Mémorial

Centenaire - Un nouveau Mémorial à Verdun

Par Margot Boutges · Le Journal des Arts

Le 1 mars 2016 - 621 mots

VERDUN

Le lieu de mémoire a réussi sa modernisation avec un parcours immersif, qui reconstitue avec force la férocité d’une bataille qui fit 300 000 victimes.

Le Mémorial de Verdun. © Photo : Jean-Marie Mangeot.
Le Mémorial de Verdun.
© Photo Jean-Marie Mangeot.

FLEURY-DEVANT-DOUAUMONT - Construit en 1967 à l’emplacement de la gare de Fleury-devant-Douaumont (village détruit et jamais reconstruit pour préserver les stigmates de la Première Guerre mondiale), le mémorial de Verdun avait été voulu par les anciens combattants français pour commémorer la bataille de Verdun, qui a décimé plus de 300 000 soldats de février à décembre 1916. « Au fil du temps, les anciens poilus et leurs familles ont laissé leurs affaires, leurs souvenirs, qui ont été mis sous vitrine », explique Natacha Glaudel-Grosbois, chargée des collections. « Un parcours de visite a été mis en place dans les années 2000, mais il n’était plus adapté », précise-t-elle. Vieillot, désorganisé, encore trop franco-français, pas assez pédagogique pour les nouvelles générations n’ayant jamais connu de témoins de la grande guerre, le lieu essuyait les critiques et souffrait de la comparaison avec des structures plus modernes, telles le Musée de la Grande Guerre de Meaux sorti de terre en 2011. Le mémorial – géré par le Comité national du souvenir de Verdun (CNSV) – a fermé en 2013, sous les grognements de visiteurs regrettant que ce lieu emblématique jouxtant les champs de bataille ferme pendant le centenaire. Il a rouvert au public le 21 février 2016 – date anniversaire du déclenchement des combats de Verdun – agrandi de 1900 m2 supplémentaires. Aux côtés d’une salle d’exposition temporaire, d’un centre de documentation, d’une salle pédagogique, le lieu propose un nouveau parcours permanent qui est une franche réussite.

Au cœur du champ de bataille
L’immersion est le maître mot du circuit. Le visiteur est invité à se mettre dans les pas du combattant de Verdun. La précédente présentation proposait en son centre une évocation du champ de bataille, fixé dans le béton. L’idée est reprise par le biais de l’audiovisuel : le combat des fantassins reste le cœur du parcours au travers d’un immense écran diffusant des vues animées (archivistiques ou fictionnelles) de tranchées. À l’abri sous un sol vitré, la terre humide de Verdun a été reconstituée en résine et des dispositifs sonores (qui n’étaient pas encore installés lors de notre visite) font, quant à eux, revivre la bataille par des bruitages, tandis que des voix d’acteurs ressuscitent la parole des combattants. Plus le visiteur s’éloigne du centre du parcours pour gagner les extrémités du rez-de-chaussée ou le premier étage, plus la violence des corps à corps laisse place aux réalités de l’arrière des lignes. Si la scénographie est spectaculaire, elle n’empêche pas la bonne lecture des objets, bien éclairés. Les 2 000 artefacts exposés (uniformes, artillerie, artisanat de tranchée, jouets, affiches, dessins, aquarelles…) illustrent les différentes thématiques du parcours avec pertinence, donnant une idée précise et émouvante du quotidien de Verdun.

Les collections du mémorial ont été complétées par des nouvelles acquisitions et des dépôts d’institutions françaises et allemandes, tels le Militärhistorisches Museum der Bundeswehr de Dresde. L’idée était d’équilibrer la proportion entre objets français et allemands. « Les objets français restent majoritaires », indique Natacha Glaudel-Grosbois. « Les Allemands, qui ont rencontré une défaite lors de la Première Guerre, ont eu moins le réflexe d’en conserver des souvenirs », explique-t-elle. Le lieu frappe cependant par la parfaite transcription du point de vue des deux camps, au travers d’une médiation écrite qui contextualise et résume avec efficacité l’horreur de Verdun. Véhiculant jadis l’image d’un lieu de mémoire un peu vieillissant, le mémorial s’impose aujourd’hui comme une institution muséale de premier plan et souhaite obtenir le label Musée de France dans les années à venir. Il devra donc se doter d’un personnel scientifique qualifié qui lui fait aujourd’hui défaut.

Mémorial de Verdun

1 avenue du corps européen, 55100 Fleury-devant-Douaumont, tél. 03 29 88 19 16, tlj 9h30-17h (d’avril à mi-novembre de 9h30 à 19h), www.memorial-verdun.fr, entrée 11 €.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°452 du 4 mars 2016, avec le titre suivant : Centenaire - Un nouveau Mémorial à Verdun

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