Nommer les choses

Par Jean-Christophe Castelain · Le Journal des Arts

Le 19 janvier 2016 - 331 mots

La démocratisation culturelle fait partie de ces thèmes tellement rebattus qu’elle n’intéresse pas grand monde. Curieusement, la réduction des inégalités d’accès à la culture ne figure pas explicitement dans les missions du ministère de la Culture. Les partis politiques en dressent un constat d’échec quand ils sont dans l’opposition pour l’oublier très vite une fois arrivés au pouvoir. Ou alors, par calcul ou facilité, les exécutifs développent des politiques publiques tournées vers des cibles bien identifiées, les jeunes, scolaires ou non, et les publics « empêchés », qui ne forment pourtant que deux catégories parmi d’autres. Le problème n’est pas simple. Mesurer les progrès de la démocratisation culturelle revient à s’interroger sur ce qu’est la culture, à nommer ce qu’elle regroupe, ce qui paraît aussi explosif que de définir l’identité française. Où se situe la frontière entre culture et divertissement ? Comment apprécier la réduction des inégalités d’accès à la culture ? Quels sont les publics prioritaires ? Comment leur ouvrir la porte des lieux culturels ? Et, si l’on veut vraiment être efficace, ne faut-il pas entreprendre des politiques spécifiques à l’égard des immigrés ou descendants d’immigrés ? L’Insee, qui classe ces populations en fonction de leur origine géographique, en recense 12,5 millions. La plupart d’entre eux sont parfaitement intégrés mais un grand nombre ne l’est pas. Le débat sur l’intégration n’est fort heureusement plus un tabou et les esprits commencent à regarder la situation en face. De telles politiques sont d’autant plus justifiables qu’il est fort probable qu’une partie de la catégorie socioprofessionnelle des ouvriers (source Insee) vient de l’immigration. Dès lors, comment favoriser l’accès à la culture des ouvriers sans prendre en compte leur origine géographique ? Le bon sens commande des programmes spécifiques mis en place au niveau des Villes en direction des quartiers. Encore faut-il, là aussi, nommer les publics, les actions, au plus près de la réalité sans utiliser un vocabulaire « valise » dans lequel chacun comprend ce qu’il veut, entraînant l’inaction ou l’inefficacité.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°449 du 22 janvier 2016, avec le titre suivant : Nommer les choses

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