Tefaf, entre tradition et modernité

Maastricht, capitale du marché de l'art

Par Marie Potard · Le Journal des Arts

Le 25 février 2015 - 982 mots

The European Fine Art Fair, la foire d’art et d’antiquités la plus prestigieuse au monde, garde le cap tout en instillant quelques nouveautés.

La plus grande foire au monde d’art et d’antiquités, Tefaf, ouvre ses portes du 13 au 22 mars, à Maastricht (Pays-Bas). Pour sa 28e édition, la foire n’en finit plus de s’étendre car jamais elle n’aura accueilli autant d’exposants, soit 280 au total (contre 274 en 2014).

Mais comment une foire nichée dans une petite ville des Pays-Bas a-t-elle fait pour se retrouver au centre du monde des arts et antiquités pendant une dizaine de jours à chaque printemps, concentrer les plus grands marchands au monde chacun dans sa discipline, et accueillir près de 75 000 personnes comme l’an passé ? Car non seulement cette foire est la plus grande en termes de volume, mais aussi de qualité. Une sélection drastique, une organisation sans faille, un comité d’expertise solide, des règles strictes, des stands à prix raisonnable, en ont été les clés du succès. « Notre vetting, que personne n’a su surpasser, est un des piliers indispensables de la foire. Il réunit 175 experts internationaux dans 29 catégories différentes qui examinent chaque pièce, en fonction de sa qualité, son authenticité et son état. D’ailleurs, pour la première fois cette année, nous installons un laboratoire de recherche mobile, c’est-à-dire que les pièces pourront être soumises à une expertise scientifique », rapporte Willem van Roijen, président du comité d’organisation. Confiant,
il poursuit : « Les économies en Asie, dans certains pays Sud-Américains et aux Etats-Unis, montrent de forts signes de croissance. Je suis convaincu que Tefaf 2015 va bénéficier de cette tendance positive ».

L’ascension d’un modeste salon
À l’origine, il n’existait à Maastricht que de micros événements, comme « Pictura », d’environ trente exposants spécialisés en tableaux anciens et sculptures, et « Antiqua », composé d’une quarantaine de galeries exposant pour l’essentiel des livres anciens. Si ces deux manifestations se regroupent en 1985, c’est seulement en 1988 que la foire prend son nom actuel et s’établit définitivement dans le centre d’exposition de Maastricht (MECC). À l’époque, c’est un sympathique salon régional, qui mise avant tout sur les tableaux anciens, dont la clientèle provient des pays limitrophes telle que l’Allemagne. En 1992, avec le traité de Maastricht, la ville sort de l’anonymat. Petit à petit, la foire va franchir les étapes essentielles pour en faire un salon renommé. C’est ainsi que dès 1994, elle organise des expositions de haute volée, déplaçant ainsi les plus érudits, conservateurs et spécialistes compris. De même, tournée essentiellement vers la peinture ancienne à ses débuts, la foire s’ouvre à la joaillerie, aux antiquités classiques, puis au XXe siècle et à l’art asiatique. En 2009 naît une nouvelle section, Tefaf design, et en 2010 la section Works on paper est créée.

Que manque-t-il à Tefaf alors ? « La foire a intégré toutes les disciplines existantes, il n’y a plus de surprise de ce côté-là. Maintenant, il faut qu’elle maintienne son niveau. C’est son véritable challenge », souligne un exposant. Les changements ne se font plus que par petites touches. Cette année la manifestation crée un nouveau concept, « Night Fishing », une exposition d’art contemporain organisée par un conservateur. Pour le lancement, c’est Sydney Picasso qui est invité. Elle a choisi de présenter un panorama de la sculpture contemporaine. La foire essaie aussi d’apporter un peu de sang neuf en offrant aux galeries nouvellement établies l’opportunité unique d’y prendre part, grâce à la section « Showcase » introduite en 2008. Cinq jeunes marchands issus d’horizons différents sont sélectionnés chaque année et pour 2015, pas moins de trois Français ont été retenus. Xavier Eeckhout, passionné de sculptures animalières, rend hommage aux grands sculpteurs animaliers du XXe siècle et expose entre autres, deux œuvres de Pompon, dont Ours blanc, une épreuve originale en bronze, vers 1926-1927 (300 000 euros). La galerie Bacquart, spécialisée en art tribal montre une paire de sculptures Baulé de Côte d’Ivoire et la galerie Eberwein, qui officie dans le domaine des antiquités égyptiennes, présente un vase canope de Ramsesnakht en faïence, XIIIe-XIe siècle av. J.-C.

Une recette inchangée
De faibles changements sont aussi opérés du point de vue de la composition de la foire : cette année, donc, 280 marchands se répartissent sur 30 000 m2, comptant dans leurs rangs 38 Français. Parmi les nouveaux venus (douze au total, excepté Showcase), la galerie Gradiva qui a fait son entrée en septembre dernier dans le cercle très fermé des foires internationales lors de sa première participation à la Biennale des antiquaires de Paris, partageant le stand de la galerie Hopkins ; le joaillier Alexandre Reza, installé place Vendôme ; ou encore Lucas Ratton, spécialisé en art tribal, qui a apporté pour l’occasion une statuette Fang du Gabon de la collection Arman (plus d’1 million d’euros). Manque à l’appel notamment la galerie Chevalier, qui avait fait son grand retour l’an passé : « Nous n’avons pas souhaité revenir à Tefaf car les organisateurs ont refusé que nous présentions pour moitié des tapisseries modernes, contemporaines et de Fiber Art accompagnant les tapisseries anciennes », indique Amélie-Margot Chevalier. Étonnant pourtant, alors que plusieurs exposants d’art ancien avaient fait le choix l’an dernier de présenter aussi de l’art contemporain…

Mais la manifestation continue d’être organisée par section, toujours axée sur quatre disciplines majeures que sont les tableaux anciens, les antiquités, le design et la section d’art moderne, toujours à peu près dans les mêmes proportions. La section la plus importante en nombre de représentants reste cependant la section antiquités, puisqu’elle accueille 108 marchands. La peinture ancienne, spécialité historique du salon, accueille 60 marchands, dont 7 Français, 8 Néerlandais et 19 Anglais. La section moderne, l’autre pôle important, regroupe 51 participants. Quant à la section design, la plus petite des sections, elle, ne varie pas : toujours 10 participants, si ce n’est que la galerie Sebastian Barquet est remplacée par Demisch Danant.

Légende photo

Dans les allées de TEFAF Maastricht, 2014. © Photo : Harry Heuts.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°430 du 27 février 2015, avec le titre suivant : Maastricht, capitale du marché de l'art

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