Art contemporain

Feux d’artifice

Par Armelle Malvoisin · Le Journal des Arts

Le 6 janvier 2006 - 847 mots

Explosion généralisée des prix pour l’art contemporain, secteur qui s’impose
devant l’art moderne chez les principales maisons de ventes parisiennes.

 PARIS - Le marché international de l’art contemporain est fort, même très fort. La flambée des prix, de New York à Londres, entraîne le même effet sur la place parisienne, comme le prouvent les grandes ventes de la fin de l’année. Le secteur, leader à Paris chez les trois principales maisons, est
devenu le cheval de bataille d’Artcurial, de Christie’s et de Tajan. On constate que les collectionneurs internationaux sont de plus en plus nombreux à venir acheter en salles des ventes. « Nous avons comptabilisé cette année 19 % d’enchérisseurs américains, en plus d’amateurs russes et asiatiques », remarque Florence de Botton, directeur international du département chez Christie’s. Même constat chez Artcurial, où de nombreux collectionneurs européens se sont déplacés en personne pour enchérir. Un collectionneur français a emporté le lot le plus cher, Red Joy, une acrylique sur toile de 1984 de Jean-Michel Basquiat, adjugée dans sa fourchette d’estimation pour 733 870 euros, et une grande Composition de 1969 signée Lanskoy a été emporté par un Monégasque pour le montant record de 196 420 euros. Mais les plus beaux résultats portaient sur la centaine de lots de la collection Renard, vendue à 100 % pour 3,6 millions d’euros (plus de deux fois l’estimation). Les constructions animées de Jean Tinguely se sont envolées jusqu’à neuf fois l’estimation : Lame aux spirales (1986) a été emportée à 213 570 euros par Bruno Bischofberger, le marchand suisse de Jean Tinguely, qui a aussi acheté Week-end (1961), pour 207 850 euros, et Eos VIII (Eos XIII ou Mamma Mia) (1966), pour 184 980 euros. Un professionnel espagnol s’est battu pour deux terres chamottées d’Eduardo Chillida, parties pour 207 850 (un record) et 196 420 euros. Le marché espagnol s’est aussi excité pour des toiles de l’artiste castillan Antonio Saura, dont Rembrandt no 1/90 et Rembrandt no 2/90, de 1990, qui ont atteint respectivement 147 990 et 117 160 euros.

Raza, Hantaï et Szafran
Hors collection, La Terre, une huile sur toile de 1984 par Syed Haider Raza, un artiste indien quasi
inconnu de l’école de Paris, a été achetée chez Artcurial par une galerie américaine au prix record de 196 420 euros. Un record battu quelques jours plus tard chez Christie’s, où Village (1998), une autre de ses toiles, a atteint 303 200 euros (six fois les prévisions), après une bataille de dix-huit enchères téléphoniques. Pour cette vacation, Christie’s a enregistré une série de résultats exceptionnels : 560 800 euros déboursés par un Français pour la toile Mariale M.A.4 Rouge (1960) de Simon Hantaï (un record) ; 370 400 euros pour le Dédale (1975) de Vieira Da Silva, resté en Europe, et 325 600 euros pour un Troupeau de moutons (1968) du sculpteur François-Xavier Lalanne, au profit d’un collectionneur américain. Une galerie d’Amérique centrale a déboursé 292 000 euros pour l’Escalier (1995-1996) de Sam Szafran, un artiste dont la cote décolle – tendance confirmée par le record de 469 970 euros enregistré à Drouot (Calmels-Cohen) le 5 décembre pour un pastel sur papier.
« Le climat est euphorique et les professionnels ont du mal à suivre, avoue le marchand parisien Franck Prazan. Pour l’instant, il y a encore beaucoup de discernement sur les pièces vendues à prix fort, mais la frontière entre les prix pour le très bien et le bien devient fébrile. » Chez Tajan, malgré un taux plus important de lots ravalés, les amateurs ont suivi pour les grosses pièces. Le Quintette
Mozart (1963) d’Arman s’est arraché à 425 000 euros (quatre fois l’estimation), pour aller rejoindre la collection de Bruno Bischofberger, et une belle composition, Rose (1951-1952), de Poliakoff a été vendue 380 000 euros à un marchand anglais pour le marché russe. « Il y avait trop de choses en même temps sur le marché, et c’est la dernière fois que je vends dans le tourbillon de toutes ces ventes, confie Julie Ceccaldi, la spécialiste de la maison Tajan. Les acheteurs sont là – nous avons eu beaucoup d’after sale le lendemain et les jours qui ont suivi la vente –, mais ils ne peuvent pas tout suivre. » Décaler ses ventes de prestige à mars et octobre plutôt que de risquer de perdre la mise dans la cohue de la haute saison, en juin et décembre, est déjà la stratégie retenue par la SVV Cornette de Saint Cyr. Cette dernière proposait le 12 décembre une petite vente qui a récompensé le Mao, Chine vermillon #5 (2001) de Yan Pei Ming, remporté par un acheteur chinois pour 189 540 euros !

Artcurial - Résultat : 7,1 millions d’euros - Spécialiste : Martin Guesnet - Lots vendus : 82 % - En valeur : 92 % Tajan - Résultat : 4,1 millions d’euros - Spécialiste : Julie Ceccaldi - Lots vendus : 53 % - En valeur : 70 % Christie’s - Résultat : 5,5 millions d’euros - Spécialistes : Florence de Botton et Laetitia Bauduin - Lots vendus : 85 % - En valeur : 93 %

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°228 du 6 janvier 2006, avec le titre suivant : Feux d’artifice

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