Salon

Sous le signe de Jupiter

Par Roxana Azimi · Le Journal des Arts

Le 6 janvier 2006 - 702 mots

La Foire des antiquaires de Belgique, qui se déroulera du 20 au 29 janvier, continue de se bonifier.

BRUXELLES - Il est des foires qui tâtonnent, changent invariablement de nom ou de fusil d’épaule. Il en est d’autres, comme celle des antiquaires de Belgique, à Bruxelles, qui ont su se mettre sur les rails sans excès de marketing. Fort de son installation depuis deux ans dans les bâtiments Tour & Taxis, le salon poursuit sa montée en puissance. En augmentant de 30 % sa surface d’exposition, l’événement compte trente-cinq nouveaux exposants, dont un bataillon de vingt français. De quoi tempérer le tropisme flamand critiqué l’an dernier et raffermir certains domaines. Le secteur des arts non occidentaux se renforce avec l’arrivée de la Galerie Mermoz et d’Oriental Bronze (Paris). Si les meubles liégeois constituent la marotte naturelle du salon, Anne-Marie Monin (Paris) et Philippe Perrin (Paris) enfoncent le clou du XVIIIe français. La manifestation ouvre aussi une petite brèche au XXe siècle, en recrutant notamment Claude Bernard et la Galerie Malaquais (Paris).

Expatriés fiscaux
Qu’est-ce qui attire tout ce beau monde à Bruxelles ? Les collectionneurs belges, pardi ! Mais aussi la diaspora des expatriés fiscaux français. Jérôme Le Blaye, de la Galerie du XXe siècle (Paris), affiche près de cinq clients français expatriés à Bruxelles et une petite dizaine d’acheteurs belges, actifs dans une gamme de 50 000 à 500 000 euros. « Les Belges représentent 20 % de notre clientèle, alors que la proportion des Français est en chute libre », observe Cédric Soihiez, de la Galerie scandinave (Paris). Après le succès rencontré l’an dernier sur le salon Antiquaires du XXe siècle organisé par Art Home dans la capitale belge, cette galerie porte l’accent sur Preben Fabricius et Jørgen Kastholm, designers danois des années 1950-1960. On trouve au menu une table basse en wengé et ardoise (entre 7 000 et 9 000 euros). Un choix d’autant plus circonstancié que, d’après Philippe Rapin, codirecteur de la Galerie Autegarden-Rapin (Bruxelles), la clientèle locale apprécie surtout les écoles nordiques et italiennes. « Bruxelles a la première communauté italienne en Europe hors Italie », remarque Philippe Rapin, lequel présente dans sa galerie, en parallèle de la foire, une exposition de Piero Fornasetti. Qui dit clientèle intéressante et intéressée n’entend pas pour autant commerce échevelé. « Pour une grande partie, les transactions ne dépassent pas les 80 000 euros », observe le marchand Jacques Leegenhoek (Paris), qui prévoit un paysage de Jan Franz Van Bloemen pour 60 000 euros.

Clientèle internationale
Outre le vivier de collectionneurs, l’arrivée en commando des marchands français tient parfois à une sourde amertume vis-à-vis de la foire Tefaf de Maastricht. Certains avancent même des arguments
astrologiques ! « Je ne fais plus Maastricht, qui rentre dans une phase saturnienne, c’est le début de la descente. Bruxelles entre, elle, dans une phase jupitérienne », affirme Santo Micali, de la Galerie Mermoz, qui n’a pas apprécié de voir son stand déplacé à trois reprises sur Tefaf (pour finalement jouxter un restaurant) l’an dernier. Son confrère Christian Deydier (Paris) observe pour sa part : « Voilà quinze ans, on n’a pas voulu de moi [à Maastricht]. Depuis que je suis président du Syndicat national des antiquaires [SNA], on m’invite, mais je refuse. Je n’ai rien à prouver ! » D’autres galeries s’insurgent contre le droit d’entrée exigé par les organisateurs de la foire néerlandaise. Une grogne qui laisse de marbre le marchand en arts primitifs Bernard de Grunne (Bruxelles). Bien que membre du conseil d’administration de la foire de Bruxelles, il a préféré passer son tour. Invoquant la publication de sa thèse de doctorat, mais aussi la proximité avec la foire néerlandaise, il précise : « Si je quitte Maastricht pour un an, je ne pourrai pas y retourner. » Il se priverait aussi d’une clientèle internationale encore rare dans les allées de la foire de Bruxelles.

FOIRE DES ANTIQUAIRES DE BRUXELLES

20-29 janvier, Tour & Taxis, avenue du Port, Bruxelles, www.antiques-fair.be, tlj 11h-19h (jusqu’à 22h30 le 26). - Nombre d’exposants : 125 - Nombre de visiteurs en 2005 : 30 000 - Prix des stands : 6 000 euros pour un stand vide de 120 m2 (la décoration est aux frais de l’exposant)

Passation de pouvoir

Après avoir dépoussiéré la manifestation au cours de ces deux dernières années, le marchand de tableaux anciens Jan De Maere (Bruxelles) a rendu son tablier de président du salon en mai, au profit de la marchande anversoise Grethe Zeberg. Une plainte pour détournement de fonds, déposée par un membre du conseil d’administration, puis finalement retirée, expliquerait ce départ inopiné. Derrière les reproches quant à une mauvaise gestion des comptes, d’autres invoquent une querelle de personnalités. « J’avais annoncé en janvier qu’il s’agirait de mon dernier mandat. J’avais déjà préconisé Mme Zeberg, qui est polyglotte et neutre. Elle a une rigueur et s’avère plus souple et diplomate que moi », observe Jan De Maere. Lequel ne participera pas non plus au salon comme exposant cette année.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°228 du 6 janvier 2006, avec le titre suivant : Sous le signe de Jupiter

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