Arles

Van Gogh et ses maîtres

Par Élisabeth Santacreu · Le Journal des Arts

Le 5 juillet 2016 - 443 mots

La Fondation Vincent Van Gogh d’Arles inscrit avec conviction la modernité de l’artiste dans l’héritage des «Â peintres paysans ».

Avec les trente huiles sur toile (plus une sur carton) montrées à Arles, soit plus de tableaux que n'en présente le Musée d’Orsay, Van Gogh (1853-1890) est de retour en Provence. Mais le fil directeur de l’exposition de la Fondation Vincent Van Gogh tient non dans son titre mais dans son sous-titre : « la tradition modernisée ». Issues des musées Van-Gogh à Amsterdam et Kröller-Müller à Otterlo, aux Pays-Bas, les œuvres sont classées en trois groupes : les figures, la nature morte et le paysage. À travers elles, le visiteur parcourt la carrière de Van Gogh à la lumière de sa fidélité aux maîtres qu’il s’était donnés.

Passionné par les écoles de La Haye et de Barbizon
Dans le catalogue de l’exposition, Sjraar van Heugten, son commissaire, rappelle que le peintre, à ses débuts, « n’était pas familier de l’avant-garde artistique de son époque ». Il était en revanche passionné, stylistiquement et intellectuellement, par les artistes des écoles de La Haye et de Barbizon, que l’historien de l’art appelle les « peintres paysans ». Son ambition était de rendre au mieux la figure qui, pour lui, s’assimilait toujours à un type humain remplissant un rôle social. En rapprochant le carcéral Métier avec tisserand (1884) du solaire Botteleur (1889) d’après Jean-François Millet, Sjraar van Heugten indique que le propos n’a pas dévié. L’artiste engagé montre toujours le travailleur se battant pour sa survie. Le peintre, lui, est passé du suivisme à l’ultra-modernité. La démonstration est convaincante, bien qu’il puisse être gênant de suivre ce cheminement dans un parcours thématique et non chronologique. Attiré par la « lumière d’or fin » qu’aimait Van Gogh à la fin de sa vie (sublime dans Saules têtards au soleil couchant), le visiteur peut être tenté de délaisser les tableaux sombres au profit de leurs voisins si lumineux. Or, c’est par les œuvres quasi monochromes du début que peut se comprendre l’importance de la couleur pour le peintre. Van Gogh l’a largement évoquée dans ses écrits et la tradition qu’il a le plus suivie, plein d’admiration pour Delacroix et Rembrandt, est sans doute celle du colorisme.

Glenn Brown en contrepoint
Présentée à l’étage supérieur, l’exposition « Glenn Brown » joue sa partition en contrepoint. La palette utilisée par Van Gogh pour réaliser le Portrait d’Amand Roulin semble avoir explosé pour donner chez Brown la sculpture The Hokey Cokey tandis que le Crâne de squelette fumant une cigarette se couvre de chair décomposée pour Suffer Well, qui donne son titre à l’exposition. Une déliquescence joyeuse préside à l’hommage rendu par l’Anglais au Hollandais, comme un passage de témoin plein d’humour du modernisme au postmodernisme.

Van Gogh en Provence : La tradition modernisée ; Glenn Brown : Suffer Well

Jusqu’au 11 septembre, Fondation Vincent Van Gogh, 35 ter, rue du Docteur-Fanton, 13200 Arles, tlj 11h-19h, le jeudi jusqu’à 21h, entrée 9 €. Catalogues, Van Gogh en Provence, coéd. Fondation/Actes Sud, 144 p., 30 € ; Glenn Brown, coéd. Fondation/Analogues, 26 €.

Légende Photo :
Vincent van Gogh, Le Botteleur (d’après Millet), 1889, huile sur toile, 44,5 cm x 33,1 cm, Van Gogh Museum, Amsterdam. © Vincent van Gogh Foundation.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°461 du 8 juillet 2016, avec le titre suivant : Van Gogh et ses maîtres

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