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Une histoire des sciences arabes

Par Guillaume Morel · Le Journal des Arts

Le 16 décembre 2005 - 669 mots

Une exposition à l’IMA rappelle les découvertes dues à cette civilisation.

PARIS - Tout se joue entre le IXe et le Xe siècle. Les pays arabes connaissent alors un âge d’or, une prospérité qui sera marquée par des avancées scientifiques fondamentales. C’est à ces découvertes qu’est consacrée l’exposition « L’âge d’or des sciences arabes » à l’Institut du monde arabe (IMA), à Paris.

A priori, le sujet pourrait sembler ardu pour qui ne se passionne pas pour les mathématiques, l’astronomie ou la chimie. Très didactique, le parcours devrait pourtant séduire tous les publics, tant l’exposition peut se lire à plusieurs niveaux, et notamment au travers de la création artistique. Cartes, schémas, vidéos et reconstitutions permettent de se familiariser avec ces civilisations comme avec le contexte économique des différents pays concernés, de l’Espagne à l’Inde.

Au VIIe siècle, les Arabes arrivent sur un territoire qui possède son histoire, son patrimoine, un triple héritage grec, mésopotamien et indien. Les savants vont se nourrir de cette richesse pour faire progresser la connaissance par l’expérience.

L’exposition s’ouvre sur les mathématiques, un ensemble de manuscrits et d’ouvrages rappelant que cette discipline constitue le fondement de la plupart des sciences. Le visiteur entre ensuite dans le cœur du sujet avec l’astronomie et la présentation de pièces rares, tels un Traité des étoiles fixes (Al-Sufi, XIVe siècle) et une série d’astrolabes de différentes époques et provenances. Si l’objet est une invention grecque, l’astrolabe universel a été  mis au point par les Arabes au XIe siècle. En parallèle aux pièces relatives à l’astronomie, une parenthèse savoureuse évoque l’astrologie. « L’équipe scientifique était réticente, explique Aurélie Clemente-Ruiz – commissaire adjointe –, mais l’astrologie est très importante à l’époque, imbriquée avec l’astronomie. Au départ, l’astrologie se base sur des données scientifiques. Ce sont ensuite les interprétations qui l’ont fait dériver. »

Des globes célestes, une carte du monde musulman centrée sur La Mecque (Iran, XVIIe siècle, jamais exposée), montrent l’importance de la géographie, alors que les Arabes découvrent des territoires immenses. Les savants de tous les domaines partagent leurs connaissances, dans une émulation qui se joue des frontières entre les disciplines. Bagdad est le centre, mais le savoir se développe partout, la communauté de langue et la prospérité facilitant les échanges.

Une large partie de l’exposition est ensuite consacrée à l’homme et à son environnement, à travers la médecine – avec pour ouvrage de référence le Canon de la médecine, qui regroupe tout le savoir médical de l’époque – ; la chirurgie, illustrée par de saisissantes représentations anatomiques de Mansûr ibn Ilyâs, et la pharmacopée. Des découvertes importantes en matière d’optique, sur la perception par l’œil de la lumière, sont également dues aux Arabes.

Imbrication arts-science
Les chercheurs de l’époque visent en premier lieu la résolution des problèmes quotidiens de l’homme. Les théories naissent une fois cet objectif pratique atteint, et les avancées scientifiques peuvent alors s’appliquer à d’autres champs. Ainsi la mécanique : d’abord réservée au domaine militaire (canons, grenades…), elle pénètre la vie quotidienne avec la mise au point de procédés hydrauliques performants, avant de profiter au divertissement (des automates à la pointe de la technologie sont destinés au plaisir des convives des banquets).

Instructive et vivante, l’exposition  se referme sur l’imbrication des sciences et de l’art, dans l’architecture – avec la présentation de décors de palais régis par des lois mathématiques – ou la musique, que les Arabes seront les premiers à théoriser et à utiliser à des fins thérapeutiques. Viennent en toute fin la céramique, l’enluminure, la reliure, et la verrerie, rappelant l’importance du monde arabe dans le développement de cet art avant que Venise (le verre de Murano) n’inonde le marché mondial.

L’ÂGE D’OR DES SCIENCES ARABES

Jusqu’au 19 mars, Institut du monde arabe, 1, rue des Fossés-Saint-Bernard, place Mohammed-V, 75005 Paris, tél. 01 40 51 38 45, www.imarabe.org, tlj sauf lundi 10h-18h, samedi, dimanche et fêtes 10h-19h. Catalogue, coéd. Actes Sud, Arles/IMA, Paris, 326 p., 59 euros, ISBN 2-7427-5672-8. À lire : L’Épopée de la science arabe, Découvertes Gallimard, 128 p., 11,80 euros.

SCIENCES ARABES

- Commissaire général : Brahim Alaoui - Commissaires : Éric Delpont et Aurélie Clemente-Ruiz - Commissaires scientifiques : Jean Audouze et Ahmed Djebbar - Nombre d’œuvres : 200 - Nombre de sections : 3

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°227 du 16 décembre 2005, avec le titre suivant : Une histoire des sciences arabes

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