Belgique

Le design lisse du plat pays

Par Christian Simenc · Le Journal des Arts

Le 18 novembre 2005 - 544 mots

Au Grand-Hornu, aucun objet ne dépasse
dans cette présentation qui privilégie... la couleur.

 HORNU - Le design belge existe-t-il ? L’exposition « Label-Design.be » que propose le musée Grand-Hornu Images, à Hornu (Belgique), y répond – évidemment – par l’affirmative, en montrant quelque 330 pièces conçues par 135 designers ou agences de design installés en Belgique. Le point commun de ces objets : ils ont été conçus entre 2000 et 2005 et sont déjà commercialisés, sinon en passe de l’être. On n’y trouvera donc aucun projet non édité, aussi original soit-il, ni de recherche purement prospective. Rien que du design en chair et en os donc : « produit » (appareils et accessoires électroménagers, textile, mobilier, luminaire, arts de la table, appareils médicaux…), « environnement » (éclairage public, mobilier urbain…), enfin « transports » (automobile, train, bus, avion…). Les objets sont présentés sur de grandes stalles couleur anthracite, plutôt élégantes. Les cartels, en revanche, franchement mal placés – au sol, dans le magasin aux foins, ou même derrière les objets, dans les écuries –, apparaissent difficilement lisibles.

Rangés par couleur
On peut voir, en vrac : une valise à roulette (Pilipili), un appareil d’analyse de diamants (Hugo Smid/Smidesign), une horloge de quai de gare (Stefan Schöning), la maquette du nouveau tramway de Bruxelles (Enthoven Associates Design Consultants), une Lamborghini Murcielago (Luc Donckerwolcke) en grandeur réelle, sans oublier un prototype de… Frietzak (Roel Vandebeek/Beek Design) ou « cornet de frites », en papier avec fourchette en bois intégrée. Normal, nous sommes, rappelons-le, dans une exposition qui met en avant la créativité belge.
Ne reste plus donc qu’à tenter de distinguer quelles sont les spécificités de cette créativité du plat pays ? C’est justement là tout le problème : impossible de cerner quelque particularisme propre au design belge. Tout semble, en effet, avoir été fait pour que rien ne dépasse. La scénographie participe amplement à ce jeu de nivellement. Les objets ont été disposés en fonction non d’un thème ou d’un dessein précis, mais simplement en fonction… de leur couleur : d’abord les pièces blanches, ensuite les jaunes, puis les orange, et ainsi de suite, les rouges, les brunes, les noires, les vertes, les bleues, les grises… « De cette manière, explique Françoise Foulon, directrice de Grand-Hornu Images, il n’y a aucun problème de statut entre les objets : ils ont tous le même statut. » S’agit-il là d’un parti pris crédible pour une exposition ou bien d’un non-choix par excellence ? À trop aplanir les angles, on ne dit plus rien.

Compromis
Si certains designers belges percent chez des éditeurs italiens (Xavier Lust chez De Padova, Vincent Van Duysen chez Cappellini…) et si les centres de design de grandes firmes étrangères implantées en Belgique (Samsonite, Tupperware…) puisent effectivement dans le vivier local, quid des particularismes « régionaux », si palpables dans d’autres domaines – on pense, notamment, au style singulier des couturiers anversois ? Certes, la Belgique, qui fête cette année ses 175 ans, veut se montrer une et indivisible. Mais fallait-il pour autant noyer ses trois entités – Bruxelles, la Flandre, la Wallonie – dans ce vaste compromis politiquement correct ?

Label-Design.be

Jusqu’au 16 février 2006, Grand-Hornu Images, 82, rue Saint-Louise, Hornu, Belgique. Tél. 32 (0) 65 65 21 21 ou www.grand-hornu.be, tlj sauf lundi 10h-18h.

Label-Design.be

- Commissaire de l’exposition : Lise Coirier - Scénographie : Winston Spriet - Nombre de designers représentés : 135 - Nombre de pièces : 330

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°225 du 18 novembre 2005, avec le titre suivant : Le design lisse du plat pays

Tous les articles dans Création

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque