Entretien

Michel Draguet, directeur des Musées royaux des beaux-arts de Belgique

« Jouer un rôle européen de premier plan »

Par Martin Bailey · Le Journal des Arts

Le 6 janvier 2006 - 736 mots

BRUXELLES - Les Musées royaux des beaux-arts de Belgique sont une « Belle au bois dormant » dotée de collections admirables, malheureusement exposées dans des lieux inadaptés. Tel est le jugement de Michel Draguet, nommé à leur direction générale en mai 2005, et qui a la difficile tâche de les moderniser. Il s’apprête d’ailleurs à révolutionner leur organisation et leur fonctionnement. L’édifice, qui a gardé pour l’essentiel l’ambiance institutionnelle des années 1950, possède un fort potentiel, la plus remarquable collection au monde d’art flamand et une situation idéale au cœur de la capitale de l’Europe. Professeur à l’Université libre de Bruxelles, Michel Draguet était à certains égards un outsider pour ce poste. Ancien correspondant en Belgique pour le Journal des Arts, il a été commissaire d’exposition, mais il n’est pas issu du monde des musées. Il nous expose ses projets.

Quelles dispositions allez-vous prendre pour revitaliser les Musées royaux ?
Avant tout, il y aura un nouveau Musée Magritte. Notre musée possède le plus grand ensemble au monde d’œuvres de Magritte, plus de cinquante tableaux et de cent œuvres sur papier, dont n’est exposée qu’une faible partie. Il s’agit du plus célèbre artiste belge du XXe siècle, et il attirera des visiteurs. Grâce à ce public supplémentaire, nous pourrons trouver l’argent pour commencer à transformer le reste du musée.

Mais Bruxelles n’a-t-elle pas déjà un Musée Magritte, rue Esseghem ?
Ce musée de la rue Esseghem est l’ancienne maison de Magritte, préservée par des initiatives privées, et qui n’a pas de collection de tableaux. Notre musée sera installé dans l’aile Altenloh des Musées royaux, qui abritait jusqu’à ces derniers temps la collection du XIXe siècle et qui accueille aujourd’hui notre exposition « Panamarenko », visible jusqu’au 26 janvier. Le Musée Magritte, qui ouvrira au public en avril, sera intégré aux Musées royaux, mais nécessitera un ticket d’entrée distinct. Nous développons aussi une gamme exclusive de produits dérivés, en partenariat avec la Fondation Magritte, que dirige Charly Herscovici, et nous négocions un projet de mécénat avec le groupe Suez de Paris.

Qu’adviendra-t-il alors de votre collection d’œuvres du XIXe siècle ?
Les peintures du XIXe déménageront vers l’aile construite en 1984, qui abrite actuellement les œuvres du XXe siècle, sur trois niveaux. La question est alors de ce qui adviendra du XXe siècle ! J’ai été fortement influencé par Nicholas Serota, qui, avant la Tate Modern, a insisté sur l’importance d’un lieu nouveau à trouver pour l’art du XXe siècle. Nous avons pour projet d’investir un autre édifice, rue de l’Écuyer, au centre de Bruxelles, qui appartient à la municipalité (actuellement le Centre d’art Dexia, que finance la banque Dexia). Il devrait ouvrir avec notre collection d’art du XXe siècle en 2007, pourvu que nous obtenions les autorisations voulues.

Que prévoyez-vous pour la peinture ancienne ?
Le département a un éclairage très brutal, et nous devons améliorer les salles d’exposition. Nous avons aussi à repenser la présentation. Nous avons obtenu trois millions d’euros d’une banque belge pour améliorer les salles Bruegel dans l’aile inaugurée en 1974, mais nous avons besoin de fonds supplémentaires.

Que projetez-vous pour les expositions temporaires ?
Nous allons changer notre approche pour les expositions. Je m’occupe actuellement de
reconstituer nos contacts internationaux, aujourd’hui plus ou moins rompus. Nous devons être les ambassadeurs de l’art belge. Bruxelles étant le carrefour de l’Europe, nous avons aussi à jouer un rôle européen de premier plan.

Avez-vous déclenché une sorte de révolution aux Musées royaux ?
Je ne le formulerai pas en ces termes. Je veux seulement le remettre en phase avec le monde des musées.

L'un des plus anciens musées d'Europe

Les Musées royaux des beaux-arts de Belgique ont été fondés en 1801 par le premier consul Bonaparte, ce qui en fait l’un des plus anciens musées d’Europe. L’institution a ouvert ses portes en 1803. Situés à dix minutes de marche de la Grand-Place de Bruxelles, les Musées royaux sont complétés par deux musées adjacents, le Musée d’art ancien (jusqu’à 1800) et le Musée d’art moderne. Ses collections comprennent 5 700 peintures, 12 600 dessins et 2 100 sculptures. Si la culture est en Belgique du ressort des gouvernements flamand et wallon, les Musées royaux sont l’une des rares institutions que finance le gouvernement fédéral. Son budget est d’environ 7 millions d’euros par an, dont la moitié vient du gouvernement et l’autre des activités du musée. L’an dernier, les Musées royaux ont acueilli 487 000 visiteurs.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°228 du 6 janvier 2006, avec le titre suivant : Michel Draguet, directeur des Musées royaux des beaux-arts de Belgique

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