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L’ANdÉA démontre ses capacités à mobiliser

À l’occasion de ses 20 ans, l’Association nationale des écoles d’art a tenu ses assises à Lyon. Les deux jours de débats ont été conclus par les timides engagements de Fleur Pellerin.

LYON - L’Association nationale des écoles supérieures d’art (ANdÉA), dépendantes du ministère de la Culture et de la Communication, s’est réunie au grand complet les 29 et 30 octobre aux Subsistances, centre culturel et siège de l’École nationale supérieure des beaux-arts de Lyon.

L’ouverture des assises a été sans surprise l’occasion d’évoquer un contexte triplement contraint : la contraction structurelle des budgets culturels (indépendamment des récentes annonces d’une hausse pour 2016, certes modeste, par la ministre de la Culture) ; le relatif oubli des arts plastiques dans le projet de loi relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine (LCAP) ; enfin, l’interrogation liée aux élections et au redécoupage régional. Malgré cette toile de fond morose, les deux jours de débats ont donné une image plus optimiste, constructive et soudée des écoles d’art.
Le plateau réuni était très large : une trentaine de directeurs d’école ou adjoints étaient présents (sur une cinquantaine environ au total), accompagnés de nombreux élus locaux (présidents des conseils d’administration des écoles) ou de directeurs d’affaires culturelles au sein des municipalités. Plusieurs agents du ministère de la Culture mais aussi de celui de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche ont participé aux débats. Des artistes, des galeristes, des institutionnels et bien sûr des professeurs et étudiants ont constitué un public qualifié et représentatif de l’écosystème de l’ANdÉA, enrichi de personnalités extérieures : professionnels étrangers, directeurs d’écoles d’architecture et de théâtre… Plus de 400 personnes ont navigué, dans quatre lieux thématiques, entre les trente-deux séances d’une heure chacune conçues autour du thème commun « Demain l’école d’art ».

La table ronde traitant de questions telles que l’organisation d’un établissement public ou le statut des enseignants fut la plus instructive, apportant un éclairage bienvenu sur des points juridico-financiers souvent mal compris par les premiers intéressés. On a par exemple pu comparer les coûts estimés par l’ANdÉA (entre 7 et 13 M€) et par l’agence Cultures et Collectivités locales (entre 3 et 5 M€) pour aligner le statut des professeurs des EPPC (établissements publics de coopération culturelle) territoriales avec celui des écoles nationales. Dans les autres salles, les groupes « Enseigner l’art et le design », « Tous pluridisciplinaires » et « Fonctions politiques et sociales des écoles » ont alterné interventions convenues et moments passionnants, proposés par l’artiste Fabrice Hyber sur son expérience en entreprise ou Mehdi Arfaoui, doctorant en sociologie, sur l’idée de créativité. Le public a joué le jeu et largement débattu de chaque contribution.

Un « CNSER culture »
On peut cependant regretter une double absence : sur le volet esthétique et pédagogique, aucun critique d’art n’a été convié. Or, si la fonction normative du critique d’art s’est érodée sur la scène contemporaine, la discipline intellectuelle de la critique n’en reste pas moins fondamentale. Relativement aux débouchés, s’il a été question de la diversité des professions exercées par les diplômés, aucun intervenant n’a pris le risque de se plonger dans les taux d’insertion professionnelle des anciens élèves. Dommage, les premières vagues d’évaluation réalisées sont disponibles (lire ci-dessus) et auraient sainement contribué, à l’heure où certains établissements sont en danger, à la réflexion sur l’utilité sociale de l’école d’art.

Les assises ont enfin permis au président, Emmanuel Tibloux, de rappeler l’agenda politique de l’ANdÉA. Outre l’harmonisation des statuts évoquée plus haut, sa priorité est la création d’un « CNESER culture », sur le modèle du Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche. Il a aussi interrogé la ministre sur la pérennisation du financement de la recherche. Venue clôturer les assises, Fleur Pellerin n’a pas commenté ce dernier point, mais a confirmé ce que Patrick Bloche, le président de la commission des affaires culturelles à l’Assemblée nationale, avait laissé entendre la veille : la création d’un « CNESER culture » fera l’objet d’un décret, parallèlement au passage en seconde lecture de la LCAP. La question du statut des enseignants, difficile à régler par voie législative, devra aboutir à une solution viable, financièrement, avant un éventuel décret.
En dépit d’une réponse politique faible, les assises de l’ANdÉA ont rempli leur objectif en permettant aux écoles d’art de France de parler d’une même voix pour la première fois en vingt ans.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°445 du 13 novembre 2015, avec le titre suivant : L’ANdÉA démontre ses capacités à mobiliser

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