Galerie

ART CONTEMPORAIN

Polke sur papier

Par Henri-François Debailleux · Le Journal des Arts

Le 31 octobre 2017 - 515 mots

PARIS

Entre figuration et abstraction, l’artiste allemand revient chez Suzanne Tarasieve avec ses expérimentations sur papier.

Paris. Barbizon, en l’an 2000 : Suzanne Tarasieve, qui a ouvert là sa première galerie vingt-deux ans avant, vend à sa grande surprise un beau tableau de Sigmar Polke (1941-2010). Une prouesse en effet, surtout à l’époque et dans une commune touristique plus tournée vers ses pré-impressionnistes. Elle se dit qu’un jour, elle lui organisera une exposition. C’est désormais chose faite. Entre-temps la sémillante galeriste s’est penchée sur les artistes allemands de cette génération et connaît bien leur grand marchand, Michael Werner. Que ce soit à Barbizon ou à Paris, elle a déjà montré Georg Baselitz, Jorg Immendorff, et plusieurs fois Markus Lüpertz et A. R. Penck.

Un événement en galerie
Même si ne sont présentées que des œuvres sur papier (et des photos de Benjamin Katz), l’ensemble fait figure d’événement : cela faisait presque trente ans que l’artiste n’avait pas eu d’exposition personnelle dans une galerie parisienne, la dernière remontant à 1989 chez Chantal Crousel. Il rappelle aussi la disparité typique de Polke, qui s’explique d’abord ici par les dates de tous ces papiers (de 1960 à 1990), puis par le fait que si son œuvre a des thématiques constantes (un engagement politique, une réflexion sur l’alchimie…), sa caractéristique première, tel un ADN, réside dans sa grande diversité formelle, née de la volonté de l’artiste d’avoir basé sa démarche sur une totale liberté, sur la recherche aussi bien des supports, que des techniques, des matières, des surfaces, des transparences et surtout sur la question de ce qui fait image lorsque la figuration joue à cache-cache avec l’abstraction.

Lorsque nous évoquions avec lui cet aspect (l’été 1994, à l’occasion de sa rétrospective au Carré d’Art à Nîmes), il renvoyait dos à dos les deux termes de ce qui semblait être pour lui une fausse problématique : « Il n’y a pas de différence entre abstraction et figuration : utiliser telle ou telle forme dépend de ce que l’on veut dire. La forme doit être adaptée au propos. En ce sens la figure est très importante quand elle est support d’idées et non, comme c’est le plus souvent le cas, lorsqu’elle n’est qu’un symbole. » De même lorsque nous abordions la façon dont ses matières et ses images se télescopent, se juxtaposent et se superposent constamment comme un collage, il répondait : « Mais toute la vie est un collage ! » Avec comme constante, dans ses peintures comme dans ses papiers, un penchant pour l’humour, un goût du rébus et une belle façon de travailler la transparence, dont il disait qu’elle était une alternative à la perspective.

Compris entre 15 000 et 550 000 euros, les prix sont certes élevés. Mais ils ne sont pas non plus exorbitants comparés au million d’euros légèrement dépassé par un papier en juin 2017 chez Philips à Londres. Et puis Polke, Lion d’or de la Biennale de Venise en 1986, reste l’une des figures majeures de cette génération d’artistes allemands.

 

Sigmar Polke,
jusqu’au 30 décembre, Suzanne Tarasieve, 7, rue Pastourelle, 75003 Paris.

 

Légende photo

Sigmar Polke, Patentamt/Patient office, vers 1982-1984, technique mixte sur papier, 100 x 70 cm. © The Estate of Sigmar Polke, Cologne, courtesy Galerie Suzanne Tarasieve, Paris.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°488 du 3 novembre 2017, avec le titre suivant : Polke sur papier

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