Ecole

Les futurs restaurateurs emménagent à Aubervilliers

Par Margot Boutges · Le Journal des Arts

Le 10 février 2015 - 821 mots

Le département des restaurateurs de l’Institut national du patrimoine s’est installé dans l’ancienne manufacture d’allumettes, un édifice intégralement réhabilité.

AUBERVILLIERS - Le 2 février, les élèves restaurateurs de l’Institut national du patrimoine (INP) ont effectué leur rentrée dans un nouveau bâtiment. Après une vingtaine d’années passées dans une ancienne boulonnerie à Saint-Denis-La-Plaine (Seine-Saint-Denis), le département des restaurateurs de cet établissement d’enseignement supérieur placé sous la tutelle du ministère de la Culture a déménagé au 124, rue Henri-Barbusse, à Aubervilliers (Seine-Saint-Denis).

Depuis le trottoir de cette longue artère, le site impressionne. Deux enfilades de bâtiments de brique se déploient symétriquement autour d’un point de fuite unique : une cheminée culminant à 45 mètres. L’ensemble constitue l’ancienne manufacture d’allumettes, élevée tout au long de la première moitié du XXe siècle et agrandie dans les années 1990. En 1967, cet édifice industriel désaffecté est attribué à La Documentation française, qui y installe ses services techniques et logistiques jusqu’en 2012. En février 2014, l’INP jette son dévolu sur le site. Depuis plusieurs années, l’institut recherchait un nouveau lieu où s’implanter, le propriétaire de ses locaux de Saint-Denis ne souhaitant pas reconduire le bail afin de mener une opération immobilière. Longtemps, le département des restaurateurs a cru pouvoir être relogé au sein d’un vaste « centre de conservation, de recherche et de restauration des patrimoines » aux côtés des réserves du Louvre, à Cergy-Pontoise (Val-d’Oise), mais le projet a été abandonné en 2012 sous le ministère d’Aurélie Filippetti.

À Aubervilliers, « nous avons signé un bail de douze ans », explique Sébastien Zonghero, secrétaire général adjoint de l’INP, face à un bâtiment achevant sa réhabilitation grâce au financement du groupe immobilier Sirius, propriétaire des lieux. Sur les façades extérieures, les briques détériorées ont été remplacées, redessinant à l’identique les motifs géométriques du lieu aux côtés de gouttières frappées du sigle de la manufacture (« MAA »), restituées pour rappeler l’histoire de la fabrique. À l’intérieur des bâtiments, au nombre de six pour une surface de 4 000 m2, des cloisons ont été élevées pour créer des ateliers, laboratoire, bibliothèque, salles de classe…  « Les intérieurs étaient des plates-formes évidées donc facilement modulables », précise Sébastien Zonghero.

Équipements dernier cri
À la différence des anciens locaux de Saint-Denis, répartis sur plusieurs étages, les sites s’organisent intégralement de plain-pied, ce qui facilite considérablement le déplacement des œuvres confiées par les musées et établissements partenaires pour être restaurées (gratuitement) par les élèves. Ce sont ainsi 168 œuvres qui attendent aujourd’hui dans la réserve, dotée d’une salle de mise en quarantaine et de traitement par anoxie qui faisait défaut à Saint-Denis. Grâce au programme d’investissement du ministère de la Culture, les équipements ont été améliorés, notamment par l’installation de systèmes dernier cri pour la climatisation et l’aspiration des produits chimiques (un matériel utilisé dans les opérations de restauration).

Nombre d’élèves se réjouissent : ces locaux sont à même de rivaliser avec ceux de la rue Vivienne, à Paris, qui abrite la formation des élèves conservateurs et est située à une quarantaine de minutes en métro. Deux formations que l’école s’emploie à rapprocher – encore trop modestement – dans le cadre d’exercices menés en commun autour de chantiers de collections ou de constats d’état des œuvres. Alors que le déménagement s’achève, le nouveau directeur, Philippe Barbat, arrivé en janvier en remplacement d’Éric Gross, entend bien faire évoluer l’enseignement dispensé à l’INP. Constituée d’une licence et d’un master depuis 2005 à la suite de la réforme LMD, la formation des restaurateurs n’est pas appelée dans l’immédiat à se transformer. « Elle a été très bien notée par l’agence d’évolution de la recherche et de l’enseignement supérieur en 2013 », souligne Philippe Barbat. Les élèves estiment cependant qu’elle ne prépare pas suffisamment à l’exercice du métier en indépendant, qui les attend pour la plupart après leurs études. En 2015, c’est la formation des élèves conservateurs (déjà fonctionnaires et rémunérés) que le directeur, énarque et conservateur du patrimoine passé par l’INP en 1997, entend faire évoluer, afin que ses futurs conservateurs soient à même de « négocier avec tous les corps de la fonction publique ». Ces dernières années, les neuf mois de cours que dispense l’INP ont suscité nombre de critiques de la part des élèves, qu’ils ont « souvent vécus comme une redite de la formation antérieure », selon les termes de leur courrier adressé en juillet 2014 à l’INP et au ministère de tutelle.

Un projet d’usine de films amateurs abandonné

En 2012, la municipalité d’Aubervilliers a revendu une grande partie de la manufacture d’allumettes au groupe immobilier Sirius, tout en conservant la propriété de la cheminée, inscrite au titre des monuments historiques et qui achève actuellement sa restauration. La Ville possède en outre toujours quelques bâtiments au pied de la cheminée, qui auraient dû accueillir un lieu de réalisation de films amateurs à l’initiative du cinéaste Michel Gondry. Projet que la Mairie a choisi d’abandonner en juin 2014 par mesure d’économie.

Légende photo

Fin des travaux pour les nouveaux locaux de l'Institut national du patrimoine. © Photo : Margot Boutges.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°429 du 13 février 2015, avec le titre suivant : Les futurs restaurateurs emménagent à Aubervilliers

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