XIXe siècle

Sept ans d’acquisition

Par Maureen Marozeau · Le Journal des Arts

Le 10 février 2015 - 467 mots

Le Musée d’Orsay réunit les œuvres entrées dans les collections depuis l’arrivée de Guy Cogeval à la présidence de l’institution.

PARIS - « Nous n’aurons pas une sixième Cathédrale [de Claude Monet] à Orsay. Je pense que nous n’en aurons jamais. Mais a-t-on besoin d’une sixième Cathédrale, quand on en a déjà cinq ? Il vaut mieux avoir la Sorcière au chat noir de [Paul] Ranson, me semble-t-il, ou le Portrait d’Yvonne Lerolle [de Maurice Denis], un chef-d’œuvre, le plus beau portrait symboliste français de tous les temps et le temps le dira mieux que moi. » Dans l’entretien qui ouvre le catalogue de l’exposition « Sept ans de réflexion » présentée au Musée d’Orsay, Guy Cogeval revient avec force émotion sur la politique d’acquisition menée depuis son arrivée à la tête de l’institution en 2008. Sept ans au cours desquels la plus grande collection d’art impressionniste en France n’a cependant vu ni Monet, ni Manet, ni Sisley, ni Pissarro, ni Morisot venir étoffer ses rangs. Un petit paysage de Renoir et un très beau portrait de Cézanne démontrent que, désormais, seules les libéralités (dons, legs et dations) font entrer de nouveaux chefs-d’œuvre impressionnistes dans les collections de ce musée doté d’un budget annuel de 3 millions d’euros. À défaut de grives, on mange des merles ? Considérer le somptueux Cercle de la rue Royale de James Tissot, les magnifiques toiles de Maurice Denis, Pierre Bonnard et Félix Vallotton, le bureau à cylindre réalisé par Salvatore Coco et Marco Ciappa ou la bergère signée Jacques Émile Ruhlmann comme des nourritures de substitution serait une insulte à la qualité de ses œuvres, à l’intelligence des choix opérés, mais aussi à l’idée que les collections d’un musée du XIXe siècle devraient se résumer à l’impressionnisme.

Dons et dations
Faisant de nécessité vertu, le musée a ouvert le champ des possibles, lorgnant notamment sur les écoles étrangères, en peinture comme en art décoratif. Le goût de Guy Cogeval pour les nabis mais aussi pour le néo-académisme a été déterminant, tout comme les relations privilégiées que le président d’Orsay et ses conservateurs entretiennent avec les collectionneurs : outre la dation « William Bouguereau » (2010), une superbe collection d’art nabi (25 tableaux et 100 dessins de Pierre Bonnard, et 25 tableaux d’Édouard Vuillard) donnés sous réserve d’usufruit (2010), l’ensemble « Marlene et Spencer Hays » a été promis à l’institution à condition qu’il soit visible en permanence.
Les achats d’œuvres atypiques signées Jean-Léon Gérôme (Corinthe, 1903, plâtre peint) ou Gustave Doré (Joyeuseté, 1881, bronze) attestent de l’élan vertueux de la programmation d’expositions monographiques. Enfin, la spécificité du droit français a permis l’acquisition de la Danseuse en maillot d’Edgar Degas (v. 1896), foudroyante de modernité. Le souhait de Guy Cogeval avant de quitter la présidence du musée ? Acheter un autre Edvard Munch.

Sept ans de réflexion, jusqu’au 22 février, Musée d’Orsay, 1, rue de la Légion-d’Honneur, 75007 Paris, tél. 01 48 14 40 49, www.musee-orsay.fr, tlj sauf lundi 9h30-18h, 9h30-21h45 le jeudi, entrée 11 €. Catalogue, coéd. Musée d’Orsay/ Skira (Milan), 312 p., 49 €.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°429 du 13 février 2015, avec le titre suivant : Sept ans d’acquisition

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