Rome, ville nouvelle

Le Journal des Arts

Le 8 juillet 2005 - 682 mots

La Ville Éternelle, longtemps réfractaire à la modernité, s’ouvre à l’architecture contemporaine. Renzo Piano, Odile Decq, Zaha Hadid, Massimiliano Fuksas ou Richard Meier y imposent leur marque.

Après avoir longtemps sommeillé sur les lauriers de son patrimoine historique, Rome s’éveille à la création et à l’architecture contemporaine. Au point que sa traditionnelle image de ville-musée pourrait s’en trouver définitivement dépoussiérée. Inauguré en 2002, l’Auditorium de Renzo Piano a joué à cet égard un rôle de précurseur. Dix ans et 150 millions d’euros ont été nécessaires pour mener à bien la construction de ce gigantesque Parco della Musica (4 400 places), décrié pour sa démesure. Mais, loin de rester désert, comme l’annonçaient ses détracteurs, l’Auditorium est aujourd’hui une institution motrice en matière culturelle – en 2004, les dépenses consacrées à la musique à Rome ont augmenté de 104 %. Un constat encourageant pour la Ville, qui table aujourd’hui sur la construction de deux grands musées d’art contemporain – le Musée national pour les arts du XXIe siècle ou « Maxxi », et son pendant communal, le « Macro » – pour créer une dynamique dans ce domaine. Le renom des architectes lauréats des concours (Odile Decq pour le Macro et Zaha Hadid pour le Maxxi) devrait y contribuer.
Occupant les espaces rénovés de l’ancienne brasserie Peroni (via Reggio Emilia), le Macro verra ses espaces tripler d’ici au début 2007 (15 000 m2 au lieu des 4 500 existants). Conçue par Odile Decq comme « un édifice clairement lisible, où le plaisir de se promener augmente celui de découvrir les œuvres », la nouvelle structure mise sur les espaces de détente, telle la terrasse-jardin panoramique aménagée sur plusieurs niveaux. Se voulant un musée ouvert sur la ville, grâce notamment à ses vastes verrières, le musée comprendra à terme de nouvelles salles d’exposition, une médiathèque, une librairie, un espace didactique et un restaurant (coût : 12 millions d’euros).
Le Maxxi prévoit pour sa part au nord de la ville (quartier Flaminio) 26 000 m2 dédiés aux arts actuels, jusqu’ici peu représentés dans les musées de la Péninsule. Une sorte de Centre Pompidou à l’italienne, que Zaha Hadid a imaginé comme un bâtiment sillonné de galeries qui s’entrecroisent et se superposent afin de permettre une multitude de parcours au visiteur. L’édifice principal (20 000 m2) et ses deux musées, l’un pour les arts visuels, l’autre pour l’architecture, devraient être achevés courant 2006. Mais dès à présent, certains s’interrogent : les collections, constituées d’œuvres du XXe (Manzoni, Warhol, Merz, Pistoletto…), d’artistes contemporains (Alessandro Pessoli, Christiano Pintaldi, Francis Alÿs, Kara Walker, William Kentridge…) et d’archives historiques pour l’architecture (Carlo Scarpa, Aldo Rossi…), seront-elles à la hauteur de leur spectaculaire et coûteux musée (60 millions d’euros) ? À l’heure où Venise s’apprête à accueillir la collection Pinault, le défi n’est pas mince.
Le projet ayant suscité le plus d’interrogations et de remous reste toutefois sans conteste l’écrin élaboré par Richard Meier pour l’Ara Pacis, monumental autel augustéen au cœur de Rome. La réputation de l’architecte américain (considéré comme peu soucieux du contexte environnemental), la nature pharaonique du projet et surtout sa rupture avec la physionomie du centre historique ont alimenté une violente polémique. Mais après cinq ans de travaux et de controverses, la cage d’acier, de travertin et de cristal créée pour abriter le monument devrait être partiellement ouverte en septembre.
Les prochains mois verront également la transformation des anciens mercati generali (grand marché couvert) en espace culturel et de loisirs par Rem Koolhaas, et le lancement très attendu – car longtemps retardé – du chantier de la Nuvola (le Nuage), le Centre des congrès imaginé par Massimiliano Fuksas dans le quartier de l’Eur (pour 200 millions d’euros !). Synthèse du style rationaliste des années 1930 et de la fantaisie baroque d’un Borromini, l’édifice se compose d’une bulle d’acier et de Téflon en forme de nuage, suspendue dans un parallélépipède en verre translucide. Une architecture à la fois poétique et futuriste qui, à l’instar des constructions imaginées par Renzo Piano, Zaha Hadid, Odile Decq ou Richard Meier, devrait contribuer à faire de Rome un nouveau centre de création contemporaine.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°219 du 8 juillet 2005, avec le titre suivant : Rome, ville nouvelle

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