Art contemporain

ART CONTEMPORAIN

Dora Garcia dans les cercles de la pensée

Par Magali Lesauvage · Le Journal des Arts

Le 15 novembre 2017 - 426 mots

BRUXELLES / BELGIQUE

Invitée à La Verrière-Fondation d’entreprise Hermès, l’artiste espagnole présente une installation questionnant le rapport entre les hommes et la connaissance.

Bruxelles. C’est, sur l’un des boulevards les plus chics de la capitale belge, une boutique Hermès comme il en existe des dizaines, avec ses foulards bien pliés et son personnel impeccable qui vous accueille le plus chaleureusement du monde. On la traverse l’œil distrait par mille choses enviables pour aboutir à une vaste pièce carrée surmontée d’une délicate verrière, sorte d’appendice immaculé. Changement d’ambiance. Sur le sol nu marqué d’un large disque, deux jeunes filles se toisent, changeant de position à intervalle régulier mais conservant une distance égale, comme des planètes et leur force magnétique. À proximité, une autre est assise à une table et prend des notes en regardant une archive télévisuelle noir et blanc à l’image tremblante, où apparaît en gros plan un vieil homme, écrivain hispanophone, interviewé. Dans un coin, une dernière lit un livre, une caméra de surveillance braquée sur elle – à l’autre extrémité de la pièce un écran de contrôle diffuse l’image enregistrée, qui vient s’ajouter à celles stockées dans des cartes à puce. Aux murs, de vastes diagrammes philosophiques départagent conscient et inconscient, connu et inconnu, mondes intérieur et extérieur. Les performeurs, étudiants à l’Académie royale des beaux-arts de Bruxelles, sont présents durant quatre heures d’affilée maximum. « C’est un travail comme un autre », annonce Dora García, qui précise que les consignes données sont minimales, et qu’une grande liberté est laissée à chacun. L’ambiance est studieuse et concentrée, et le visiteur se fait aussi discret que sur n’importe quel lieu de travail.
 

Mise en mouvement

Ainsi, dans une discontinuité frappante se succèdent deux espaces d’économies distinctes, l’un dévolu à la consommation et à l’apparence, le second à la production de la pensée et à son mouvement en cercles clos.

L’artiste espagnole Dora García a répondu intellligemment à l’invitation du commissaire Guillaume Désanges, qui, depuis 2016, sous l’intitulé « Poésie balistique », programme à La Verrière des expositions liant art et langage. Sa proposition sans concession découle de sa recherche performative sur la relation des individus à la connaissance, à la littérature et au travail. L’artiste reprend ici le principe, vu au printemps dernier dans son exposition à la galerie Michel Rein, à Paris, d’une mise en forme plastique de la pensée. Devenue autonome, celle-ci n’a même plus besoin de spectateur, n’existant que pour elle-même, en circuit fermé.

Dora Garcia devrait bénéficier d’une exposition monographique au Musée Reina-Sofía à Madrid l’an prochain pour une nouvelle mise en mouvement de la pensée.

 

 

Dora GarcÁ­a, Somewhere, Two Planets Have Been Colliding For Thousands of Years (The Thinker as Poet),
jusqu’au 9 décembre, La Verrière, 50 boulevard de Waterloo, Bruxelles.

 

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°489 du 17 novembre 2017, avec le titre suivant : Dora GarcÁ­a dans les cercles de la pensée

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