Chine - Art contemporain

Le boom de l’art à Shanghaï

Par Frédéric Bonnet · Le Journal des Arts

Le 9 décembre 2014 - 617 mots

Musées et manifestations d’art contemporain se multiplient dans la grande ville de l’Est de la Chine.

Elle n’est pas encore une métropole internationale de l’art contemporain – ne serait-ce que parce que la nécessité pour les étrangers d’obtenir un visa décourage nombre de velléités –, mais pas à pas le paysage culturel de Shanghaï se transforme, et connaît un développement constant des initiatives, privées pour la plupart.

Le domaine public n’est pourtant pas en reste, qui a soutenu la création de la Biennale de Shanghaï – jusqu’en 1998 réservée aux seuls artistes chinois, elle a depuis 2000 gagné largement en audience pour s’être ouverte à l’art international. Les fonds gouvernementaux financent aussi partiellement le budget de la Power Station of Art (PSA), premier musée d’art contemporain chinois à recevoir ce soutien, avec en 2014 40 millions de yuans (un peu plus de 5 millions d’euros) alloués aux dépenses de fonctionnement, et 20 millions aux expositions ; une part que l’État entend toutefois réduire, souhaitant que la structure augmente ses partenariats. PSA qui en 2013 a attiré 500 000 visiteurs, ce qui est loin d’être négligeable.

Initiatives privées
« Il y a vingt ans, rien n’existait pour l’art contemporain à Shanghaï, relate un professionnel désireux de conserver l’anonymat. Le mouvement a commencé par l’installation de la galerie ShanghART en 1994, et la création progressive d’un marché qui a fait émerger des collectionneurs. Et c’est après 2002 que le gouvernement, qui jusque-là considérait l’art contemporain comme dangereux, a commencé à changer d’attitude. » Si Pékin reste la place forte du marché, des enseignes très dynamiques se sont installées à Shanghaï, telles Pearl Lam ou Leo Xu Projects.

Dans le domaine muséal, les choses se sont accélérées depuis une dizaine années, avec la création d’une dizaine de structures privées. Dernière en date, le Shanghai 21st Century Minsheng Art Museum (M21), financé par la banque Minsheng, a ouvert ses portes la veille de la Biennale dans les murs de l’ancien pavillon français de l’Exposition universelle de 2010, avec une exposition pas vraiment qualifiable. En mai dernier, c’est le collectionneur d’origine indonésienne Budi Tek qui inaugurait dans un ancien hangar d’aviation son « Yuz Museum », une structure de 8 000 mètres carrés de surface d’exposition dans laquelle se succèdent tous les artistes stars du marché chinois – Yue Minjun, Zeng Fanzhi, Xu Bing, Zhang Huan… – mais aussi quelques têtes d’affiche internationales tels Adel Abdessemed ou, plus intéressants par les œuvres présentées, Mona Hatoum, Fred Sandback et Maurizio Cattelan.

Souvent fondées à l’initiative d’hommes d’affaires ou d’entreprises opulentes, ces structures programment à la fois de l’art chinois et la création internationale. Elles prennent toutefois des formes très diverses. Le Rockbund Art Museum, inauguré en 2010 et dirigé par le Français Larys Frogier, qui expose actuellement Ugo Rondinone, est installé dans un bel immeuble des années 1930. Tandis qu’une rétrospective dévolue à Sean Scully, ample et remarquablement accrochée, est visible au Shanghai Himalayas Art Museum dans un espace sans âme qui défie l’entendement : le musée a été installé en 2005 par son promoteur, le Shanghai Zendai Group, au cœur d’un immense centre commercial !

Une nouvelle classe sociale
Dans un entretien paru dans le catalogue de la Biennale, Cosmin Costinas analyse finement cette évolution : « Le boom des musées au cours de la dernière décennie a été fortement connecté avec la croissance d’une nouvelle classe sociale qui avait besoin d’une légitimation dans un ensemble de références culturelles. Mais cette accumulation de biens culturels n’est pas seulement une analogie logique de l’accumulation de capital vers laquelle est allée la Chine, elle a aussi été un effort majeur pour déconstruire les effets de la Révolution culturelle sans dénier sa position historique. »

Légende photo

Le Yuz Museum, Shanghai. © Yuz Museum

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°425 du 12 décembre 2014, avec le titre suivant : Le boom de l’art à Shanghaï

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