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Galeries étrangères

Des formules éprouvées

Par Éléonore Thery · Le Journal des Arts

Le 14 octobre 2015 - 833 mots

De la place croissante de l’art moderne à la présentation de tous les artistes de la galerie, les grandes enseignes étrangères adoptent des stratégies conservatrices.

De grandes galeries étrangères attirant d’importants collectionneurs mondiaux, qui à leur tour permettent de faire venir toujours plus d’enseignes internationales. Ce cercle vertueux s’est accéléré ces dernières années pour faire de la Fiac une manifestation de premier plan sur la scène mondiale, au commerce particulièrement actif en 2014. Dans une foire à forte dominante européenne (près de 70 % des exposants), les États-Unis restent le pays le mieux représenté derrière la France, avec 35 galeries. Les grandes galeries étrangères profitent cette année de la diminution du nombre d’exposants (173 contre 191 l’an dernier) pour gagner de précieux mètres carrés et bénéficier de stands plus spacieux, avec deux options : montrer plus, ou montrer mieux. Mais, précise Robert Landau (Landau Fine Art, Montréal) : « Nous devons choisir nos artistes avec beaucoup de soin, car, même si la galerie dispose du plus grand stand à la Fiac, cela ne représente toujours que 60 % de celui que nous avons à Tefaf [The European Fine Art Fair, la foire d’art et d’antiquités de Maastricht]. » La galerie a renoncé à participer à Frieze Masters (Londres) cette année et fait ainsi son retour à la Fiac. « La Fiac dispose d’un lieu magnifique au cœur de Paris et il y a une ambiance sans pareille au Grand Palais. La dernière fois que nous y avons exposé, nous avons eu plus de 100 000 visiteurs sur notre stand. C’est dur à battre ! », confie Robert Landau. Le marchand mêle sur son stand des œuvres modernes – « avec des prix plus abordables que ceux de beaucoup d’artistes vivants » –, précise-t-il, à des artistes contemporains : Léger et son étude pour La Grande Parade (1953), Picasso et sa Tête d’homme (1965) ou Miró font ainsi face à Kwang Young Chun et Clive Head.

Le retour de la galerie canadienne est l’illustration d’une poussée de l’art moderne – une valeur sûre s’il en est – au sein de la foire, qui réaffirme cette année plus que jamais sa vocation généraliste. Un panachage entre des productions de l’après-guerre aux années 1970 et l’art plus contemporain est une option fréquemment observée dans les rangs des participants. Nahmad Contemporary (New York) propose ainsi un mobile de Calder aux côtés d’un tirage de Richard Prince ; à la galerie Tornabuoni (Paris, Florence, Milan), les Concetti Spaziali datés des années 1950 et 1960 de Lucio Fontana dialoguent avec un relief de 2015 de Francesca Pasquali, quand Charlotte Posenenske voisine avec Saâdane Afif chez Mehdi Chouakri (Berlin).

Présentes de chaque côté de la Manche
Nombre de grandes enseignes étrangères sont présentes à la fois à la Fiac et à Frieze London (14-17 octobre) ou Frieze Masters, du 14 au 18 octobre (voire dans ces trois foires) : ainsi de Hauser & Wirth (Zurich, Londres, Somerset, New York… et Los Angeles en mars prochain), Lisson (Londres, Milan, New York), Gagosian (Paris, Le Bourget, New York, Beverly Hills, Londres, Rome, Hongkong, Genève)… Hauser & Wirth a choisi pour la Fiac un projet qui prend une résonance particulière à Paris : « Son point de départ est celui des événements autour des attaques tragiques contre Charlie Hebdo. La présentation aborde le sujet de la liberté d’expression, en particulier dans le champ artistique », explique-t-on à la galerie.

Figurent encore, parmi ceux qui se dédoublent entre Londres et Paris, Esther Schipper (Berlin) qui se concentre sur trois artistes : Ceal Floyer, Daniel Steegmann Mangrané et Tomás Saraceno (dans l’exposition « Une brève histoire de l’avenir », au Louvre) dont elle montre les dernières productions, délaissant Dominique Gonzalez-Foerster, qui jouit pourtant d’une rétrospective au Centre Pompidou. Lisson (Londres, Milan, New York), également présente de chaque côté de la Manche, fait aussi le choix d’un trio d’artistes dont elle expose des pièces récentes : Ai Weiwei, Shirazeh Houshiary et Jorinde Voigt.

Bien peu nombreux sont les audacieux qui font le pari du solo show au rez-de-chaussée : ainsi de The Modern Institute (Glasgow), nouvellement arrivée, qui présente une sélection des sculptures « tortionnées » de Monika Sosnowska, d’Isabella Bortolozzi (Berlin) qui se concentre sur Aldo Mondino, ou de Vitamin Creative Space (Guangzhou, Pékin) qui consacre son stand à Zheng Guogu. Les enjeux financiers n’incitent pas à pencher en faveur de cette option risquée.

À l’inverse, ceux qui choisissent de montrer tous leurs artistes sont légion : c’est le cas de 303 Gallery (New York) – de Doug Aitken à Stephen Shore –, ou de Gavin Brown’s Enterprise (New York) – de Peter Doig à Urs Fischer. Gagosian opte de son côté pour une stratégie inédite. La multinationale, qui promettait de mettre à l’honneur une vingtaine de ses artistes (parmi lesquels Basquiat, Douglas Gordon, Jeff Koons ou Richard Prince), a tenu à conserver jusqu’au dernier moment le secret sur leurs œuvres. Un culte du mystère qu’il est bien l’un des rares à pouvoir se permettre.

Légende photo

Le stand de la galerie Gagosian à la FIAC 2015 / Grand Palais - 21 octobre 2015 - © photo Ludosane

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°443 du 16 octobre 2015, avec le titre suivant : Des formules éprouvées

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