Musée

Bateau ivre

Nouveau départ pour le Musée Rimbaud

Par Nathalie Diot · Le Journal des Arts

Le 21 juin 2016 - 741 mots

CHARLEVILLE-MÉZIÈRES

Huit mois après le démarrage houleux du nouveau Musée Rimbaud de Charleville-Mézières, la nouvelle directrice, Lucille Pennel, monte sur le pont.

Le musée Arthur Rimbaud, Charleville-Mézières ©  Photo Fondation du Patrimoine
Le musée Arthur Rimbaud, Charleville-Mézières
© Fondation du Patrimoine

CHARLEVILLE-MÉZIÈRES - Une affiche mal encollée, des vitrines trop hautes, une signalétique encore timide, parfois inexistante… Ces détails n’échappent pas à cette jeune femme blonde à l’œil critique qui arpente le Musée Rimbaud de Charleville-Mézières (Ardennes), une visiteuse pas comme les autres. Lucille Pennel est la nouvelle directrice des lieux. Quelques jours avant sa prise de fonction officielle le 1er juin, elle chemine pièce par pièce et s’approprie doucement l’espace en répondant à nos questions.

À 29 ans, cette attachée de conservation spécialisée en archéologie lectrice de Hugo et Zola, prend son premier poste de direction. Pour être jeune, elle n’en est pas moins expérimentée, « notamment en matière de polémique », estime-t-elle. Et ça tombe bien, car depuis son ouverture le Musée Rimbaud n’a pas eu que des éloges. Une inauguration et des visites estivales en plein chantier, le départ du conservateur historique Alain Tourneux, quinze jours avant l’ouverture, une fausse note dénoncée par les Rimbaldiens et professionnels de la culture, une ouverture le 20 octobre 2015 dans la poussière et sans chauffage et une scénographie conceptuelle controversée… Après deux ans et 4,7 millions de travaux, le nouveau Musée Rimbaud avait reçu un accueil mitigé, notamment localement.

Depuis, la muséographie a légèrement évolué : des tablettes interactives (ou pas) ont été installées ; l’accrochage se veut plus pédagogique ; la signalétique des œuvres apparaît sur des feuilles détachables à l’entrée de chaque pièce (ou presque). Le sentiment général des visiteurs s’améliore d’après le livre d’or. Et la fréquentation est plutôt bonne comparée à l’ancien musée, désuet, que certains regrettent pourtant encore (2 721 visiteurs pour toute l’année 2014 et 5560 en moins de six mois depuis la réouverture le 20 octobre 2015). Le quotidien britannique le Guardian a même classé le musée parmi les « dix meilleurs nouveaux musées ». Mais des mécontents continuent de se faire entendre.

« Rimbaud peut faire très peur »
« On apprend parfois plus de ceux qui sont totalement contre », réagit Lucille Pennel. Durant cinq ans, affectée au récolement des collections et à la médiation avec le public, elle a accompagné la complète rénovation du Musée d’histoire urbaine et sociale (MUS) de Suresnes, puis son lancement. Une situation parallèle au nouveau Musée Rimbaud qui a drainé de la même façon son lot de mécontents, la nouvelle scénographie n’ayant pas convaincu tout le monde. C’est que la muséographie des architectes se heurte parfois au bon sens. Et la directrice de pointer des tiroirs sans poignées voulus par les architectes pour mieux se fondre dans la scénographie. Esthétiques certes, mais personne ne pensait ou n’osait les ouvrir pour voir ce qui y est exposé.

Des ajustements Lucille Pennel est donc prête à en faire… Avec prudence : « On peut améliorer l’existant, notamment en matière de signalétique mais il faut prendre le musée comme il est et ne pas changer l’ambiance qui a été voulue (…) On ne peut pas plaire à tout le monde. » Son principal défi est pourtant de « populariser le musée » et dépasser l’effet de nouveauté. La nécessité de renouveler les œuvres tous les trois à quatre mois pour des raisons de conservation devrait l’y aider, mais la directrice comme la municipalité souhaitent attirer un nouveau public. « Rimbaud peut faire très peur. Il est iconique. La poésie effraie aussi, mais on peut en parler autrement. Avec les portraits par exemple, ou à l’aide du poème Voyelles. Tous les enfants le comprennent. Il faut faire passer les a priori. » Parmi ses pistes de réflexion, la jeune directrice souhaite associer la musique, la vidéo, les installations multimédias, créer un parcours pour enfant et des visites guidées pour tous, mettre en place le dispositif « La classe, l’œuvre ! ». « Il nous faut trouver un juste milieu, faire un musée pour les Rimbaldiens, tout en étant accessible aux autres. Il faut proposer différents niveaux de lecture. »

Elle se fixe deux échéances à court terme : la rentrée scolaire et la Journée du patrimoine. En plus du Musée Rimbaud, Lucille Pennel dirige la Maison des Ailleurs, où a vécu la famille Rimbaud, ainsi que le Festival les Ailleurs poétiques. Le Musée de l’Ardenne revient à Carole Marquet-Morelle, qui avait assuré l’intérim jusque-là, obligeant les deux directrices à « travailler en complémentarité » avec une équipe de quinze personnes.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°460 du 24 juin 2016, avec le titre suivant : Nouveau départ pour le Musée Rimbaud

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