Architecture

Deux bâtiments en un

Par Sophie Trelcat · Le Journal des Arts

Le 27 janvier 2015 - 689 mots

À Paris, les agences MAB Arquitectura et LAPS Architecture sont parvenues à réunir dans un même édifice les espaces publics du patronage laïque et des logements sociaux.

PARIS - « Humanisme, liberté, libre arbitre, pluralisme, tolérance », telles sont les valeurs revendiquées sur le site internet du Patronage laïque Jules Vallès (et dont l’actualité funeste de ces derniers jours nous montre l’importance, plus que jamais, de la diffusion aujourd’hui). Créés à la fin du XIXe en France et placés originellement sous la protection d’un saint patron, ces mouvements d’éducation populaire ont connu leur apogée dans les années 1950 et ont toujours pour objectif « de promouvoir le développement du “mieux vivre ensemble“grâce à une prise de conscience et à une connaissance des véritables enjeux liés à la sauvegarde des acquis républicains ».

Créé en 1907, l’équipement Jules Vallès, tirant son nom de l’écrivain, journaliste et politicien d’extrême gauche, fondateur du journal Le Cri du Peuple (1832-1885) est le dernier patronage laïque de Paris. Jusqu’en 2010, il était installé dans des locaux devenus inadaptés et occupant un terrain d’angle délimité par la large avenue Felix Faure et la rue Tisserand. « Il s’agissait d’une vaste halle, d’un seul niveau et sans aucun équipements. Il était impossible de la mettre aux normes », explique l’architecte Fabienne Louyot de l’agence Laps. Aussi en juillet 2010, la Régie immobilière de la Ville de Paris (RIVP) lançait-elle un concours pour la démolition de l’ancien bâti et l’édification de nouveaux locaux. Au programme de l’équipement public destiné à accueillir concerts, spectacles, expositions, conférences, cours d’art plastique ou de danse etc., la RIVP demandait d’ajouter sur la même parcelle un ensemble de logements sociaux pour jeunes travailleurs.

Un phare astucieux et lumineux
Allier espaces publics et privés était compliqué sur une si petite parcelle et dans un environnement disparate. Forts de leurs recherches et réalisations en matière de logements, auxquelles s’ajoute le fruit juteux du choc des cultures, (les deux agences basées à Barcelone et à Paris sont constituées de jeunes architectes de nationalités différentes, formés dans des agences internationales) MAB Arquitectura et Laps Architecture associés sur le projet parisien, ont proposé une solution d’une grande habileté. L’accueil public dans le patronage et la fluidité des fonctions sembleraient presque évidents. L’ensemble relève pourtant d’un épannelage savant des volumes. L’institution Jules Vallès, occupant le rez-de-chaussée et le premier niveau, s’ouvre largement sur l’angle par une petite place couverte et par un large hall vitré, lui conférant ainsi la même présence informelle et domestique qu’un café. Cette entrée de plain-pied ancre fortement le patronage au quartier tandis qu’au dessus, deux façades en retrait s’élèvent de part et d’autre d’une faille surplombant une verrière qui éclaire le hall d’entrée. Ces surfaces sont traitées en verre blanc translucide, un repère dans le quartier qui devient une véritable balise dans l’avenue dès la nuit tombée, sous l’éclairage artificiel. Sur ce plateau ouvert, au-delà de la salle informatique et de la cafétéria s’organise une salle de spectacle polyvalente. À l’étage se trouvent des salles d’activités et des bureaux éclairés naturellement sur rues ou par un patio en cœur de l’îlot.

La résidence possède sa propre entrée sur la rue Tisserand, moins passante et elle se développe en arrière de parcelle pour offrir de bonnes conditions aux habitants. Des coursives intérieures à l’îlot et semi-ouvertes desservent les trois niveaux de logements, tandis qu’au quatrième niveau, en proue du bâtiment et dominant Paris, une terrasse collective est aménagée. Les studios dont la plupart sont dotées d’une terrasse privative comprennent un mur fonctionnel le long duquel s’organisent rangement, cuisine et bureau possèdent des salles de bain éclairées naturellement. Alors que les associations du patronage et les habitants du quartier s’étaient montrés réticents à l’idée de voir disparaître le bâtiment d’origine, une réaction réfractaire quasi systématique dès lors que Paris se transforme, tous ont cessé leurs revendications au fil de l’évolution du chantier pour définitivement adopter le nouvel espace bâti.

Fiche technique :

Maître d’ouvrage : RIVP
Maître d’œuvre : MAB Arquitectura LAPS Architecture
Superficie : Equipement polyvalent : 944 m2 - Logements : 1 834 m2
Budget : 5,7 millions d’euros HT
Livraison : mars 2014

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°428 du 30 janvier 2015, avec le titre suivant : Deux bâtiments en un

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