Mythologie

Les dragons des Trois Frontières

Par Daphné Bétard · Le Journal des Arts

Le 10 juin 2005 - 580 mots

À travers un parcours didactique et ludique, le château de Malbrouck en Lorraine explore le mythe du dragon, de l’Antiquité au XIXe siècle.

MANDEREN (Moselle) - Depuis la mi-avril, le château de Malbrouck à Manderen arbore des allures de Disneyland, avec son grand chapiteau pour accueillir les visiteurs, ses haut-parleurs diffusant la mélodie d’un film d’action et ses drapeaux flottants à l’effigie des « dragons », la nouvelle exposition organisée par le conseil général de Moselle. Pour le moins ambitieuse, celle-ci explore le mythe du dragon à travers les âges, depuis l’Égypte ancienne jusqu’au XIXe siècle, en passant par la légende du féroce Graoully ou les préceptes de la tradition chinoise. Au total, 200 pièces ont été réunies, objets archéologiques, orfèvreries, bijoux, costumes, peintures, sculptures et spécimens naturalisés prêtés par le Muséum national d’histoire naturelle (MNHN) de Paris, partenaire de la manifestation. Particulièrement ludique grâce à une scénographie inventive, le parcours occupe tout l’espace de ce château du XVe siècle situé au pays des Trois Frontières, à proximité du Luxembourg et de la Sarre (Allemagne). Le voyage commence dans la tour dite « de la Lanterne », qui évoque « L’histoire du dragon européen » à travers des pièces provenant du monde entier. Ainsi de cette Tête de dragon (VIIe-VIe siècle avant J.-C.) prêtée par le Musée du Louvre, représentant Marduk, dieu du Soleil qui, dans la mythologie babylonienne, vaincut le dragon du Chaos, ou encore cette réduction en bronze de la sculpture du Vatican figurant Laocoon et ses fils (XVIIIe siècle) menacés par deux serpents gigantesques. Impossible de ne pas évoquer ensuite l’aventure de Jason contre le dragon dans sa quête de la Toison d’or, ou les récits mystiques de saint Michel et saint Georges, illustrant la lutte du Bien contre le Mal… Des enluminures du XIVe siècle relatent, elles, La Vie de saint Clément, véritable légende locale, qui délivra Metz du sanguinaire Graoully.
Après un intermède cinématographique à l’auditorium, le visiteur rejoint la tour de la Sorcière où il découvre dans une ambiance tamisée des bijoux et objets décoratifs, notamment les somptueuses pièces de la collection Cartier. Le monstre offre aux créateurs une grande variété de formes et motifs : tracé ondulant, ligne se lovant sur elle-même, dessin de la voûte céleste…

Pour tous les publics
Changement de décor dans la tour du Rocher qui revêt les couleurs de l’Islam et de l’Asie. On y découvre le dragon chinois, à la fois Yin et Yang, gardien des eaux et cracheur de feu, réunissant les principes opposés de l’univers. Animal sacré, emblème des Fils du ciel, le dragon est représenté sur une robe impériale (XVIIe siècle) ou le sceau de l’empereur Quang Long (1800).
Enfin, la tour des Dames se penche sur les croyances occidentales autour de la plausible existence du dragon. Les reptiles, cadavres géants de dinosaures, de crocodiles ou d’ours ont nourri l’imaginaire des scientifiques et collectionneurs depuis le Moyen Âge. En témoigne ce dragon reconstitué (XVIIIe siècle) provenant d’un cabinet d’histoire naturelle, bel exemple de fabrication d’animal fabuleux réalisé à partir d’une raie ! Ou encore cet impressionnant squelette de ptérosaure (reptile volant) provenant d’une collection particulière, qui a dû enflammer les esprits avec ses ailes immenses rappelant l’image médiévale du monstre. Autant de visions délirantes et mystiques qui ne manquent pas d’éveiller l’imagination.

DRAGONS

Jusqu’au 31 octobre, château de Malbrouck, 57480 Manderen, tél. 03 82 82 42 92, www.château-malbrouck.com, tlj 10h-18h (19h le week-end) et 14h-18h le lundi. Catalogue, éditions Serpenoise, Metz, 314 p., 35 euros.

DRAGONS

- Nombre de pièces : 200 (beaux-arts, archéologie, ethnographie, bijouterie…) - Budget : 1,5 million d’euros - Surface d’exposition : 1 000 m2 - Commissariat général : Philippe Hoch (Moselle) et Zeev Gourarier (MNHN, Paris) - Commissariat exécutif : Patrick Absalon et Frédérik Canard - Scénographie : agence Philippe Kauffmann

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°217 du 10 juin 2005, avec le titre suivant : Les dragons des Trois Frontières

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