Galeriste

Thomas Bompard : « Il faut savoir se mettre en danger »

Par Marie Potard · Le Journal des Arts

Le 21 mai 2014 - 591 mots

Thomas Bompard a commencé sa carrière chez Sotheby’s, au département des livres anciens, puis à celui de l’art impressionniste et moderne. En 2013, il quitte la maison de ventes pour ouvrir sa propre galerie.

Pourquoi avoir quitté Sotheby’s pour ouvrir une galerie ?
J’ai quitté Sotheby’s parce que c’était la galerie Demachy. Je ne l’aurais pas quittée pour un autre lieu. Je n’avais pas de velléité de devenir marchand, mais quand Alain Demachy m’a annoncé qu’il fermait, il a su me convaincre : « Il y a des trains qui ne repassent pas ! » J’ai remis ma démission à Guillaume Cerutti le 4 juillet 2013, une bonne date pour être indépendant.

Pourquoi avoir choisi Gradiva comme enseigne plutôt que votre nom ?
Tout le monde met son nom et finalement, je trouve ça réducteur. J’ai toujours eu des rendez-vous avec ce nom : un oral blanc en hypokhâgne sur le chapitre Gradiva dans Fragments d’un discours amoureux de Roland Barthes, le tableau d’André Masson vendu en 2010 (préempté par Beaubourg) et le nom de la galerie d’André Breton, dont j’ai vendu le Manifeste du Surréalisme. Ouverte en 1938, elle aurait dû durer plus longtemps. J’aime l’idée de la Gradiva (en latin « celle qui avance »), endormie au 32 rue de Seine en 1939 et qui se réveille en 2014 au 9 Quai Voltaire.

Quels types d’œuvres allez-vous vendre à vos clients ?
Les mêmes que je vendais chez Sotheby’s, de l’art impressionniste et moderne, incluant l’art d’après-guerre, donc jusqu’aux années 1960, avec des incursions dans l’art tribal, les livres anciens et la photographie. Les œuvres ne seront dévoilées que le 27 mai, jour du vernissage. En attendant, seulement deux sont divulguées : Le Penseur de Rodin (72 cm), jamais passé en vente, et Le Rêve II, de Balthus, ancienne collection de Maurice Rheims. La galerie est très ambitieuse. L’idée est de ne proposer que des œuvres marquantes, majoritairement à des clients internationaux. Une fois que vous avez le carnet d’adresses, que vous savez où sont les œuvres et que vous pensez savoir donner envie aux collectionneurs de travailler avec vous, il faut y aller. Quand on sait ce qu’on veut, il faut savoir se mettre en danger.

Vous allez faire concurrence aux maisons de ventes ?
Oui c’est certain, mais il y a de la place pour tout le monde je crois. On a tous besoin les uns des autres. Les maisons de ventes, formidables machines commerciales, sont le thermomètre du marché. Ce serait plus difficile pour un marchand de bien vendre si ces dernières n’obtenaient pas les résultats qu’elles enregistrent.

Quels seront les prix pratiqués par la galerie ?
Ceux pratiqués en ventes privées dans les maisons de ventes. En vente publique, on part d’une estimation basse et le prix ne peut que monter. Le marchand, lui, prophétise le prix d’adjudication et c’est ce prix qu’il va demander. Les collectionneurs sont de plus en plus désireux de travailler de cette manière car la confidentialité est plus grande et les œuvres plus fraîches sur le marché. Ceci explique le développement de ces transactions au sein des maisons de ventes.
Je crois dur comme fer à l’avenir d’une galerie qui propose des œuvres importantes d’art impressionniste et moderne, puisque c’est la part de ce marché la plus dynamique. Il faut simplement trouver ces œuvres avant les maisons de ventes. Mes atouts : un prix sans risque pour le vendeur (contrairement au prix aléatoire de la vente publique), mon réseau de clients et un espace unique au monde sublimé par le goût de François-Joseph Graf.

Gradiva

9 quai Voltaire, 75008 Paris, ouverture le 28 mai, tél.01 42 61 82 06.

Légende photo
Thomas Bompard. © Galerie Gradiva.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°414 du 23 mai 2014, avec le titre suivant : Thomas Bompard : « Il faut savoir se mettre en danger »

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