Photoquai

Histoires de familles

Par Christine Coste · Le Journal des Arts

Le 27 octobre 2015 - 716 mots

Pour la 5e édition de cette promenade photographique, une quarantaine de photographes non européens déploient sur les quais et dans divers lieux parisiens leurs travaux sur le thème « qu’est-ce que faire famille ».

PARIS - D’édition en édition, Photoquai assied son identité dans le paysage des multiples festivals qui ont fleuri en France depuis ces dix dernières années : celle d’une biennale créée et organisée par une institution, le Musée du quai Branly, « avec l’ambition », rappelle son président Stéphane Martin, « de rendre visible au public le plus large la photographie contemporaine d’Afrique, d’Asie, d’Océanie ou des Amériques, ignorée ou méconnue en France ». Aménagé face au musée sur le quai Branly, le dispositif scénographique de Patrick Jouin est la signature du rendez-vous depuis ses débuts. La direction artistique – une nouvelle fois confiée à l’Espagnol Frank Kalero – ouvre à une sélection de travaux de quarante photographes liés au thème « Were Are Family » « choisis, dit-il, dans le sens large du thème, mais aussi en écho à l’exposition historique “The Family of Man” organisée en 1955 par Edward Steichen au MoMA ». À la différence de cette dernière, les auteurs de Photoquai ne sont pas en France des signatures référencées, bien qu’« entre la sélection menée par les commissaires commandités sur une zone géographique délimitée et l’exposition s’écoule plus d’un an et demi ; ce qui laisse aujourd’hui le temps pour certains d’être repérés, exposés, voire primés par d’autres », reconnaît Frank Kalero.

La série d’autoportraits d’Omar Victor Diop, qui rend hommage aux personnalités légendaires africaines ayant joué un rôle à partir du XVe siècle, a été ainsi montrée cet été aux Rencontres d’Arles dans le cadre des photographes sélectionnés pour le Prix Découverte. L’Ukrainienne Oksana Yushko a obtenu pour sa part en octobre 2014 le Prix Bayeux-Calvados des correspondants de guerre, catégorie « web journalisme », tandis que la Vietnamienne Maika Elan a été récompensé en 2013 d’un World Press Photo catégorie « Notre époque » pour son projet Pink Choice, ici exposé et conçu pour modifier le regard porté par ses compatriotes sur l’intimité des couples gays. Ces sujets n’en demeurent pas moins inédits pour le grand public et s’avèrent pour la plupart intéressants sur ce qu’ils racontent de notre monde.

Les photographes asiatiques à l’honneur
L’intégration dans la programmation d’un photographe sélectionné dans le cadre de l’appel à projet via la plate-forme EyeEm répond de son côté au souci de ne pas exclure ceux qui n’ont pas les bons contacts pour exposer ou publier. Parmi les 9 000 candidatures émanant du monde entier, celle du Japonais d’origine coréenne Chulsu Kim, retenu pour sa série de portraits particulièrement réussis de personnes croisées dans les rues de Tokyo, relève la place et l’usage de l’Iphone désormais dans la prise de vue. Chulsu Kim, né en 1981 et diplômé du Tokyo Fashion College, est venu à la photographie par ce biais il y a cinq ans.

La grande mobilité des photographes a conduit aussi à ouvrir pour la première fois la sélection à des auteurs issus des grandes zones géographiques représentées par Photoquai, mais résidents dans un pays occidental. C’est le cas du Sud-Coréen Daesung Lee vivant actuellement à Paris et retenu pour sa série particulièrement marquante de portraits de personnes demeurant encore à Vanishing, petite île du Golfe du Bengale qui, dans vingt-cinq ans, sera complètement submergée à cause du réchauffement climatique. L’allégorie et l’ellipse sont de fait particulièrement convoquées dans cette édition, que ce soit chez Romi Perbawa au récit sur de jeunes jockeys exploités de l’île de Sumbawa (à l’est de Java) ou chez le duo iranien Ali Nadjian & Ramyar Manouchehrzadeh, qui s’intéresse à la dualité de la vie quotidienne de la classe moyenne en Iran. Les images en noir et blanc de Tatiana Plotnikova sur les Mari, peuple finno-ougrien respectueux de la nature relève aussi du conte.
L’intégration pour la première fois des réalisations des lauréats 2014 des Résidences Photoquai hors les murs – que l’on découvre sur des écrans à mi-parcours, mais également au sein du plateau des collections du musée dans le cabinet d’arts graphiques – éclaire par ailleurs d’autres travaux, notamment les dévoreuses d’âmes du Burkinabé Nyaba Léon Ouedraogo, abordant ainsi en creux un des autres aspects de la politique photo de l’institution.

Photoquai
Jusqu’au 22 novembre 2015, en accès libre sur le quai Branly jour et nuit, www.photoquai.fr. Catalogue bilingue « We are family, photoquai 2015 / biennale des Images du monde », coédition Musée du quai Branly/Actes Sud, 232 pages, 27 €.

Les résidences de Photoquai 2012-2014
Musée du quai Branly, Cabinet d’arts graphiques, 37 quai Branly 75007 Paris, mardi, mercredi et dimanche 11h-19h, jeudi, vendredi et samedi 11h-21h. Fermé lundi excepté durant les petites vacances scolaires., tél 01 56 61 70 00, www.quaibranly.fr ; tarif plein 9 €.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°444 du 30 octobre 2015, avec le titre suivant : Histoires de familles

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