Abstraction

L’intuition d’un langage géométrique

Par Itzhak Goldberg · Le Journal des Arts

Le 16 juin 2015 - 473 mots

Sans être une véritable révélation, l’abstraction cinétique de Geneviève Claisse est une belle découverte au Musée Matisse qui rend hommage à sa contribution à l’art construit.

LE CATEAU-CAMBRÉSIS - Comme son nom ne l’indique pas, le Musée Matisse de Cambrai possède une riche collection d’Auguste Herbin. Il serait cependant injuste de croire que l’exposition de Geneviève Claisse est due à ses liens familiaux avec celui qui fut un des apôtres de l’abstraction géométrique en France dans l’entre-deux-guerres.

Certes, les premières œuvres de Claisse (née en 1935) partagent avec Herbin – elle en fut la collaboratrice pendant un an – un système basé sur des couleurs pures combinées avec les figures de la géométrie en aplats (Slalom 2, 1960). Sans doute, même si l’artiste déclare « encore écolière, j’étais déjà abstraite, spontanément, naturellement », il lui faut un certain temps pour trouver sa petite musique et se placer parmi les nombreux créateurs qui pratiquent l’art cinétique dans les années 1960. Employant un langage plastique résolument moderne, dans la lignée du constructivisme et du Bauhaus, l’originalité de Claisse est de ne pas limiter son expérimentation aux effets optiques qui se produisent uniquement sur la surface.

Le cercle, le triangle et la ligne
Ainsi, La Boule bleue, 1965, accompagnée de ses dessins préparatoires, est un agencement dynamique de lignes et de plans déclinés qui pénètrent dans l’espace. Dynamisme qui se voit prolongé avec des compositions en noir et blanc où Claisse s’astreint à une seule forme, le triangle, qu’elle décline dans des positions différentes (Agena, 1966). Selon elle, « Le triangle est stable et mobile. Un contraste maximum naît de l’opposition noir/blanc, plein/vide, positif/négatif ».
Moins convaincants sont des cercles colorés aux accents décoratifs qu’elle réalise un peu plus tard, qui font penser tantôt à l’« alphabet plastique » élaboré jadis par Herbin, tantôt à la production d’autres artistes dans la lignée de l’Op’art. Ce sont les œuvres des années 1980 qui se détachent dans le trajet de Claisse. Reprenant les travaux en noir et blanc, l’artiste réussit, tout en gardant les principes géométriques, à jouer avec la perspective, à la détourner. Pour ce faire, elle a surtout recours aux lignes droites qui traversent l’ensemble de la toile et, tantôt parallèles, tantôt se croisant, forment un réseau dense et complexe. Parfois, pour accentuer la déstabilisation de l’espace, Claisse choisit un format rond (tondo), créant un contraste avec ses grilles Vertex de gluons (1980), Petit Grumeau temporaire d’organisation, 1979). Ailleurs (Résonance, 1987), des tracés en acrylique se « cassent » au milieu et perturbent l’ordonnance rectiligne de la composition.

En fin de parcours, le pan moins connu de la production de Claisse, le mobilier et les travaux réalisés pour l’espace public. Sobres, ces objets montrent que l’artiste considère que la création ne s’arrête pas aux portes de son atelier.

GEVENIEVE CLAISSE

Commissaire : Patrice Deparpe
Nombre d’œuvres : 120

GEVENIEVE CLAISSE

Jusqu’au 20 septembre, Musée Matisse, Palais Fénelon, 59360 Le Cateau-Cambrésis, tél. 03 27 84 64 50, museematisse.cg59.fr, tlj sauf mardi de 10-18h, entrée 5 €.

Légende photo
Geneviève Claisse, Cercles, 1969, acrylique sur toile, Musée départemental Matisse, Le Cateau-Cambrésis. © Photo : Florian Kleinefenn.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°438 du 19 juin 2015, avec le titre suivant : L’intuition d’un langage géométrique

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