Politique culturelle

Handicap

Un agenda étendu pour l’accessibilité

Par Margot Boutges · Le Journal des Arts

Le 25 mars 2014 - 693 mots

Les agendas d’accessibilité programmés fixent une échéance de 3 à 9 ans pour que les ERP se dotent de structures adaptées aux handicapés.

La loi du 11 février 2005 fixait l’objectif à atteindre : les établissements recevant du public (ERP) doivent être accessibles à tous les handicaps – moteurs, sensoriels, cognitifs, psychiques – au 1er janvier 2015. « La France ne sera pas au rendez-vous », constate Claire-Lise Campion, sénatrice de l’Essonne et présidente de la concertation sur l’accessibilité menée par l’État, dans l’avant-propos des agendas d’accessibilité programmée (Ad’Ap). Ce dispositif présenté fin février – et qui modifiera la législation en vigueur au cours de l’été – ménage des délais supplémentaires de trois à neuf ans pour les retardataires ne s’étant pas encore dotés de structures ou prestations adaptées à l’accueil des publics handicapés. Pour ne pas encourir de sanctions pénales, les maîtres d’ouvrage des ERP auront jusqu’au 31 décembre 2014 pour s’engager à élaborer une programmation de travaux – à rendre avant l’été 2015 – calée sur un calendrier et adossée à un plan de financement.

Sur les 5 205 lieux labellisés « tourisme et handicap » au 31 décembre 2013, 416 sont des lieux patrimoniaux à s’être distingués pour leurs dispositifs d’accueil d’au moins deux handicaps. « Comparés à d’autres ERP, les musées et monuments sont de bons élèves de l’accessibilité », commente Myrha Govindjee, chargée de mission pour Cemaforre, association pour l’accessibilité des loisirs et de la culture. Tous sont cependant encore loin d’être accessibles, en particulier aux personnes à mobilité réduite. Par soucis d’économie, les travaux d’accessibilité (installation d’une rampe, d’un ascenseur, d’une entrée de plain-pied…) sont en effet bien souvent couplés avec un plus vaste chantier sur le bâti ou la muséographie ce qui les repousse souvent dans le temps. Le Musée Galliera – un des cinq musées, parmi les quatorze que gère la Ville de Paris, à être complètement accessible – a intégré l’accessibilité dans un réaménagement généralisé de ses structures. Pour le Musée Carnavalet, ce genre de travaux d’envergure – souhaité par Anne Hidalgo – ne pourrait pas être entamé avant 2018. « On a élaboré un plan handicap qui s’étend jusqu’à 2021 », explique Malika Yenbou, directrice des services techniques de l’établissement Paris Musées. L’audit de tous les monuments du Centre des monuments nationaux (CMN) sera quant à lui achevé fin 2014, selon son directeur Philippe Bélaval, qui se prépare à inscrire un grand nombre de travaux dans le cadre des Ad’Ap. Pour le moment, trois monuments sont véritablement accessibles aux fauteuils sur la centaine que compte le CMN. Certains, telles les tours de Notre-Dame-de-Paris, ne le seront jamais.

Dérogations et mesures de substitutions
Car les musées et monuments se heurtent à la difficulté, voire l’impossibilité, d’adapter leurs architectures, souvent protégées au titre des monuments historiques, à des travaux d’accessibilité. La loi ouvre aux ERP des possibilités de dérogation, notamment en cas de préservation du patrimoine architectural. Celles-ci doivent cependant s’accompagner – pour les ERP remplissant des missions de service public – de mesures de substitution. Un impératif auquel de nombreux établissements ne répondent pas encore suffisamment. Le rapport de Claire-Lise Campion paru en février – qui livre aux cotés des Ad’Ap des propositions d’ajustements de la loi de 2005 – préconise de favoriser les solutions techniques alternatives pour offrir aux handicapés un accès équivalent aux prestations d’un établissement, précisant que celles-ci devraient être ouvertes à tous les publics pour ne pas être discriminatoires. Le Musée Gustave Moreau, accessible à tous fin 2014 dans ses nouvelles salles du rez-de-chaussée, devrait se doter courant 2015 d’outils multimédias pour rendre accessible l’inaccessible : les premier, deuxième et troisième étages de l’atelier, qui ne peuvent accueillir ni rampe ni ascenseur, pourront être arpentés virtuellement grâce à des tablettes tactiles.

À noter que les Ad’Ap introduisent une obligation de suivi, complètement absente de la loi de 2005. Les maîtres d’ouvrage devront fournir un état d’avancement du processus de mise en accessibilité aux commissions consultative départementales de sécurité et d’accessibilité (CCDSA). Un contrôle inédit qui devrait prévenir l’attentisme en matière d’accessibilité qui a pu concerner certaines collectivités. Plusieurs musées – tels les musées municipaux de La Rochelle – ­espèrent depuis trop longtemps leur mise à niveau.

Légende photo

Musée Galliera - © Photo Mbzt - 2011 - Licence CC BY 3.0

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°410 du 28 mars 2014, avec le titre suivant : Un agenda étendu pour l’accessibilité

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