New Deal, Art Brussels se réinvente

Par Frédéric Bonnet · Le Journal des Arts

Le 27 avril 2016 - 694 mots

Recentré et plus cohérent, dans ses nouveaux espaces le salon belge semble prendre un nouveau départ plein de promesses. Une 34e édition marquée par les attentats.

BRUXELLES - Les lieux ne font pas tout, mais ils contribuent parfois largement au succès d’une manifestation. Vieillissante, trop grande et confuse dans son organisation, la foire Art Brussels semble avoir décidé de se donner un coup de jeune à l’occasion de sa 34e édition, qui s’est tenue du 22 au 24 avril ; elle en est apparue métamorphosée.

Les lieux d’abord donc. En quittant les locaux excentrés du Parc des expositions du Heysel, le salon s’est installé dans les anciens entrepôts douaniers de Tour & Taxis, beaucoup plus proches du centre-ville et qui accueillent notamment la prestigieuse Brafa. Surtout, étant d’une superficie plus réduite, ces nouveaux locaux ont obligé les organisateurs à resserrer drastiquement le nombre d’exposants, passé de 191 à 140 : presque une purge, mais une purge salutaire qui a donné à la foire une plus grande cohésion et une bien meilleure lisibilité. Baigné de lumière naturelle, l’unique hall dévolu à la manifestation a été  aménagé avec un plan clair, sans  moquette au sol et de larges allées, rendant la visite très confortable.

Une sélection renouvelée, des présentations soignées
Judicieusement située dès l’entrée du salon, la section « Discovery » dévolue aux plus jeunes enseignes avait, à l’image de l’ensemble de la foire, globalement donné lieu à une sélection précise avec des galeries aux propositions pertinentes telles KOW (Berlin), The Sunday Painter (Londres), Document Art (Buenos Aires) ou Alma (Riga).

Une trentaine de nouveaux exposants ont cette année rejoint la manifestation, parmi lesquels Tina Kim (New York), Peter Kilchmann (Zürich), Timothy Taylor (Londres) ou Marc Straus (New York) qui exposait notamment Hermann Nitsch et confiait propos de sa participation : « Il s’agit de notre première foire en Europe. Les foires ne sont pas des endroits idéaux pour montrer de l’art, mais servent plutôt à faire des contacts, or Bruxelles est plus petite et plus accueillante que Paris ou Londres, où il y a énormément à voir, ce qui fait qu’il est ici plus facile d’attirer l’attention. » Les galeries ont pour beaucoup contribué à l’amélioration générale avec une majorité de stands aux présentations soignées et pas trop chargées. De même qu’une belle diversité était à l’œuvre entre par exemple l’accrochage très réussi autour de la couleur verte concocté par Sorry We’re Closed (Bruxelles), l’ensemble d’œuvres de Pier Paolo Calzolari chez Ronchini (Londres) et la solidité de la proposition d’André Simoens (Knokke) laissant alterner Kounellis, Sugimoto ou Richard Nonas. Seule réserve dans cette nouvelle organisation, la création d’une nouvelle section intitulée « Rediscovery » ayant pour vocation de redonner de la visibilité à des artistes historiques disparus des radars, ce qui est désormais devenu un « gimmick » de l’époque dans toutes les foires d’art contemporain. Il était néanmoins possible d’y voir quelques belles surprises, comme les présentations de Bob Law par Richard Saltoun (Londres) ou Jules Olitisky par Daniel Templon (Paris, Bruxelles).

Après les attentats
Au-delà d’Art Brussels, c’est une belle dynamique qui s’est emparée de la ville elle-même, avec l’arrivée du salon new-yorkais Independent, mais aussi la présence de salons satellites plus jeunes comme YIA ou le désordonné mais néanmoins rafraîchissant Poppositions, qui avait pris ses quartiers dans le secteur désormais tristement célèbre de Molenbeek. Car un mois après les attentats ayant frappé la ville, l’atmosphère y était encore pesante, avec des rues tristes et des musées déserts, dont certains n’ont rien trouvé de mieux à faire que de jouer une ridicule surenchère sécuritaire, à l’instar de Bozar qui interdit désormais l’accès de ses expositions (mais pas des espaces communs, où nul contrôle n’est exercé) aux visiteurs vêtus d’un manteau !

Conséquence de ce contexte, l’atmosphère du salon s’est cantonnée à un entre-soi belgo-français, avec quelques incursions allemandes ou néerlandaises fort limitées. Ce qui amène à penser que tant la multiplication sans fin des salons, que l’impossibilité ou le manque de volonté des collectionneurs de voyager partout tout le temps, conduira probablement à un nouvel équilibre entre très gros salons globaux et foires plus régionales, dont le public sera probablement de plus en plus local.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°456 du 29 avril 2016, avec le titre suivant : New Deal, Art Brussels se réinvente

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