Estampes

Dans l’intimité de l’étoile polaire

Par Daphné Bétard · Le Journal des Arts

Le 6 janvier 2006 - 563 mots

L’ouvrage paru chez Phaidon retrace la vie et la carrière de Hokusai.

L’un des artiste japonais les plus célèbres, grand théoricien, Katsushika Hokusai (Edo, 1760-1849) a réalisé des milliers de peintures, dessins, estampes, livres illustrés et manuels didactiques destinées aux peintres et artisans. Si ses premières œuvres s’inscrivent dans la tradition de l’ukiyo-e (« images du monde flottant »), propre à la période d’Edo (1615-1868), il a vite su développer un style unique, dans une quête absolue de perfection et selon des préceptes humanistes. Professeur d’art extrême-oriental à l’université Ca’ Foscari de Venise et directeur du centre international de recherche sur Hokusai à Milan, Gian Carlo Calza – qui prépare également le catalogue raisonné du maître japonais – retrace la vie et la carrière de l’auteur des Trente-Six Vues du mont Fuji (vers 1830). Très documenté et largement illustré (près de sept cents reproductions), l’ouvrage se divise en six chapitres abordant chacun une période de la vie d’Hokusai à travers ses œuvres les plus représentatives.
À ses débuts (1779-1795), lors de la période dite Shunrô (ce nom lui fut donné par son maître), Hokusai illustre essentiellement des romans populaires et réalise des estampes pour le théâtre. En 1795, reprenant le célèbre atelier de peinture Tawaraya, il signe ses œuvres du nom de « Sori II », en hommage au dernier maître de l’école. Il adopte un style raffiné et immortalise des paysages japonais qui feront sa renommée. L’année 1798 marque un tournant dans sa carrière : il prend le nom de Hokusai, qui signifie « atelier de l’étoile polaire », et apporte un grand soin à l’expression psychologique de ses figures. Durant la période dite Taito (après 1810), il rédige de nombreux manuels, notamment le Manuel illustré des couleurs, en 1848, et transmet son art à ses nombreux élèves. Témoins de la société et des coutumes japonaises, ses lutteurs, guerriers, personnages grotesques ou comiques, fleurs, oiseaux et paysages sont traités avec minutie. Ainsi du Tigre et bambous à la pleine lune (1816) ou de Tametomo sur l’île des démons (1827).

Art érotique
À l’âge de 60 ans, il se consacre surtout au paysage et à la nature, accomplissant des chefs-d’œuvre par dizaine, notamment sa célébrissime Grande Vague, extraite des Trente-Six Vues du mont Fuji. Chaque estampe ou peinture ici reproduite est accompagnée d’un texte explicatif sur les techniques utilisées, le style adopté, la composition et le choix des couleurs. L’auteur, Gian Carlo Calza, s’est entouré de sept spécialistes, qui révèlent chacun les fruits de leurs recherches récentes sur l’artiste. Parmi eux, Matthi Forrer, conservateur du département japonais du Musée national d’ethnologie de Leyde (Pays-Bas), analyse l’influence qu’a eue Hokusai sur les artistes occidentaux. L’essai de
Richard Lane, auteur indépendant (décédé en 2004 à Kyoto), s’intéresse pour sa part à l’art érotique d’Hokusai. Quant à Tsuji Nobuo, président de l’Université des beaux-arts de Tama, à Tokyo, il décrypte les dernières productions de l’artiste. L’ensemble est complété d’un glossaire et d’une abondante
bibliographie. Ce volume est le premier ouvrage paru en français à présenter autant d’estampes, peinture et dessins de ce maître, dont l’influence dépassa très largement les frontières japonaises. « Hokusai n’est pas simplement un artiste du Monde flottant parmi d’autres, déclarait ainsi Edgar Degas. Il est une île, un continent, le monde entier à lui seul. »

Gian Carlo Calza (sous la direction de), Hokusai, éditions Phaidon, 2005, 520 p., 95 euros, ISBN 0-71489-474-5

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°228 du 6 janvier 2006, avec le titre suivant : Dans l’intimité de l’étoile polaire

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