Monographie

Sophia Dixon Dillo accroche la lumière

Par Henri-François Debailleux · Le Journal des Arts

Le 19 janvier 2016 - 511 mots

L’artiste américaine éclaire l’espace de la galerie Fatiha Selam avec une installation toute de fils de pêche tendus, complétée par des œuvres sur papier.

PARIS - 35 kilomètres de fil de pêche, 30 kg de tension tous les 2 cm, 700 allers et retours parcourus avec la même bobine de fil, 5 jours de montage avec une équipe de 7 personnes : cette succession de chiffres n’aurait strictement aucun intérêt si elle ne se traduisait, magnifique paradoxe, par une installation d’une extrême légèreté. Pour sa première exposition personnelle à Paris, l’artiste américaine Sophia Dixon Dillo (née en 1977 en Californie, elle vit dans le Colorado) a investi l’espace de la galerie avec une installation magique.

À l’aide d’une sorte de crémaillère ou de peigne, un élément accroché ici verticalement à un mur et, à l’autre bout de la pièce, suspendu horizontalement au plafond, elle a tendu son fil de nylon d’un seul trait, au sens propre du terme puisque le résultat final donne lieu à un enchaînement de lignes, à l’image d’une partition musicale. Les jeux de perpendiculaires liés à la structure lui permettent ainsi de vriller et de donner une forme hélicoïdale à cette trame, à ce voile. Comme une toile d’araignée torsadée dans toute sa longueur ; comme un hamac dont on ferait faire un quart de tour à l’un de ses extrémités. Mais au-delà de la performance – car il s’agit bien aussi de cela du point de vue même de la discipline artistique –, c’est surtout la façon de travailler et d’attraper la lumière qui intéresse Sophia Dixon Dillo. Qu’elle soit naturelle ou électrique, la lumière s’accroche au fil tels des gouttes de rosée ou des cristaux de neige, crée de grands arcs pour redessiner l’espace, sautille et ricoche de fil en fil pour se perdre progressivement et s’amuse toujours de ses ombres portées sur le mur. Elle donne sa réalité aux fils qui, sans elle, ne formeraient qu’un tapis volant transparent, presque immatériel.

Des Soulages blancs
Pour rendre la lumière visible et lui donner des formes, Sophia Dixon Dillo travaille aussi le papier. Un papier épais, 300 g, qu’elle cisèle à la main à l’aide d’un scalpel comme si elle dessinait au cutter. Avec une grande minutie, elle incise et soulève sa surface, créant ainsi des scarifications et reliefs, tantôt de façon aléatoire, tantôt avec régularité pour mettre en place des points, des lignes évoquant des vagues, des risées, des alignements. Et là encore, seule la lumière fait apparaître le motif, le modifie, et se transforme elle-même en fonction de son orientation et du déplacement du visiteur. Des Soulages en blanc, en quelque sorte.

Compris entre 600 euros pour les plus petits dessins (17,7 x 17,7 cm) et 2 000 pour les plus grands (55,8 x 55,8 cm), et jusqu’à 24 000 euros pour l’installation Forming Light XII, les prix sont raisonnables. En toute logique pour une artiste encore jeune et qui expose depuis une petite dizaine d’années seulement.

Dixon Dillo

Nombre d’œuvres : 11 dessins et une grande installation
Prix : entre 600 et 24 000 €

Sophia Dixon Dillo, Light and Form

Jusqu’au 20 février, Galerie Fatiha Selam, 58, rue Chapon, 75003 Paris, tél.09 83 33 65 69, www.fatihaselam.com, du mardi au samedi 11h-19h.

Légende photo
Vue de l'exposition « Light and Form » de Sophia Dixon Dillo aÌ€ la Galerie Fatiha Selam, Paris. © Sophia Dixon Dillo.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°449 du 22 janvier 2016, avec le titre suivant : Sophia Dixon Dillo accroche la lumière

Tous les articles dans Marché

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque