Arts décoratifs

À Paris, un marché vif et sélectif

Par Éléonore Thery · Le Journal des Arts

Le 2 juin 2015 - 578 mots

La vitalité de la place parisienne se confirme, couronnant les pièces exceptionnelles quelle que soit leur époque.

PARIS - Six opérateurs, dix ventes, plus de 1 500 lots proposés : la session de mai consacrée aux arts décoratifs du XXe siècle avait tant démultiplié les propositions que l’on se demandait si cette surabondance n’allait pas laisser sur le carreau une bonne partie de la marchandise. Il n’en a pas été ainsi. Le marché a montré qu’il était assez fort pour l’absorber, comme en témoignent les bons taux de ventes : de 76 % à 97 % chez Christie’s, 81 % chez Sotheby’s, 70 % à 85 % chez Artcurial. Seuls Piasa et Tajan voient une bonne partie de leurs lots invendus (40 % pour le premier malgré de beaux succès et une thématique innovante et près de 50 % pour le second). Quant aux résultats des ventes, ils sont élevés et dépassent les estimations. Sotheby’s récolte 7 millions d’euros grâce à sa vente généraliste qui comportait de belles pièces Art nouveau et Art déco. Christie’s organisait trois ventes, dont une vacation du jour, nouveauté qui lui a permis d’adjuger des objets plus abordables ; la maison a obtenu 8,3 millions d’euros au total. Artcurial innovait également avec trois ventes dont une exclusivement consacrée au design scandinave, réalisant 6,1 millions d’euros pour l’ensemble.

« Ce bilan est très encourageant pour notre spécialité », commente Pauline De Smedt, directrice des ventes au département arts décoratifs du XXe et design chez Christie’s. « Le marché est très bon », indique de son côté Cécile Verdier, directrice du département design du XXe chez Sotheby’s. Pourtant, ajoute-t-elle, « la taille du marché augmente relativement peu. L’an dernier nous avions constaté une vraie percée des acheteurs d’art contemporain, cette année nous enregistrons 10 % de nouveaux acheteurs. Nous voyons en revanche de nouvelles zones géographiques apparaître à chaque fois ». Si les clients américains restent majoritaires au sein de cette clientèle très internationale (plus de deux tiers d’acheteurs étrangers chez Christie’s et près de 80 % chez Sotheby’s), le constat est le même chez Artcurial qui a vu trois lots phares de Jean Prouvé et Charlotte Perriand emportés par des Asiatiques. La spécificité du marché parisien peut expliquer cet attrait. « À Paris, nous avons une démarche de décorateur, nous privilégeons les belles provenances, les collections. Londres serait plus un marché d’objets de belle qualité », explique Cécile Verdier, dont le département cumule 50 % du chiffre d’affaires Monde. « En France, berceau de notre spécialité, il y a un attachement à l’histoire de l’objet, vendu dans son jus, et une préférence pour la provenance privée », précise Cécile De Smedt.

Si le succès est généralement au rendez-vous pour quelques indétrônables comme Jean Royère, François-Xavier et Claude Lalanne ou Prouvé, c’est la réunion de tous les éléments précités pour des pièces hors du commun qui fait s’enflammer les prix. Ainsi d’un formidable vase multicolore aux iris d’Émile Gallé proposé chez Sotheby’s, et parti à 435 000 euros alors que l’Art nouveau n’est guère à la mode. Ainsi également d’un bureau Présidence de Prouvé, commande spéciale de 1952, cédé 1,1 million chez Artcurial. Ainsi encore d’un miroir de Line Vautrin composé d’une multitude de personnages en Talosel vendu 421 500 euros par sa fille chez Christie’s. « Ces ventes ne font que confirmer une tendance : pour les choses exceptionnelles, le marché est très fort, quel que soit le mouvement », conclut Pauline De Smedt.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°437 du 5 juin 2015, avec le titre suivant : À Paris, un marché vif et sélectif

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