peintres de la capitale et les artistes locaux.
Organisé de concert par Marie-Paul Vial, conservateur du Musée des beaux-arts de Marseille, et Guy
Cogeval, directeur du Musée des beaux-arts de Montréal, déjà complices sur « Le Triomphe du
Baroque » en 1999, « Sous le soleil exactement » suit les artistes qui, dès le XVIIIe siècle, ont tenté de capter la luminosité si particulière des paysages méditerranéens. La Fontaine du Vaucluse, les remparts d’Avignon ou la montagne Sainte-Victoire ont inspiré les peintres issus de l’Académie de Rome, mais aussi les maîtres provençaux, plus à même de livrer une vision tactile des paysages. Vestige de l’exposition « Anne Vallayer-Coster » en 2003, le plancher en bois brut des salles aux murs bleu outremer renforce l’esprit maritime et rustique des scènes paysannes, de bord de mer et de naufrages ici présentées. Plus loin, le rouge ocre des cimaises et la pierre de sol font écho à la rugosité brûlante de la région, si justement évoquée par le fondateur de l’École de Marseille, Émile Loubon. Dans Les Menons en tête d’un troupeau en Camargue (1853), la poussière, la sécheresse et surtout l’éblouissement d’un soleil au zénith sont palpables et presque dérangeants. Le parcours de l’exposition réserve à cet égard une expérience singulière : forcé d’emprunter les arcades en extérieur pour passer d’une salle à l’autre, le visiteur est à plusieurs reprises ébloui par le soleil et la blancheur de la façade en pierre de la Vieille Charité. Cette ponctuation prend des airs de démonstration sur pièce. Par rapport à « Méditerranée », exposition organisée au Grand Palais en 2000, « Sous le soleil » a certes choisi un arc plus large, mais son parcours, concis par manque de place, vise plus juste. À Montréal, lors de la seconde étape de cette exposition itinérante, le parcours s’enrichira d’environ 80 aquarelles et photographies qui risquent d’en affecter l’équilibre.

Confrontations
Réussie grâce à cette coopération franco-canadienne, l’alliance de prêts internationaux et de pièces provenant des réserves de musées régionaux favorise les découvertes. Ainsi des séries d’Horace Vernet, Paul Cézanne ou Vincent Van Gogh, les confrontations entre Claude Monet et Auguste Renoir ou Albert Marquet et Henri Manguin, et les oppositions entre, par exemple, la générosité picturale et chromatique du Marseillais René Seyssaud et l’économie de moyens du synthétique Félix Vallotton. Enfin, face à l’abondance de toiles signées André Derain, Henri Matisse, figure majeure du Sud, manque cruellement à l’appel. Les célébrations du centenaire du fauvisme, parmi lesquelles deux expositions en préparation à Céret et à Saint-Tropez, n’y sont sans doute pas étrangères.

SOUS LE SOLEIL EXACTEMENT, LE PAYSAGE EN PROVENCE DU CLASSICISME À LA MODERNITÉ (1750-1920)

Jusqu’au 21 août, Centre de la Vieille Charité, 2, rue de la Charité, 13002 Marseille, tél. 04 91 14 58 80, tlj 10h-17h jusqu’au 31 mai, 11h-18h à partir du 1er juin, fermé les jours fériés. Catalogue, Musée des beaux-arts de Montréal/éditions Snoeck (Montréal), 266 p., ill. couleurs, ISBN 90-5349-521-2

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°216 du 27 mai 2005, avec le titre suivant : Éblouis par le soleil

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